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Le cuivre se dissout dans trois fois son poids d’huile de tartre par défaillance, & forme une liqueur verte, dont il nous paroît très-possible de crystalliser le sel. Les alkalis fixes en s’unissant avec l’arsenic forment des sels neutres, qui se crystallisent en prismes quadrangulaires, dont les extrémités se terminent par des pyramides à quatre faces.

On nous objecteroit vainement que l’alkali fixe vitrifie, décompose les métaux ; l’objection tomberoit par cette seule raison, que le feu enleve le phlogistique du métal.

Genre IX. sels neutres formés par l’union de l’alkali volatil avec les terres & les métaux. Nous avons formé un sel d’un très-beau verd avec l’alkali volatil & le cuivre ; ce sel s’éleva en lames ou feuillets contre les parois du gobelet de verre, dans lequel il se crystallisoit à l’air libre par une évaporation insensible ; il descendit ensuite en-dehors & se répandit, ensorte que l’intérieur & l’extérieur du verre en étoient incrustés. Ce sel est absolument ignoré. Cependant on connoissoit la dissolution de cuivre dans l’alkali volatil. Boerhaave lui attribue des vertus diurétiques extraordinaires, prises depuis trois jusqu’à vingt-quatre gouttes dans un verre d’hydromel. Cette teinture présente un phénomene singulier, c’est que sans le contact de l’air, le cuivre est dissous sans donner de couleur. Si on débouche le flacon, bientôt la liqueur deviendra d’un bleu violet admirable. Le fer & l’alkali volatil fournissent un sel semblable en plusieurs points, à celui qui est formé par le cuivre.

L’alkali volatil en précipitant l’or de l’eau régale, fait comme le fixe, il le dissout de nouveau, s’il est surabondant. Il se conduit de même avec le mercure.

Ordre II. sels neutres composés. Trois substances, une acide, l’autre alkaline, & la troisieme métallique ou terreuse, réunies en un tout chimiquement homogene, forment les sels que nous appellons composés. Leur nombre peut, sans contredit, être très grand, quoiqu’à la suite on tomberoit dans des détails qui ne seroient que des variétés, toujours cependant intéressantes. Nous en avons réduit le nombre à neuf, pour qu’on ne nous accuse pas de donner des chimeres pour des possibilités.

Genre I. sels tartareux. Nous avons vu que la crême de tartre étoit un sel neutre formé par l’alkali & l’acide végetaux, avec surabondance de ce dernier ; qu’elle étoit un menstrue qui avoit quelquefois la préférence sur de plus simples : c’est ici que les sels qu’elle forme doivent trouver leur place. Elle dissout en effet le fer & le crystallise avec lui, pour former le tartre martial soluble. Elle compose avec l’étain & le plomb les tartres que nous nommerons jovial & saturnien ; avec l’antimoine elle fait un médicament de plus grand usage, le tartre stibié. Le tartre uni au cuivre, aux alkalis fixes & volatils, & aux terres absorbantes, forme également des sels neutres crystallisables.

Genre II. sels ammoniacaux. Le sel ammoniac ordinaire composé de l’alkali, & d’un des acides les plus volatils, ne pouvoit manquer de l’être beaucoup lui-même ; & comme par son acide ou son alkali, il a de l’affinité avec les différentes terres ou métaux, nous croyons qu’il n’en est aucun que ce sel ammoniac ou les quatre autres ne puissent sublimer ou dissoudre. Il y a une partie de l’alkali volatil qui se dégage dans le tems de l’union & de la sublimation. Cet alkali se manifeste par l’odeur qui lui est propre, & qu’on ne manque jamais d’appercevoir dans le commencement de la sublimation.

On ne connoît que deux sels formés par le sel ammoniac ordinaire, & un métal ou une terre ; parmi le grand nombre de possibles. Le premier est l’ens veneris, produit de la sublimation du cuivre par le sel

ammoniac, qu’on peut aussi obtenir par le procédé de Boerhaave, en faisant dissoudre le cuivre dans une lessive de sel ammoniac. Le second est les fleurs martiales, fruit de la sublimation de fer par le même sel. Le premier est un médicament très-dangereux, vanté cependant contre l’épilepsie par Boyle son inventeur : mais le second est un des meilleurs apéritifs qu’on ait en médecine.

Genres III. IV. V. VI. autres sels ammoniacaux. On pourroit essayer une multitude de sels composés avec le sel secret de Glauber, & les terres ou les métaux : ils sont tous inconnus si on excepte le sel de Weissman, qui se prépare en faisant précipiter & rédissoudre le vitriol bleu dissous dans l’eau, par l’alkali volatil versé en surabondance, & le faisant crystalliser par le moyen de l’esprit-de-vin. Il faut aussi excepter l’or volatilisé par le sel secret de Glauber. Les sels ammoniacaux nitreux, que nous nommons sels brûlans, sont encore plus ignorés ; cependant ayant versé l’alkali volatil avec surabondance sur une dissolution de mercure dans l’acide nitreux, nous avons vu une pellicule se former sur la surface de la liqueur, & par l’évaporation insensible des crystaux en aiguilles rester au fond du vase ; qui étoient surement le produit de la combinaison de l’acide nitreux, de l’alkali volatil, & du mercure. C’est encore à notre avis un nouveau moyen innocent de faire prendre intérieurement ce demi-métal. Tous les sels ammoniacaux acéteux sont à découvrir. Quant à ceux que nous appellons royaux, on pourroit nous reprocher de fonder une possibilité sur une autre, mais celle qui sert de base étant de la plus grande évidence, nous nous y sommes crus autorisés. Le sel ammoniac qui doit résulter inévitablement de l’union de l’alkali volatil & de l’eau régale nous paroît devoir sublimer l’or. Ce sont là des choses qu’on croit voir arriver lorsqu’on les propose.

Genres VII. VIII. IX. sels fixes. Le borax est composé du sel sédatif & de l’alkali marin. Le sel sédatif l’est, suivant l’opinion la plus reçue, de l’acide vitriolique & d’une terre vitrescible. Ces trois substances forment un sel neutre composé, sur lequel on a beaucoup travaillé, qui est d’un grand usage dans la docimastique & l’orfévrerie, qui facilite la fusion des métaux. Il fait la premiere espece du premier genre, les autres especes sont inconnues & peut-être impossibles. Les deux genres suivans sont encore remplis par des êtres inconnus. Si on mêle l’alkali minéral au sel sédatif, on aura un nouveau borax, si c’est l’alkali tartareux ; la même chose arrivera inévitablement suivant nous. Cependant nous ne voyons pas qu’on ait essayé de les faire, non plus qu’une multitude d’autres que nous croyons voir dans le lointain d’une perspective agréable.

Nous finirons cet article en donnant une table des sels, d’après le système naturel déja exposé.


TABLE DES SELS.


Classe I. Acides.
Ordre I. Acides simples.
Genre 1. Acide vitriolique. Voyez Vitriol.
2. Acide nitreux. Voyez Nitre.
3. Acide marin. Voyez Sel marin.
4. Acide végétal. Voyez Végétal, acide.
Ordre II. Acides composés.
Genre 1. Eau régale. Voyez Régale, eau.
Acide animal.
Acide microcosmique. Voyez Microcosmique, acide & phosphore.
Et peut-être plusieurs autres qui sont inconnus.