Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 14.djvu/27

La bibliothèque libre.
Aller à la navigation Aller à la recherche
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

terus, cette perte de sang se rapporte à l’hémorrhagie de matrice.

II. La menstruation qui procede de pléthore, & qui arrive au commencement des fievres aiguës, & autres maladies inflammatoires, est salutaire, à moins qu’elle ne dure trop long tems ; mais dans plusieurs maladies épidémiques, érésipélateuses, putrides, colliquatives, vers la fin de la petite vérole, dans les pétéchies, les aphthes, les maladies bilieuses, le scorbut & autres semblables, le flux immodéré des regles, augmente le mal ; alors il faut recourir aux rafraîchissans légerement astringens, pour l’appaiser.

III. Quand ce flux est excité par des diurétiques âcres, des emménagogues, des remedes abortifs, des aromatiques, des stimulans, des spiritueux, par l’excès des plaisirs de l’amour, ou l’intromission des pessaires dans le vagin, il faut retrancher ces causes, & faire usage des rafraîchissans combinés avec les astringens. Lorsque cet accident vient à la suite de quelque violente passion de l’ame, ou de vapeurs hystériques, il se dissipe par le repos ou par le secours des anodins.

IV. La femme qui a souvent éprouvé un accouchement, ou un avortement laborieux, est sujette à des regles immodérées, parce que les orifices des vaisseaux de l’utérus sont extrèmement dilatés. Il convient dans ce cas d’employer, tant intérieurement qu’extérieurement, les corroborans, en soutenant par artifice le bas-ventre, depuis le pubis jusqu’à l’ombilic, & en desserrant les hypocondres.

V. Tout ce qui reste dans la cavité de la matrice, comme une portion du placenta, une mole, un grumeau, & autres corps semblables qui empêchent la contraction de ce viscere, font couler sans cesse le sang goutte à goutte, jusqu’à ce qu’on ait retiré ces matieres étrangeres ; mais le déchirement, la contusion, l’ulcere, la rupture, & toute autre lésion de cet organe, d’où résulte une effusion de sang, se rapportent à l’hémorrhagie de la matrice.

VI. Dans le flux immodéré des regles, comme dans toute hémorrhagie, naissent la foiblesse, le frissonnement, la pâleur, la cachexie, la maigreur, la suffocation, la syncope, l’hydropisie, l’œdème, l’enflure des extrémités, la corruption spontanée, l’irritabilité, le vertige, la fievre hectique, & quelquefois le délire. Il en résulte encore des effets particuliers, qui appartiennent à la matrice & au vagin, comme les fleurs blanches & la stérilité ; enfin par sympathie, les mamelles & l’estomac se trouvent attaqués.

VII. Quelle que soit la cause productrice du flux immodéré des regles, il ne convient pas toujours de l’arrêter subitement ; mais il convient plûtôt de le diminuer peu-à-peu ; après y avoir réussi, il faut l’abandonner à ses périodes dans les femmes formées qui ne sont point enceintes ni nourrices ; à l’égard de celles qui sont d’un âge avancé, ou qui sont grosses, la trop grande abondance de sang qu’elles perdent, demande l’usage prudent de la saignée.

Comme la suppression des regles est une maladie beaucoup plus compliquée que leur perte immodérée, nous nous y arrêterons davantage. Remarquons d’abord que les regles ne paroissent point ordinairement avant la douzieme année, & après la cinquantieme, non plus que dans les femmes grosses & les nourrices. Si ces dernieres ont cet écoulement périodique, quoiqu’il soit naturel dans un autre tems, il est alors morbifique. On peut connoître aisément par l’âge, & dans les nourrices, que cette évacuation est arrêtée ; mais la chose est bien plus difficile à découvrir dans les femmes grosses. Elles ne sont point sujettes aux symptomes dont on parlera plus bas, ou s’ils paroissent, ils s’évanouissent insensible-

ment ; quoique la suppression des regles subsiste, les

mamelles & le ventre s’enflent ; & enfin les femmes grosses sentent le mouvement du fœtus dans la matrice.

La suppression des regles, ainsi que toutes les évacuations naturelles, doit sa naissance à différentes causes qu’il faut chercher avec soin, pour former le pronostique, & établir le traitement.

I. Dans les femmes d’un âge mûr, après leurs couches, à la suite de grandes hémorrhagies, de maladies considérables, les évacuations menstruelles sont retardées d’un ou de deux périodes sans inconvénient : si dans ce tems, on recouroit imprudemment aux emménagogues, la malade payeroit bien cher cette méthode curative déplacée, puisqu’on évacueroit alors un sang qui devroit être conservé.

II. Quand il arrive une évacuation excessive des autres humeurs, par les selles, par les urines, par la peau, par un abcès, un ulcere, une fistule, &c. le défaut de ces mêmes humeurs qui en résulte, diminue, supprime, ou retarde les menstrues. La suppression de cette évacuation a lieu pareillement dans les femmes convalescentes, & dans celles qui ont été long-tems malades, sans qu’il en arrive aucun danger considérable.

III. La cause la plus fréquente de suppression & de retardement des regles est l’épaississement & la viscosité des humeurs, qui est produite par une nourriture humide, glutineuse, incrassante, ou par le ralentissement du mouvement animal. Cet état se connoît par la langueur du pouls, sa foiblesse, la somnolence, la pâleur, la froideur du corps, & d’autres signes semblables. On traitera cette suppression par les résolutifs, les stimulans, les frictions & l’exercice du corps. Ensuite il faut venir aux emménagogues, pour provoquer les menstrues ; les purgatifs résolutifs font aussi des merveilles. Quant à la saignée, elle n’est d’aucune utilité, à moins qu’on ne la regarde comme un remede préparatoire.

IV. Les alimens qu’on a pris, faute d’avoir été suffisamment préparés dans les premieres voies, & dans les organes de la circulation, venant à dégénérer en humeurs crues, comme il arrive dans les cacochymes, les scorbutiques, retardent cet écoulement périodique, qui revient de lui-même, après qu’on a guéri ces maladies. Alors il faut maintenir le ventre libre, & si les regles ne coulent pas, il en faut provoquer l’évacuation par les emménagogues.

V. Les parties solides relâchées poussant le sang vers les vaisseaux de la matrice avec un mouvement vital, trop foible pour les dilater, & en même tems produisant la viscosité des humeurs, il en arrive une suppression qui demande les corroborans, les stimulans & les utérins.

VI. Les femmes robustes, d’un tempérament sec, exercées par de grands travaux, & accoutumées à une vie dure, sont non-seulement peu réglées, mais même supportent facilement la suppression des regles. Si cependant cet état devient morbifique, il faut leur donner les nitreux laxatifs, & les mettre à l’usage externe & interne des humectans. Les jeunes femmes d’un tempérament délicat, & qui n’ont point eu d’enfans, supportent aussi long-tems, sans beaucoup d’incommodité, la suppression des regles, à moins qu’elles ne soient valétudinaires & attaquées des pâles couleurs. Dans ces cas, il est bon d’attendre que le corps ait pris plus de croissance ; car la provocation prématurée de cette évacuation n’est pas nécessaire.

VII. Celles qui sont hystériques, sujettes à des spasmes dont on ne connoît pas la cause, aux borborigmes, à la douleur des lombes, & celles qui dans le tems de leurs regles sont tourmentées par des symptomes vagues, tombent aisément dans une suppres-