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tie acquêt, il est au choix de l’acquéreur de laisser le tout au retrayant, ou seulement la portion qui est propre ; il en est de même lorsqu’on a vendu par le même contrat plusieurs héritages les uns propres, les autres acquêts, & qu’il n’y a qu’un seul prix.

Le retrait lignager n’est point cessible, & si le retrayant qui est préféré, prêtoit son nom à un tiers, les autres lignagers qui auroient intenté leur action dans l’an & jour, pourroient revenir au retrait dans l’an & jour depuis que la collusion auroit été découverte.

Le retrait lignager est préféré au féodal, tellement que le lignager peut retirer sur le seigneur auquel l’héritage auroit été transmis à titre de retrait féodal.

Mais le retrait conventionnel ou réméré est préféré au retrait lignager, aussi-bien qu’au retrait féodal.

L’héritage retiré par un lignager est tellement affecté à la famille, que si ce retrayant meurt, laissant un héritier des propres de cette ligne, & un héritier des acquêts, l’héritage retiré appartient à l’héritier des propres, en rendant néanmoins dans l’an du décès de l’héritier des acquêts le prix de l’héritage.

Les formalités du retrait étant différentes presque dans chaque coutume, on doit suivre celles de la coutume dans laquelle les héritages sujets à retrait sont situés, & non pas celles du lieu où la demande se poursuit.

Pour en donner une idée, on se contentera de rappeller ici brievement celles que présentent la coutume de Paris.

Suivant cette coutume, l’action en retrait doit être intentée, & le terme de l’assignation doit échoir dans l’an & jour que le contrat de vente a été ensaisiné, à l’égard des rotures ; & pour les héritages tenus en fiefs, du jour de la reception en foi : si c’est un franc-aleu, ou un héritage acquis par le seigneur dans sa propre mouvance ou censive, le tems du retrait ne court que du jour que l’acquisition a été publiée en jugement au plus prochain siege royal.

L’an du retrait court contre toutes sortes de personnes, mineurs, absens & autres, sans espérance de restitution.

L’assignation doit contenir offre de bourse, deniers, loyaux-coûts & à parfaire ; il faut que l’huissier ou sergent ait une bourse à la main ; mais il n’est pas nécessaire que le prix y soit en entier, il suffit qu’il y ait quelque piece d’argent.

Ces offres doivent être réitérées à toutes les journées de la cause, c’est-à-dire dans toutes les procédures faites ou réputées faites en jugement ; savoir, en cause principale jusqu’à la contestation en cause inclusivement, & en cause d’appel jusqu’à la conclusion aussi inclusivement.

Si la cause est portée à l’audience, ne fût-ce que par défaut, l’avocat doit avoir en main une bourse avec de l’argent, en réitérer les offres dans les mêmes termes.

Quand l’acquéreur tend le giron, c’est-à-dire reçoit les offres, ou que le retrait est adjugé, le retrayant doit payer à l’acquéreur, ou à son refus, consigner dans les 24 heures, après que l’acquéreur aura mis son contrat au greffe, partie présente, ou duement appellée, & qu’il aura affirmé le prix s’il en est requis par l’acquéreur.

Pour que la consignation soit valable, il faut qu’elle soit précédée d’offres réelles, & qu’elle contienne tous les prix en bonnes especes ayant cours. Il faut aussi appeller l’acquéreur pour être présent, si bon lui semble, à la consignation, & que le tout soit fait dans les 24 heures.

Toutes ces formalités sont tellement de rigueur, que celui qui manque à la moindre chose est déchu du retrait : qui cadit à syllabâ, cadit à toto ; ce qui a fait croire à quelques auteurs que le retrait lignager

étoit odieux, comme gênant la liberté du commerce ; mais s’il étoit odieux, ces coutumes ne l’auroient pas admis ; elles ont seulement voulu empêcher les parens d’en abuser pour vexer l’acquéreur.

Le remboursement des loyaux-coûts doit se faire après qu’ils sont liquidés : ils consistent dans les frais du contrat, les droits seigneuriaux, les labours & semences, les réparations nécessaires.

Le retrayant doit rembourser les droits seigneuriaux en entier, quoique le seigneur ait fait remise d’une partie à l’acquéreur.

Un acquéreur qui est exempt de droits seigneuriaux dans la mouvance du roi, ne laisse pas de les répéter du retrayant, comme s’il les avoit payés, à-moins que l’acquéreur & le retrayant ne fussent tous deux privilégiés.

Sur le retrait lignager, voyez les dispositions des coutumes au tit. du Retrait, & les commentateurs, Tiraqueau, Louet, Coquille, Dunod, & ci-devant le mot Propre. (A)

Retrait local ou coutumier : on appelloit ainsi en Alsace le droit que les bourgeois prétendoient avoir de se faire subroger en l’achat des effets mobiliers qui étoient vendus dans leur ville, mais ce prétendu droit y a été proscrit par divers arrêts. Voyez Maillart sur Artois, tit. III. n°. 56. & ci-devant Retrait de bourgeoisie.

Retrait de mi-denier est une espece particuliere de retrait lignager, établi par la coutume de Paris & par la plûpart des autres coutumes. Quand des conjoints durant leur mariage acquierent leur héritage propre d’un vendeur, dont l’un d’eux est parent de la ligne, il n’y a pas lieu au retrait tant que le mariage subsiste ; mais après sa dissolution, la moitié de cet héritage est sujet à retrait au profit du conjoint lignager, ou de ses héritiers à l’encontre de l’autre, ou de ses héritiers qui ne le sont pas.

On appelle ce retrait de mi-denier, parce qu’on n’y rembourse que la moitié du prix principal & des loyaux couts.

Ce retrait n’a lieu qu’en cas d’acquisition faite à prix d’argent ou à rente rachetable, & non en cas que les conjoints ayent eu le propre par retrait ; car en ce cas l’héritage est fait propre pour le tout au seul conjoint lignager, qui est seulement tenu de rembourser le prix, suivant l’article 139.

Un des héritiers du conjoint lignager ne voulant pas user de ce retrait, l’autre peut l’exercer pour le tout.

L’an & jour pour l’exercer ne court que du jour de l’ensaisissement ou inféodation ; les formalités sont les mêmes que pour le retrait ordinaire.

Il n’a point lieu quand les deux conjoints sont lignagers, ou que le conjoint non-lignager a des enfans en ligne.

Ce retrait n’est ouvert qu’au décès de l’un des conjoints.

Quand le conjoint lignager ou ses héritiers négligent d’exercer le retrait, en ce cas les autres lignagers non-copartageans sont admis au retrait de la moitié du propre, pourvu qu’ils intentent leur action dans l’an du décès du conjoint lignager. Voyez les articles 155, 156 & 157, de la coutume de Paris, & ce que les commentateurs ont dit sur ces articles. (A)

Retrait partiaire, usité en Flandres, a lieu quand un de plusieurs copropriétaires vend à un étranger sa part de l’effet commun, un autre copropriétaire peut retirer la portion vendue pour la réunir à son tout. Voyez Retrait de communion, de consolidation, d’écleche ou éclipsement, de fraresche ou frareuseté.

Retrait de préférence, est la faculté qu’une personne appellée au retrait a de se faire subroger au