Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 13.djvu/664

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

cheval en rond & sur une piste circulaire autour du pilier, on le mene par les quatre lignes droites & égales qui forment le quarré, tournant la main à chacun des angles qu’on suppose qu’elles forment à une égale distance du centre, ou du pilier qui le représente.

Quarré, (Charpent.) faire le trait quarré, selon les ouvriers, c’est élever une ligne perpendiculaire sur une autre ligne. (D. J.)

Quarré, bois, (Commerce de bois.) c’est le bois de charpente & de sciage dont on fait les poutres, les solives, les poteaux, & autres sortes de bois qui se débitent pour les ouvrages des Charpentiers & les assemblages des Menuisiers.

Quarré bataillon, (Arch. milit.) c’est un bataillon qui a le nombre des hommes de la file egal au nombre des hommes du rang. Bataillon quarré du terrein est celui qui a le terrein de chacune de ses ailes égal en étendue au terrein de la tête, ou à celui de la queue. Dict. milit. (D. J.)

Quarré perspectif, (Perspective.) c’est la représentation d’un quarré en perspective : ce quarré comprend ordinairement toutes les assietes des objets qu’on veut représenter dans un tableau, & pour cet effet, on le divise en plusieurs petits quarrés perspectifs, par le moyen desquels on décrit en abrégé les apparences de tout ce que l’on veut représenter dans le tableau. Voyez la perspective de M. Desargues.

Quarré, (Jardin.) s’entend d’abord d’une forme quarrée telle que seroit un parterre, un bâtiment aussi long que large : ce qui s’évite ordinairement, n’étant pas une figure heureuse.

On dit encore un quarré de bois, de foin, de parterre, de potager.

Un quarré long, s’il est régulier, est un vrai parallélogramme.

Quarré, en terme d’Orfevre en Grosserie, c’est une espece de rebord qui seroit sur le bassinet d’un chandelier, &c. ou même au milieu d’une piece, comme dans le bassinet entre le colet & le panache. Voyez Colet & Panache.

QUARREAU ou GARRO, en latin quadrellus, quarellus, quadrilus, quadrum, (Art milit.) espece de grosse fleche dont le fer formoit une pyramide dont la base étoit un quarré.

Les quarreaux étoient empennés, & quelquefois empennés d’airain. Il y en avoit de fort grands, & ceux-là étoient lancés par des balistes ; les autres l’étoient avec l’arbalete.

Le pere Daniel remarque que d’Aubigné donne le nom de quarreaux du tems de Henri IV. à des balles de pistolet : ce qui lui fait penser qu’apparemment on se servoit quelquefois de balles quarrées. (Q)

Quarreaux, s. m. pl. (Monnoie.) ce sont les lames d’or, d’argent, ou de billon, réduites à-peu-près à l’épaisseur des especes à fabriquer, & coupées en morceaux quarrés approchant du diamètre des mêmes especes. (D. J.)

Quarreaux, terme de jeu de paume, ce sont des pierres quarrées dont tous les jeux de paume sont pavés. Ces quarreaux n’ont point de longueur fixée, mais ils doivent être tous de même largeur, parce qu’ils servent à désigner la longueur des chasses ; ainsi on dit, la chasse est à six, huit, dix quarreaux, &c.

QUARRÉE, ou bréve, étoit dans nos anciennes musiques, une note ainsi figurée , qui valoit deux rondes ou trois, selon que la mesure étoit à deux ou à trois tems. Voyez Breve. (S)

Quarrées-les-tombes, (Géog. mod.) village de l’Auxois, province de Bourgogne, nommé en latin moderne parochia de quadratis, en sous-entendant apparemment lapidibus ; dans ce village, depuis un tems immémorial, on a découvert, & l’on dé-

couvre encore des tombeaux de pierre. M. Moreau de Mautour, qui a communiqué sur ce sujet en 1716, des réflexions à l’académie des belles-lettres, dit que ce village est situé sur les confins de la petite contrée du Morvant, à deux lieues de la ville d’Avallon, & que l’espace du terrein où l’on trouve ces tombeaux, ne contient qu’environ six cens soixante pas de longueur, & environ cent soixante de largeur : ces tombes qui sont d’une pierre grisâtre, ont environ cinq ou six piés de longueur. On en a brisé un grand nombre, pour bâtir & pour paver l’église de ce lieu ; on s’en est même quelquefois servi pour en faire de la chaux ; on en a réservé quelques-unes pour la montre, & on les a laissées dans le cimetiere.

Ce qu’il y a de singulier, c’est qu’on ne voit sur ces tombeaux aucune marque de christianisme, ni même d’autres figures, & qu’il n’y en a qu’un seul sur lequel on ait vu une croix gravée, & sur un autre un écusson qu’on ne sauroit déchiffrer. En creusant les fondemens de la sacristie, on en déterra deux dans lesquels on trouva deux pendans d’oreille ; dans un autre tiré d’une cave, quelques ossemens avec deux autres pendans d’oreille, & dans quelques autres enfin, des éperons.

Il n’y a, selon M. de Mautour, qu’une seule carriere dont on ait pu tirer les pierres qui ont servi à faire ces cercueils. Elle est dans un endroit nommé champ-rotard, à six lieues de Quarrées-les-tombes ; & d’habiles maçons, qui ont examiné la qualité & la couleur de la pierre de cette carriere, parfaitement ressemblante à celle des tombeaux, sont convenus de ce fait.

Savoir maintenant pour quelle raison il y a tant de tombeaux dans un lieu si peu célebre, c’est ce qu’il n’est pas aisé de deviner. On n’ignore pas qu’on avoit accoutumé autrefois d’enterrer les morts hors des villes, & sur les grands chemins : que cet usage s’observoit à Paris, & dans toutes les Gaules, dans les premiers tems du christianisme, & qu’il y dura jusques bien avant, sous la troisieme race de nos rois ; l’on pourroit en conclure, ou qu’il y avoit quelque ville considérable aux environs de Quarrées, ou que ce village auroit été un magasin de tombeaux, pour en fournir aux villes voisines : ces deux conjectures souffrent néanmoins de grandes difficultés. On ne trouve aucun vestige de villes aux environs de Quarrées ; les plus voisines sont Avalon, Saulieu & Lorme. De ces deux dernieres, l’une est aujourd’hui misérable, & l’autre trop éloignée. Avalon n’en est véritablement qu’à deux lieues ; mais, outre qu’on n’y a jamais découvert aucun de ces tombeaux, cette ville est plus proche de la carriere que du village de Quarrées ; ainsi il n’y a pas d’apparence qu’on ait été chercher à quatre lieues, ce qu’on trouvoit à moitié chemin.

Dans cet embarras, M. de Mautour a recours à l’histoire, pour voir si quelque bataille n’auroit pas donné occasion à ce prodigieux amas de tombeaux. Deux évenemens paroissent favorables à cette conjecture. Après la défaite & la mort d’Abdérame, général des Sarrasins, les débris de son armée s’étant joints aux Wandales, aux Alains, & aux Ostrogots, ces barbares désolerent la Bourgogne, & se rendirent maîtres de Mâcon, de Châlons, de Dijon, d’Auxerre, d’Autun, & de plusieurs autres villes. Or Avalon étant située entre Autun & Auxerre, il y a lieu de croire que ces peuples ravagerent aussi cette contrée : ces tombeaux qui se trouvent dans Quarrées & dans la campagne voisine, sont une nouvelle raison de le penser.

Le second évenement est arrivé au commencement du xj. siecle, dans les années 1003, 1004 & 1005. Henri premier du nom, duc de Bourgogne, étant mort sans enfans, Landri, comte de Nevers,