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n’a point changé, la disposition méchanique de ces organes est aussi toujours à-peu-près la même. Tout le changement est donc du côté de l’ame, qui ne se forme plus les mêmes idées à l’occasion des mêmes impressions. Il n’y a donc pas d’idée attachée essentiellement à telles ou telles impressions, au moins il n’y en a point que l’ame ne puisse changer ; de-là viennent ces goûts de mode, ces mets chéris dans un pays, détestés dans d’autres ; de-là vient enfin qu’on s’accoutume au désagréable, qu’on le métamorphose quelquefois en un objet de plaisir, & qu’il tombe ensuite en un objet de dégoût. (Le chevalier de Jaucourt.)

SAUF, SAUVE, adj. (Gram.) qui est en sûreté, à qui il n’est point arrivé de dommage ou d’accident, à qui il n’en sauroit arriver. Il est sorti de cette action sain & sauf. Il a obtenu son bagage & sa vie sauve ; sauf mon honneur, j’abandonne le reste ; sauf à recommencer ; sauf à se rebattre.

Sauf, (Gram. Jurisprud.) terme de pratique qui sert à exprimer la réserve & exception que l’on fait de quelque chose, comme quand on dit sauf à se pourvoir, c’est-à-dire qu’on se réserve à se pourvoir. (A)

Sauf-conduit, (Droit politiq.) les sauf-conduits sont des conventions faites entre ennemis & qui méritent qu’on en dise quelque chose. On entend par sauf-conduit un privilege accordé à quelqu’un des ennemis sans qu’il y ait cessation d’armes, & par lequel on lui accorde la liberté d’aller & de venir en sûreté.

Toutes les questions que l’on propose sur les sauf-conduits peuvent se décider, ou par la nature même des sauf-conduits accordés, ou par les regles générales de la bonne interprétation.

1°. Un sauf-conduit donné pour des gens de guerre regarde non-seulement des officiers subalternes, mais encore ceux qui commandent en chef, c’est l’usage naturel & ordinaire des termes qui le veut ainsi.

2°. Si l’on permet à quelqu’un d’aller dans un certain endroit, on est aussi censé lui avoir permis de s’en retourner, autrement la premiere permission se trouveroit souvent inutile ; il pourroit cependant y avoir des cas où l’un n’emporteroit pas l’autre.

3°. Si l’on a accordé à quelqu’un la liberté de venir, il ne peut pas pour l’ordinaire envoyer quelqu’autre à sa place ; & au contraire celui qui en a permission d’envoyer quelqu’un ne peut pas venir lui-même ; car ce sont deux choses différentes, & la permission doit naturellement être restrainte à la personne même à qui elle est accordée, car peut-être ne l’auroit-on pas accordée à une autre.

4°. Un pere à qui l’on a accordé un sauf-conduit, ne peut pas mener avec lui son fils, & un mari sa femme.

Pour les valets, quoi qu’il n’en soit fait aucune mention, on présume qu’il est permis d’en mener un ou deux, ou même davantage, selon la qualité de la personne.

6°. Dans le doute & pour l’ordinaire, le privilege d’un sauf-conduit ne s’éteint pas par la mort de celui qui l’a accordé ; rien n’empêche cependant qu’il ne puisse, pour de bonnes raisons, être révoqué par le successeur ; mais alors il faut que celui à qui le sauf-conduit avoit été donné soit averti de se retirer, & qu’on lui accorde le tems nécessaire pour parvenir en lieu de sûreté.

7°. Un sauf-conduit accordé pour aussi long tems qu’on voudra, emporte par lui-même une continuation du sauf-conduit, jusqu’à ce qu’on le révoque bien clairement ; car sans cela, la volonté est censée subsister toujours la même quelque tems qui se soit écoulé ; mais un tel sauf-conduit expire, si celui qui

l’avoit donné vient à n’être plus revêtu de l’emploi en vertu duquel il l’avoit donné. Voilà les principes du droit politique les plus communs sur cette matiere ; cet Ouvrage ne permet pas de plus grands détails (D. J.)

SAUGE, s. f. salvia, (Hist. nat. Bot.) genre de plante à fleur monopétale & labiée ; la levre supérieure est convexe dans quelques especes, & dans d’autres elle ressemble à une faucille. La levre inférieure est divisée en trois parties, relevée en bosse & non pas concave, comme dans l’ormin & la toute-bonne. Le pistil sort du calice, il est attaché comme un clou à la partie postérieure de la fleur, & entouré de quatre embryons qui deviennent dans la suite autant de semences arrondies & renfermées dans une capsule qui a servi de calice à la fleur. Ajoutez aux caracteres de ce genre que les étamines ressemblent en quelque sorte à un os hyoïde. Tournefort, inst. rei herb. Voyez Plante.

Sauge, (Botan.) selon Linnæus, la fleur de ce genre de plante est d’une seule feuille formée en tuyau large, applati par-dessus, & découpé par le haut en deux levres ; la levre supérieure est concave, recourbée, déchiquetée dans les bords ; la levre inférieure se partage en trois ; les étamines sont deux filets déliés, dont l’un est caché sous la levre supérieure de la fleur, & l’autre se termine par un corps obtus qui est probablement le nectarium ; le pistil a un germe fendu en quatre & un stile très-long ; il n’y a proprement aucun fruit dans ce genre de plante, & le calice de la fleur contient dans le fond quatre semences rondelettes.

Tournefort compte dix-huit especes de sauges ; nous décrirons ici la sauge ordinaire & la sauge pomifere de Candie.

La sauge ordinaire, salvia major, I. R. H. 180. a la racine dure, vivace, ligneuse, fibreuse. Elle pousse des tiges rameuses, d’un verd blanchâtre, ordinairement quarrées, revêtues de feuilles opposées, larges, obtuses, ridées, blanchâtres, ou purpurines, ou de différentes couleurs, épaisses, cotonneuses, crenelées sur les bords, spongieuses, attachées à des queues un peu longues, d’une odeur forte, pénétrante, agréable, d’un goût aromatique, amer, avec une âcreté qui échauffe la bouche.

Les fleurs naissent comme en épi aux sommets des rameaux, verticillées, formées en gueule ou en tuyau découpé par le haut en deux levres, avec deux étamines, dont la birfurcation représente assez l’os hyoïde ; ces fleurs sont peu odorantes, de couleur bleue, tirant sur le purpurin, rarement blanches, soutenues sur un calice ample, formé en cornet, découpé en cinq parties, & d’une odeur extraordinaire de térébenthine. Lorsque les fleurs sont passées, il leur succede quatre semences arrondies, noirâtres, renfermées dans une capsule qui vient du calice.

Cette plante se cultive dans les jardins où elle fleurit communément en Juin & Juillet ; ses sommités sont humectées d’une humeur glutineuse & aromatique ; toutes les especes de sauge aiment les terres argilleuses, & sont beaucoup employées dans les cuisines.

On tire aussi des fleurs de sauge dans les boutiques une huile distillée, qui, mêlée avec l’esprit-de-vin, est bonne pour frotter des parties, où la circulation du sang est trop foible. On emploie utilement toute la plante dans les fomentations aromatiques.

Une des plus belles especes de sauge est celle de l’île de Candie, salvia cretica, frutescens, pomifera, foliis longioribus incanis & crispis, I. R. H.

C’est un arbrisseau fort touffu, haut d’environ deux ou trois piés ; le tronc en est tortu, dur, cassant, épais de deux pouces, roussâtre, couverte d’une écorce grise, gersée, divisée en rameaux, dont les jets sont