Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 13.djvu/543

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

faisoit profession de cette espece de magie.

PSYCHÉ, s. f. (Mythol.) les amours de Psyché & de Cupidon sont connus de tout le monde. Apulée & Fulgence en ont fait des descriptions fort agréables, mais la Fontaine a embelli leur roman, par les charmans épisodes qu’il y a joints, par le tour original qu’il lui a donné, & par les graces inimitables de son style.

Nous avons une planche, où le mariage de cette belle princesse est représenté ; cupidon marche à la droite de Psyché la tête couverte d’un voile qui descend jusqu’aux piés. C’étoit la coutume chez les anciens, que les personnes qui se marioient, portent un semblable voile. Ce deux amans sont joints avec une chaîne, pour montrer qu’il n’y a point d’union plus intime que celle du mariage. Un des amours tient cette chaîne d’une main, & de l’autre un flambeau.

Pétrone fait un récit de la pompe nuptiale de ces deux amans. Déja, dit-il, on avoit voilé la tête de la jeune Psyché ; déja le conducteur la précédoit avec un flambeau ; déja une troupe de femmes échauffées des vapeurs du vin jettoient mille cris de joie, & accommodoient le lit des nouveaux mariés.

Psyché a des aîles de papillon attachées à ses épaules, & c’est ainsi qu’elle est dépeinte dans tous les monumens antiques. La raison qu’on peut donner de cette fiction, est que les anciens représentoient la nature & les propriétés de l’ame sous l’emblème de Psyché : le mot Psyché en grec signifie l’ame & le papillon, parce que les anciens concevoient l’ame comme un souffle que la légereté de ce foible volatil exprime assez bien.

La fable de Psyché, inventé par Apulée, est un charmant conte de fées, qui a peut-être servi de modele aux ouvrages de ce genre, si communs dans notre langue. (D. J.)

PSYCHIUM, (Géog. anc.) ville de l’île de Crete, selon Ptolomée, l. III. c. xvij. sur la côte méridionale, entre les embouchures des fleuves Matalia & Electra. Elle est appellée Sichino, par Mercator. (D. J.)

PSYCHOLOGIE[1], s. f. (Métaphysique.) partie de la Philosophie, qui traite de l’ame humaine, qui en définit l’essence, & qui rend raison de ses opérations. On peut la diviser en Phychologie empirique, ou expérimentale, & Psychologie raisonnée. La premiere tire de l’expérience les principes, par lesquels elle explique ce qui se passe dans l’ame, & la Psychologie raisonnée, tirant de ces principes d’expérience une définition de l’ame, déduit, ensuite de cette définition, les diverses facultés & opérations qui conviennent a l’ame. C’est la double méthode à posteriori & à priori, dont l’accord produit la démonstration la plus exacte que l’on puisse prétendre. La Psychologie fournit des principes à diverses autres parties de la Philosophie, au droit naturel[2], à la Théologie naturelle[3], à la Philosophie pratique[4], & à la Lo-

gique[5]. Rien de plus propre que l’étude de la Psychologie, pour remplir des plaisirs les plus vifs, un

esprit qui aime les connoissances solides & utiles. C’est le plus grand bonheur dont l’homme soit susceptible ici bas, consistant dans la connoissance de la vérité, en tant qu’elle est liée avec la pratique de la vertu, on ne sauroit y arriver sans une connoissance préalable à l’ame, qui est appellée à acquérir ces connoissances, & à pratiquer ces vertus.

PSYCHRUS, (Géog. anc.) ψυχρὸς, c’est-à-dire, froid. On donna anciennement ce nom à un fleuve de la Thrace, à cause de l’extrème fraîcheur de ses eaux. Il couloit dans l’Assyritide, au territoire de Chalcis. Aristote, de animal. l. III. dit que si les brebis viennent à être couvertes après avoir bû de l’eau de ce fleuve, les agneaux qu’elles feront seront noirs. Psychrus est encore un nom commun à deux fleuves, l’un dans la Colchide, & l’autre dans la Sarmatie asiatique. (D. J.)

PSYCHOMANCIE, s. f. (Divination.) sorte de magie ou de divination, qui consistoit à évoquer les ames des morts.

Ce mot est formé du grec ψυχὴ, ame, & μαντεία, divination.

Les cérémonies usitées dans la psychomancie étoient les mêmes que celles qu’on pratiquoit dans la nécromancie. Voyez Nécromancie.

C’étoit ordinairement dans des caveaux souterreins & dans des antres obscurs qu’on faisoit ces sortes d’opérations, surtout quand on desiroit de voir les simulachres des morts, & de les interroger. Mais il y avoit encore une autre maniere de les consulter, & qu’on appelloit aussi psychomancie, dont toutefois l’appareil étoit moins effrayant. C’étoit de passer la nuit dans certains temples, de s’y coucher sur des peaux de bêtes, & d’attendre en dormant l’apparition & les réponses des morts. Les temples d’Esculape étoient surtout renommés pour cette cérémonie. Il étoit facile aux prêtres imposteurs de procurer de pareilles apparitions, & de donner des réponses ou satisfaisantes ou contraires, ou ambiguës.

Julien l’apostat, pour rendre odieuses les veilles que les premiers fideles faisoient aux tombeaux des martyrs, les accusoit d’y évoquer les morts. Il eût été facile à ceux-ci de récriminer : mais S. Cyrille répondit encore plus solidement, que ce qui avoit été interdit aux Juifs, comme une superstition diabolique, n’étoit point, à plus forte raison, pratiqué par les Chrétiens. Aussi est-ce des payens & des juifs idolâtres qu’Isaïe avoit dit : qui habitant in sepulchris & in delubris idolorum dormiunt. In delubris idolorum dormiebant, ubi stratis pellibus hostiarum incubare soliti erant ut somnis futura cognoscerent : dit S. Jerome dans son commentaire sur cet endroit d’Isaïe ; & Delrio dit qu’on appelloit ces temples psychomantea, parce qu’on prétendoit ou que les dieux ou les ombres des morts y apparoissoient.

  1. PSYCHOLOGIE, dans les cours ordinaires, la doctrine de l’ame n’est qu’une partie de la Pneumatologie ou doctrine des esprits, qui n’est elle même qu’une partie de la Métaphysique. Mais M. Wolff dans la disposition philosophique de son cours, a fait de la Psychologie une partie distincte de la Philosophie, à laquelle il a consacré deux volumes ; l’un pour la Psychologie empyrique ; l’autre pour la Psychologie raisonnée, & il a placé cette tractation immédiatement après sa Cosmologie, parce qu’il en découle des principes pour presque toutes les autres parties, comme les notes suivantes le justifient.
  2. Au droit naturel. On démontre dans le droit naturel, quelles sont les bonnes & les mauvaises actions. Or la raison de cette qualification des actions, ne peut se deduire que de la nature humaine, & en particulier des propriétés de l’ame. La connoissance de l’ame doit précéder l’étude du droit naturel.
  3. A la Théologie naturelle. Nous ne pouvons arriver à la notion des attributs divins, qu’en dégageant la notion des propriétés de notre ame, de ses imperfections & de ses limitations. Il faut donc commencer par acquérir dans la Psychologie, des idées distinctes de ce qui convient à notre ame, pour en abstraire les principes généraux, qui déterminent ce qui convient à tous les esprits, & par conséquent à Dieu.
  4. A la Philosophie pratique. L’Etique ou la Morale a pour objet principal d’engager les hommes à pratiquer les vertus, & à fuir les vices, c’est-à-dire, de déterminer en général les appétits de l’ame d’une maniere convenable. Qui ne voit donc que cette détermination des appétits demande qu’on se représente distinctement la substance dans laquelle ils résident ?
  5. A la Logique. Quoique par des raisons particulieres, on ait conservé à la Logique le premier rang entre les parties de la Philosophie, elle ne laisse pas d’être subordonnée à la Psychologie, entant qu’elle lui emprunte des principes sans lesquels elle ne pourroit faire sentir la différence des idées, ni établir les regles du raisonnement qui sont fondées sur la nature & les opérations de l’ame.