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parmi les grands, parmi les citoyens, dans la classe des affranchis & des esclaves.

Lucullus s’attacha à l’académie ancienne. Il recueillit un grand nombre de livres ; il en forma une bibliotheque très-riche, & son palais fut l’asyle de tous les hommes instruits qui passerent d’Athènes à Rome.

Sylla fit couper les arbres du lycée & des jardins d’académies, pour en construire des machines de guerre ; mais au milieu du tumulte des armes, il veilla à la conservation de la bibliotheque d’Apellicon de Teïos.

Ennius embrassa la doctrine de Pythagore ; elle plut aussi à Nigidius Figulus. Celui-ci s’appliqua à l’étude des Mathématiques & de l’Astronomie. Il écrivit des animaux, des augures, des vents.

Marius Brutus préféra le Platonisme & la doctrine de la premiere académie, à toutes les autres manieres de philosopher qui lui étoient également connues ; mais il vécut en stoïcien.

Cicéron, qui avoit été proscrit par les triumvirs avec M. Térentius Varron, le plus savant des Romains, inscrit celui ci dans la classe des sectateurs de l’ancienne académie. Il dit de lui : tu ætatem patriæ, tu descriptiones temporum, tu sacrorum jura, tu sacerdotum, tu domesticam, tu bellicam disciplinam, tu sedem regionum & locorum, tu omnium divinarum humanarumque nomina, genera, officia, causas aperuisti ; plurimumque poetis nostris omninoque latinis & litteris luminis attulisti & verbis, atque ipse varium & elegans omni fere numero poema fecisti ; Philosophiamque multisque locis inchoasti, ad impellendum satis, ad docendum parum.

M. Pison se montra plutôt péripatétien qu’académicien dans son ouvrage, de finibus bonorum & malorum.

Cicéron fut alternativement péripatéticien, stoïcien, platonicien & sceptique. Il étudia la Philosophie comme un moyen sans lequel il étoit impossible de se distinguer dans l’art oratoire ; & l’art oratoire, comme un moyen sans lequel il n’y avoit point de dignité à obtenir dans la république. Sa vie fut pusillanime, & sa mort héroïque.

Le peuple que son éloquence avoit si souvent rassemblé aux rostres, vit au même endroit ses mains exposées à côté de sa tête. L’existence de ces dieux immortels, qu’il atteste avec tant d’emphase & de véhémence dans ses harangues publiques, lui fut très suspecte dans son cabinet.

Quintus Lucilius Balbus fit honneur à la secte stoïcienne.

Lucain a dit de Caton d’Utique :

Hi mores, hæc duri immota Catonis
Secta fuit, servare modum, finemque tenere,
Naturamque sequi, patriamque impendere vitam,
Nec sibi, sed toti genitum se credere mundo ;
Huic epuloe, vicisse famem, magnique penates
Summovisse hyemem tecto ; pretiosaque vestis,
Hirtam membra super Romani more quiritis
Induxisse togam, Venerisque huic maximus usus,
Progenies. Urbi pater est, urbique maritus.
Justitiæ cultor, rigidi servator honesti,
In commune bonus, nullosque Catonis in actus
Subrepsit, partemque tulit sibi nata voluptas
.

Ce caractere où il y a plus d’idées que de poésie, plus de force que de nombre & d’harmonie, est celui du stoïcien parfait. Il mourut entre Apollonide & Démétrius, en disant à ces philosophes : « Ou détruisez les principes que vous m’avez inspirés, ou permettez que je meure ».

Andronicus de Rhodes suivit la philosophie d’Aristote.

Cicéron envoya son fils à Athènes, sous le péripatéticien Cratippus.

Torquatus, Velleius, Atticus, Papirius, Pætus, Verrius, Albutius, Pison, Pansa, Fabius Gallus, & beaucoup d’autres hommes célebres embrasserent l’Epicuréisme.

Lucrece chanta la doctrine d’Epicure. Virgile, Varius, Horace écrivirent & vécurent en épicuriens.

Ovide ne fut attaché à aucun système. Il les connut presque tous, & ne retint d’aucun que ce qui prêtoit des charmes à la fiction.

Manilius, Lucain & Perse pancherent vers le Stoïcisme.

Séneque inscrit le nom de Tite-Live parmi les Philosophes en général.

Tacite fut stoïcien ; Strabon aristotélicien ; Mécène épicurien ; Cneius Julius & Thraseas stoiciens ; Helvidius Priscus prit le même manteau.

Auguste appella auprès de lui les Philosophes.

Tibere n’eut point d’aversion pour eux.

Claude, Néron & Domitien les chasserent.

Trajan, Hadrien & les Antonins les rapellerent.

Ils ne furent pas sans considération sous Septime Sévere.

Héliogabale les maltraita ; ils jouirent d’un sort plus supportable sous Alexandre Sévere & sous les Gordiens.

La Philosophie, depuis Auguste jusqu’à Constantin, eut quelques protecteurs ; & l’on peut dire à son honneur que ses ennemis, parmi les princes, furent en même tems ceux de la justice, de la liberté, de la vertu, de la raison & de l’humanité. Et s’il est permis de prononcer d’après l’expérience d’un grand nombre de siecles écoulés, on peut avancer que le souverain qui haïra les sciences, les arts & la Philosophie, sera un imbécille ou un méchant, ou tous les deux.

Terminons cet abregé historique de la philosophie des Romains, c’est qu’ils n’ont rien inventé dans ce genre ; qu’ils ont passé leur tems à s’instruire de ce que les Grecs avoient découvert, & qu’en Philosophie, les maîtres du monde n’ont été que des écoliers.

Romains, roi des, (Hist. mod. Droit public.) c’est le nom qu’on donne en Allemagne à un prince, qui, du vivant de l’empereur, est élu par les électeurs, pour être son vicaire & son lieutenant-général, & pour lui succéder dans la dignité impériale, aussi-tôt après sa mort, sans avoir besoin pour cela d’une nouvelle élection.

L’usage d’élire un roi des Romains a été établi en Allemagne, pour éviter les inconvéniens des interregnes, & pour assurer le bien-être & la tranquillité de l’empire que la concurrence des contendans pouvoit altérer. Pour élire un roi des Romains, il faut que tous les électeurs s’assemblent & déliberent si la chose est avantageuse au bien de l’empire. En vertu de la capitulation impériale, le roi des Romains peut être choisi par les électeurs indépendamment du consentement de l’empereur, lorsqu’il n’a point de bonnes raisons pour s’y opposer. Les Jurisconsultes ne sont point d’accord pour savoir si un roi des Romains a, en cette qualité, une autorité qui lui est propre, ou si son autorité n’est qu’empruntée (delegata). Il paroît constant que le roi des Romains n’est que le successeur désigné de l’empereur, & qu’il ne doit être regardé que comme le premier des sujets de l’empire.

Les empereurs qui en ont eu le crédit, ont eu soin de faire élire leur fils ou leur frere roi des Romains, pour assurer dans leur famille la dignité impériale qui n’est point héréditaire, mais qui est élective. Voyez Empereur & Capitulation impériale.

Romains, jeux, (Antiq. rom.) ou les grands jeux, parce que c’étoit les plus solemnels de tous. Ils