Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 15.djvu/260

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

s’appliqua sous Charles II. à connoître la nature, & à suivre la route que le chancelier Bacon avoit montrée. La science des mathématiques fut portée bientôt à un point que les Archimedes n’avoient pu même deviner. Un grand homme, un homme étonnant, découvrit les lois primitives de la constitution générale de l’univers ; & tandis que toutes les autres nations se repaissoient de fables, les Anglois trouverent les plus sublimes vérités. Les progrès furent rapides & immenses en 30 années : c’est-là un mérite, une gloire qui ne passeront jamais. Le fruit du génie & de l’étude reste ; & les effets de l’ambition & des passions s’anéantissent avec le tems qui les ont produits.

Enfin l’esprit de la nation angloise acquit, sous le regne de Charles II. une réputation immortelle, quoique le gouvernement n’en eût point. C’est du sein de cette nation savante que sont sorties les découvertes sur la lumiere, sur le principe de la gravitation, sur l’abberration des étoiles fixes, sur la géométrie transcendante, & cent autres inventions qui pourroient à cet égard, faire appeller le xvij. siecle, le siecle des Anglois, aussi-bien que celui de Louis XIV.

M. Colbert, jaloux de cette nouvelle gloire des Anglois, voulut que les François la partageassent ; & à la priere de quelque savans, il fit agréer au roi l’établissement d’une académie des Sciences. Elle fut libre jusques en 1699, comme celle d’Angleterre ; mais elle n’a pas conservé ce précieux avantage.

Au reste, le docteur Sprat, évêque de Rochester, a donné l’histoire détaillée de la société royale de Londres ; & comme cette histoire est traduite en françois, tout le monde peut la consulter. (D. J.)

Société royale des Sciences, c’est sous ce nom que Louis XIV. fonda en 1706, une académie à Montpellier. Les motifs qui l’engagerent à cet établissement, furent la célébrité de cette ville, sa situation, la température & la sérénité de l’air, qui mettent en état de faire plus facilement qu’en aucun autre endroit, des observations & des recherches utiles & curieuses ; le nombre des savans qui y accouroient de toutes parts, ou qui s’y formoient dans les différentes sciences, & sur-tout dans une des parties la plus importante de la Physique. Le roi pour exciter davantage l’émulation des membres qu’il y nomma, voulut que la société royale des Sciences demeurât toujours sous sa protection, de la même maniere que l’académie royale des Sciences ; qu’elle entretînt avec cette académie l’union la plus intime, comme ne faisant ensemble qu’un seul & même corps ; que ces deux académies s’envoyeroient réciproquement un exemplaire de tout ce qu’elles feroient imprimer en leur nom ; qu’elles se chargeroient aussi mutuellement d’examiner les matieres importantes ; que leurs membres eussent séance dans les assemblées de l’une & de l’autre ; que la société royale des Sciences enverra toutes les années une des pieces qui y seront lues dans ses assemblées, pour être imprimées dans le recueil des mémoires de l’académie royale des Sciences, &c. Voyez les lettres-patentes & statuts donnés au mois de Février 1706.

Cette société n’a rien oublié pour répondre dans tous les tems aux vûes & aux bontés de S. M. toutes les sciences y ont été cultivées avec beaucoup de zele & de succès ; & quoique la Médecine soit la science favorite de cette ville qui a été son berceau & son premier asyle en France, & quoiqu’on s’y applique avec un soin particulier aux objets qui y sont relatifs, il ne laisse pas d’y avoir des personnes très-distinguées dans les autres parties de la Physique & les Mathématiques. On pourroit en voir la preuve dans plusieurs articles de ce Dictionnaire.

SOCINIENS, s. m. pl. (Hist. ecclés.) Voyez Unitaires.

SOCLE, s. m. (Archit.) corps quarré plus bas que sa largeur, qui se met sous les bases des piédestaux, des statues, des vases, &c. Ce mot vient du latin soccus, sandale, à cause que ce corps sert à élever le pié des bâtimens, com ne sur des patins ou sandales. Les Italiens appellent le socle soccolo, qui veut dire patin. (D. J.)

SOCO, s. m. (Ornith.) oiseau du Brésil du genre des hérons, mais remarquable en particulier par la longueur de son col ; il est plus petit que le héron ordinaire, a le bec droit, pointu, la queue courte, la tête & le col bruns, avec des taches noires ; ses aîles ont un mélange blanc dans leur moucheture. Marggrave, hist. Brasil. (D. J.)

SOCONUSCO, (Géog. mod.) province de l’Amérique septentrionale dans la nouvelle Espagne. Elle est bornée au nord par la province de Chiapa, au midi par la mer du sud, au levant par la province de Guatimala, & au couchant par la province de Guaxaca. De Laët lui donne environ 35 lieues de long, & presque autant de large. On n’y trouve d’autres places que Soconusco, qui n’est habitée que par un petit nombre d’espagnols. (D. J.)

SOCOTERA ou SOCOTORA, (Géog. mod.) île située entre l’Arabie-heureuse & l’Afrique, au midi du cap Fartac, & au nord du cap Gardafui, environ à 20 lieues de ces deux continens. On donne à cette île une quarantaine de lieues de tour ; elle a un roi particulier, qui releve d’un chérif d’Arabie. Son produit consiste en bétail, en riz & en fruits ; on en tire aussi des dattes, de l’encens & de l’aloës ; sa capitale se nomme Tamara, Tamarin ou Tamarette. Latit. 13. (D. J.)

SOCOTH-BÉNOTH, (Critique sacrée.) idole des Babyloniens, dont il est fait mention au IV. liv. des rois, chap. xvij. 30. Elle fut apportée dans la Palestine par les Babyloniens transférés en Samarie. Ce mot socoth-bénoth signifie le tabernacle des filles ; & la plûpart des meilleurs critiques ont adopté l’opinion de Selden, que c’est le nom du temple dédié à la Vénus de Babylone, où les filles s’assembloient pour se prostituer en l’honneur de cette déesse ; nous apprenons ces particularités d’Hérodote.

Il y a, dit cet ancien historien, chez les Babyloniens, comme dans l’île de Chypre, une coutume honteuse, c’est que toutes leurs femmes sont obligées une fois dans leur vie de venir au temple de Vénus, & d’y accorder leurs faveurs à quelqu’un des étrangers qui s’y rendent de leur côté pour en jouir. Il arrive seulement que les femmes qui ne veulent pas se prostituer, se tiennent près du temple de la déesse dans leurs propres chars sous des lieux voûtés, avec leurs domestiques près d’elles ; mais la plûpart, magnifiquement parées & couronnées de fleurs, se reposent ou se promenent dans le palais de Vénus, attendant avec impatience que quelque étranger leur adresse ses vœux.

Ces étrangers se trouvent en foule dans différentes allées du temple, distinguées chacune par des cordeaux ; ils voyent à leur gré l’assemblée de toutes les Babyloniennes, & chacun peut prendre celle qui lui plaît davantage. Alors il lui donne une ou plusieurs pieces d’argent, en disant, « j’invoque pour toi la déesse Mylitta », c’est le nom de Vénus chez les Assyriens. Il n’est ni permis à la femme de dédaigner l’argent qui lui est offert, quelque petite que soit la somme, parce qu’elle est destinée à un usage sacré, ni de refuser l’étranger qui dans ce moment lui donne la main, & l’emmene hors du sanctuaire de la déesse ; après avoir couché avec lui, elle a fait tout ce qu’il falloit pour se rendre Vénus favorable, & elle revient chez elle, où elle garde ensuite religieusement les regles de la chasteté.