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champ, & comme le sainfoin est en plus grosses masses, il craint moins la rosée, & même la pluie quand elle n’est pas abondante.

Si on laissoit le sainfoin répandu fort mince sur tout le champ pendant une huitaine de jours, quand même il ne tomberoit point d’eau, il perdroit beaucoup de sa qualité. C’est pourquoi, sitôt qu’il est suffisamment sec, il faut le mettre en grosses meules, ou le serrer dans les granges : & à cette occasion, il est bon de remarquer, que supposant le sainfoin & le foin ordinaire également secs, on peut faire les meules de sainfoin beaucoup plus grosses que celles de foin, sans craindre qu’il s’échauffe, parce que les brins se pressant moins exactement les uns contre les autres, il passe entre deux de l’air qui empêche la fermentation.

On a observé que le sainfoin n’est jamais meilleur que quand il a été desseché par le vent, & sans le secours du soleil. Outre cela, une pluie qui feroit noircir le foin ordinaire, le trefle, & même la luzerne, n’endommage pas le sainfoin ; il n’est véritablement altéré que quand il est pourri sur le champ.

Quand le tems est disposé à la pluie, si le sainfoin n’est pas encore sec, on peut le ramasser en petits meulons, & on ne craindra pas qu’il s’échauffe, si l’on met au milieu de chaque meulon une corbeille, ou un fagot qui permettre la circulation de l’air & l’évaporation des vapeurs ; mais sitôt que l’herbe est bien seche, il faut la serrer dans des granges, ou en former de grosses meules, & les couvrir avec du chaume.

Parlons à présent de la récolte du sainfoin qu’on a laissé mûrir pour la graine. Comme toutes les fleurs du sainfoin ne s’épanouissent que les unes après les autres, la graine ne mûrit pas non plus tout-à-la-fois. Si l’on coupoit le sainfoin lorsque les graines d’en bas sont mûres, on perdroit celles de la pointe. Si l’on attendoit pour faucher les sainfoins, que la graine de la pointe fût mûre, celle d’en bas seroit tombée & perdue. Ainsi il faut choisir un état moyen, & alors les graines qui sont encore vertes achevent de mûrir, & au bout de quelque tems, elles sont aussi bonnes que les autres.

Il faut bien se donner de garde de faucher, ni de ramasser ces sortes de sainfoins dans la chaleur du jour ; la plus grande partie de la graine seroit perdue. Le vrai tems pour ce travail, est le matin ou le soir, quand la rosée ou le serein rendent la plante plus souple.

S’il fait beau, le sainfoin se desseche assez en ondins, sans qu’il soit besoin de les retourner ; mais s’il a plû, & qu’on soit obligé de retourner les ondins, le mieux est pour ne point faire tomber la graine, de passer le bâton sous les épis & de renverser l’ondin de façon que les piés des sainfoins ne fassent que tourner comme sur un axe. Il ne faut pas attendre que le sainfoin soit fort sec pour le mettre en meules, car on courroit risque de perdre beaucoup de graines. Il y a des gens qui pour ne point courir ce risque, l’enlevent dans des draps ; alors on le peut serrer si sec qu’on veut, puisque la graine ne peut se perdre.

Mais si l’on veut battre le sainfoin dans le champ, il ne faut point faire de meules ; il suffit de ramasser le sainfoin en meulons, & pour lors il ne peut pas être trop sec. On prépare une aire à un coin d’un champ, ou bien l’on étend un grand drap par terre ; deux métiviers battent le sainfoin avec des fléaux, pendant que deux personnes leur en apportent de nouveau dans des draps, & deux autres nettoient grossierement avec un crible la graine qui est battue. La graine ainsi criblée, & mise dans des sacs, est portée à la maison. A l’égard de la paille, on la ramasse en grosses meules pour la nourriture du bétail ; mais il faut empêcher qu’elle ne soit mouillée, parce qu’elle ne seroit plus bonne à rien.

Un article très-important, & néanmoins très-difficile, est de conserver la semence qui a été battue dans le champ ; car il n’y a pas le même inconvénient pour celle qu’on engrange avec la paille ; elle se conserve à merveille.

Celle qui est dépouillée de sa paille, a une disposition très-grande à fermenter, de sorte qu’un petit tas est assez considérable pour que la graine du centre s’échauffe. Inutilement l’étendroit-on dans un grenier à sept ou huit pouces d’épaisseur ; si on ne la remuoit pas tous les jours, elle s’échaufferoit. Le meilleur moyen est de faire dans une grange un lit de paille, puis un lit fort mince de graine, un lit de paille & un lit de graine, & l’hiver on peut retirer cette graine, & la conserver dans un grenier ; car comme elle a perdu sa chaleur, elle ne court plus le même risque de se gâter.

Il faut terminer ce qui regarde le sainfoin, par avertir que si on ne faisoit pas paître les sainfoins par les bestiaux, ils seroient bien meilleurs qu’ils ne sont. M. Tull recommande surtout qu’on les défende du bétail la premiere & la seconde année & tous les ans au printems.

Enfin il prétend qu’il a rajeuni des pieces de sainfoin où le plant étoit languissant, en faisant labourer des plates-bandes de trois piés de largeur, & laissant alternativement des planches de sainfoin de même largeur. Il assure que ce sainfoin ayant étendu ses racines dans les plates-bandes labourées, avoit repris vigueur & fourni de très-bonne herbe. Voyez Tull, Horseboing Husbandry, p. 76 & suiv. ou le traité de M. du Hamel de la culture des terres, tom. I. (D. J.)

Sainfoin, saint-foin ou gros foin, (Mat. méd.) les anciens faisoient de cette plante beaucoup plus d’usage que nous. Dioscoride, Galien, Pline, &c. en parlent comme d’un remede usité, tant à l’extérieur qu’à l’intérieur. Ils regardoient les feuilles de cette plante comme fortifiantes, résolutives, diaphorétiques & diurétiques : mais encore une fois, les modernes ne l’employent plus.

On a observé que les feuilles de sainfoin cueillies immédiatement avant l’apparition de la fleur, & séchées avec soin, prenoient la forme extérieure & l’odeur du thé verd : il ne seroit pas étonnant qu’elles eussent aussi la même vertu. Voyez Thé. (b)

SAINGOUR, (Géog. mod.) riviere d’Asie, dans l’Indoustan, sur la route d’Agra à Patna. Elle se perd dans le Géméné. (D. J.)

SAINT, adj. (Gramm. & Théolog.) ce nom qui signifie pur, innocent, parfait, convient particulierement à Dieu qui est saint par essence.

Il a été communiqué aux hommes célebres par leur vertu & leur piété : les premiers fideles l’ont donné généralement à tous les chrétiens qui vivoient conformément aux lois de Jesus-Christ. Dans la suite le nom de saint & de très-saint, a été donné & se donne encore aux patriarches, aux évêques, aux prêtres, aux abbés, & autres personnes d’une éminente piété. Mais on a particulierement affecté le nom de saint, à ceux qui sont morts & que l’on croit jouir de la gloire éternelle. Les Grecs l’ont donné aux martyrs, à leurs patriarches, à leurs évêques morts dans la communion de l’Eglise catholique, & aux personnes qui avoient vécu & qui étoient mortes saintement. Dans l’église latine ce nom a été donné autrefois aux martyrs, & à tous ceux dont la sainteté étoit notoire. Depuis le xii. siecle on l’a réservé à ceux qui ont été canonisés par les papes après les informations & cérémonies accoutumées. Voyez Canonisation.

Un des points qui divisent les Protestans d’avec les Catholiques, c’est que ceux-ci adressent aux saints des vœux & des prieres pour obtenir leur intercession auprès de Dieu ; ce que les Protestans condamnent