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mourut dans le monastore qu’il fit bâtir à Squillaci, à l’âge d’environ quatre-vingt-treize ans, vers l’an 562 de J. C.

Nous lui devons une peinture riante de la situation de Squillaci sur la mer Adriatique, qu’on appelle aujourd’hui mer de Sicile de ce côté-là, & qui fait en cet endroit un golfe, qu’on nomme aujourd’hui golfe de Squillaci. « Cette ville, dit-il, s’éloigne du rivage en s’élevant doucement, environnée d’un côté de fertiles campagnes, & de l’autre baignée de la mer ; l’aurore du soleil est pour elle, & jamais nuage ni brouillard ne lui en dérobent la lumiere ; l’air en est pur, & les saisons y sont toujours tempérées. Son territoire offre des campagnes couvertes d’oliviers, des aires pleines de riches moissons, & des vignes qui promettent une abondante vendange. »

Cette description, qui a quelque chose d’étudié, marque du moins l’inclination naturelle que cet homme illustre avoit conservée pour sa patrie. Il en donna de bonnes preuves par les travaux qu’il entreprit pour l’utilité de cette ville, lorsqu’il étoit gouverneur de l’Abruzze & de la Lucanie, qu’on comprend aujourd’hui sous le nom de Calabre. Il fit creuser de vastes réservoirs dans la concavité d’un rocher, pour y attirer des poissons de toute espece, & c’est dans ce même lieu qu’il bâtit depuis son monastere.

« La situation de ce monastere, écrivit-il à ses moines, nous invite à préparer toutes sortes de soulagemens pour les étrangers, & pour les pauvres du pays. Vous avez des jardins arrosés de plusieurs canaux, & le voisinage du fleuve Pellène, qui est fort poissonneux, & qui a cela de commode, que vous ne devez pas craindre d’inondation de l’abondance de ses eaux, quoiqu’il en ait assez pour n’être pas à mépriser. On le trouve à propos lorsqu’on en a besoin, & dès qu’il a rendu le service qu’on en attendoit, on le voit se retirer. Il est, pour ainsi dire, dévoué à tous les ministeres de votre maison, prêt à rafraîchir vos prairies, à arroser vos jardins, & à faire tourner vos moulins. Vous avez aussi la mer au bas du monastere, & vous pouvez y pêcher commodément. Vous avez encore de grands réservoirs où le poisson se rend de lui-même. Je les ai fait creuser dans la concavité de la montagne, de sorte que le poisson qu’on y met, ayant la liberté de s’y promener, de s’y nourrir, & de se cacher dans le creux des rochers, comme auparavant, ne sent point qu’il est captif, &c. » Pline le jeune n’a pas jetté plus de fleurs que Cassiodore dans les peintures agréables de ses maisons de plaisance. (Le Chevalier de Jaucourt.)

Squillaci, golfe de, (Géog. mod.) on appelle golfe de Squillaci une partie de la mer Ionienne, sur la côte de la Calabre ultérieure, entre le cap de Rizzuto, & celui de Stilo, qui le sépare du golfe de Girace. (D. J.)

SQUILLE, s. f. (Hist. nat.) CHEVRETTE, SOLICOQUE, CREVETTE, squilla ; crustacée dont il y a plusieurs especes qui different principalement par la grandeur & par les couleurs. Les squilles de mer sont beaucoup plus grandes que celles d’eau douce ; celles-ci ont le corps couvert d’une soie très mince, jaune ou blanchâtre, & transparente. Elles naissent dans les ruisseaux dont les eaux sont claires, & elles se retirent sous les racines des roseaux & des glayeux, ou sous les pierres. Les squilles de mer ont la chair tendre, délicate & de bon goût. Dict. univ. des drogues simples par M. Lemery. Voyez Crustacée.

Squille, (Botan.) voyez Scille.

Squille aquatique, (Insectolog.) M. Derham dit que les squilles aquatiques étant du nombre des insectes les plus rapaces, elles ont aussi des organes

proportionnés à leur état, en particulier la grande squille aquatique recourbée a quelque chose de hideux dans la posture qu’elle tient dans l’eau, dans son aspect, sur-tout dans la structure de sa bouche, qui paroît armée de longs crochets aigus, avec lesquels elle saisit goulument & hardiment tout ce qu’elle rencontre, même jusqu’aux doigts des hommes. Lorsqu’elle tient sa proie, elle la serre si fortement avec ses pinces, qu’elle ne lâche point prise, après même qu’on l’a tirée de l’eau, & lorsqu’on la roule dans la main. Quand ces insectes ont attrapé quelque chose de succulent pour leur nourriture, ou quelqu’autre petit insecte, ils percent avec leurs pinces creuses leur proie ; & à-travers les creux de ces pinces, ils en sucent tout le suc ou le sang. (D. J.)

SQUILONE, s. m. (Hist. nat. Ichthiolog.) c’est le nom que les Portugais ont donné à un poisson d’eau douce, qui a huit ou neuf pouces de longueur ; il est fort gras & d’un goût exquis. Il est remarquable par une espece de duvet qui lui vient autour de la bouche. Il se trouve abondament dans le royaume de Congo en Afrique.

SQUINE, s. f. (Hist. des drog. exot.) racine exotique nommée chinna, ceù cinna, par Cesalp. chinæa radix, par Cordus, hist. china & schima, par Tabern. C’est une racine qui tire son nom du pays de la Chine d’où elle a d’abord été portée dans les Indes orientales. Elle est bien différente par sa nature & par ses vertus de l’écorce appellée china china, qui vient du Pérou, & que nous nommons en françois quinquina. On trouve chez les droguistes deux especes de squine, l’une orientale, & l’autre occidentale.

La squine orientale, china orientalis off. est une grosse racine sans odeur, noueuse, genouillée, pesante, ligneuse, à tubercules inégaux, extérieurement d’un blanc rougeâtre, & intérieurement d’un blanc tirant sur le rouge ; quelquefois elle est un peu résineuse. Elle a dans sa fraîcheur un goût un peu âcre & pâteux ; mais lorsqu’elle est seche son goût est terreux & légerement astringent.

La meilleure est celle qui est récente, compacte, solide, pesante, qui n’est point cariée ni rongée par les teignes ; on veut qu’elle soit presque insipide, pleine cependant d’une espece d’humeur grasse & onctueuse ; ce que l’on connoît assez évidemment en la mâchant, mais encore plus lorsqu’on la fait bouillir. On rejette celle qui est trop vieille, qui n’a point de suc, qui est spongieuse, légere & cariée.

La plante est appellée smilax aspera chinensis, lampatam dicta, par Herman, smilax minus spinosa, fructu rubicundo, radice virtuosâ, par Kaempfer. Sa racine est grosse, dure, noueuse, inégale, un peu fibreuse, longue, rousse ou noirâtre en dehors, blanchâtre en dedans, d’un goût foible & presque insipide. Voilà ce que les médecins appellent racine de squine, également célebre par ses effets.

Elle s’éleve d’une ou de deux coudées lorsqu’elle n’est pas soutenue, mais étant appuyée sur les buissons voisins, elle monte plus haut. Ses sarmens sont ligneux, de la grosseur d’une paille d’orge, d’un rouge brun près de la terre, & noueux de deux pouces en deux pouces ; les parties comprises entre les nœuds sont alternativement courbées & un peu réfléchies, & chaque nœud a quelquefois deux petites épines crochues & opposées sur le même côté. De chaque nœud sort une feuille portée sur une queue creusée en gouttiere, membraneuse, repliée, d’où naissent deux mains ou vrilles, une de chaque côté, semblables à celles de la vigne, par lesquelles elle s’attache fortement à tout ce qui est autour.

De l’aisselle des queues de chaque feuille poussent des bouquets de fleurs ou des bourgeons ; quelquefois les vrilles sont à l’extrémité de la queue & touchent à la feuille qui est en forme de cœur, de trois