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par Hippocrate dans la peste, & couronnée par le succès ; de prendre des poudres & des infusions aromatiques, alexipharmaques, &c. & lorsqu’on en a heureusement réchappé, il faut bien se garder du froid qui ne manque pas d’occasionner un cours de ventre presque toujours mortel, comme le prouve la triste expérience de ceux qui étant guéris, s’y sont inconsidérément exposés. (m)

Sueur, s. m. (Corroyerie.) ouvrier qui autrefois travailloit les cuirs au sortir de la main du tanneur. C’étoit celui qui les mettoit en suin ou en graisse, qu’on nomme alors souin ; les Sueurs, comme on le voit dans les anciens statuts des Corroyeurs, faisoient une communauté particuliere, qui, aussi bien que celle des Baudroyeurs & des Cordonniers, a été réunie à la communauté des Corroyeurs. Savary. (D. J.)

SUEVUS ou SUEBUS, (Géog. anc.) fleuve de la Germanie, selon Ptolomée, l. II. c. x. Spener, notit. Germ. ant. l. II. c. ij. veut que ce soit une des embouchures de l’Oder : savoir celle du milieu, appellée Suine ou Sueve, & qui approche plus du nom des Sueves qui ont anciennement habité dans ces quartiers. (D. J.)

SUEZ, (Géog. mod.) petite ville d’Egypte, sur la côte septentrionale de la mer Rouge, à vingt lieues au nord de Tor, avec un vieux château ruiné, & un petit port à trois journées du chemin du Caire.

Les anciens appelloient Suez la ville des héros, Héréopolis ; peut-être ne s’acquit-elle un si beau nom qu’à cause de son commerce. Elle est cependant située dans un terrein fort stérile jusqu’à cinquante milles tout-autour ; elle manque d’eau, & son port qui a peu de fond, n’est qu’une vraie rade dangereuse : les soudans d’Egypte, & après eux les Turcs, ne l’ont point réparé ; & d’ailleurs dans le tems même qu’ils y travailloient pour s’opposer aux progrès que faisoient les Portugais, il falloit qu’alors même les chameaux portassent tous les matériaux, depuis le Caire jusqu’à Suez. (D. J.)

Suez, le golphe de, (Géog. mod.) anciennement Heroopolites sinus ; c’est la partie la plus septentrionale de la mer Rouge, & l’endroit où vraissemblablement les Israëlites la passerent à pié sec ; ce golphe n’est séparé de la mer Méditerranée que par un isthme d’environ cinquante milles, qui joint l’Asie à l’Afrique, & qu’on appelle l’isthme de Suez ; nous en allons faire l’article. (D. J.)

Suez, isthme de, (Géog. mod.) isthme qui joint l’Asie à l’Afrique. Cet isthme peut avoir cinquante milles d’étendue, quoique Plutarque ne lui en donne que trente-sept, jusqu’à l’endroit où l’on s’embarque sur le Nil. Les rois d’Egypte considérant les grands avantages qui reviendroient à leur pays par la communication des mers, tenterent souvent de couper cet isthme, & de faire par ce moyen une île de toute l’Afrique. Sésostris, au rapport de Strabon, fut le premier qui forma ce dessein, & qui fit son possible pour l’exécuter. Darius, roi de Perse & d’Egypte, tenta la même entreprise, & conduisit son ouvrage jusqu’aux lacs Amers, nommés de la sorte à cause de l’amertume de leurs eaux. Le premier Ptolomée parmi les successeurs d’Alexandre, se proposa d’achever l’ouvrage, & l’abandonna cependant bientôt après. Les uns disent que ce fut par crainte d’inonder l’Egypte, qui est plus basse de trois coudées que la mer Rouge. D’autres assurent que ce fut de peur que la mer en entrant dans le Nil, ne gâtât par son amertume les eaux de ce fleuve, & que pour comble de maux tout son pays ne devînt stérile, d’abord que ses campagnes se trouveroient arrosées des eaux de la mer.

Quoi qu’il en soit, on se contenta de creuser un canal qui joignoit le Nil à la mer Rouge. Ce fut alors

que les ports de cette mer commencerent à être fameux. La ville de Coptos devint l’entrepôt de toutes les marchandises qui passoient des Indes en Egypte. Depuis que l’on a laissé détruire le canal qui communiquoit le Nil avec la mer Rouge, on est obligé d’employer les chameaux pour transporter par terre les marchandises.

Cléopatre, après la perte de la bataille d’Actium, vint à Alexandrie, où se rendit Antoine, qui la trouva toute occupée d’un dessein fort extraordinaire. Pour éviter de tomber entre les mains d’Octave, présumant bien qu’il la poursuivroit, elle songeoit à faire transporter ses vaisseaux de la mer Méditerranée dans la mer Rouge par l’isthme qui a cinquante à soixante milles de largeur de Pharma à Suez. Elle projettoit ensuite de mettre ses trésors dans ses vaisseaux & dans les autres qu’elle avoit déja sur cette mer, pour aller chercher quelque retraite écartée ; mais elle abandonna ce dessein, dans l’espoir peut-être de faire encore la conquête de ce nouveau maître du monde. (D. J.)

SUEZIC, (Géog. mod.) par les Orientaux Sueriah, province voisine de la Colchide, dont les peuples nommés anciennement Tzani & Lazi habitoient la plus grande partie. (D. J.)

SUFFEGMAR, (Géog. mod.) riviere d’Afrique, dans la Barbarie, au royaume d’Alger ; elle prend sa source aux montagnes qui bornent le grand Atlas, & se jette dans la mer, au levant de Gigeri. C’est l’Ampsaga des anciens, ou l’Ampsagas de Ptolomée. (D. J.)

SUFFETES, s. m. pl. (Hist. anc.) c’est ainsi que l’on nommoit chez les Carthaginois les deux principaux magistrats de la république qui étoient élus parmi les sénateurs les plus distingués par la naissance, par la richesse & par les talens. Leur autorité ne duroit que pendant une année, comme celle des consuls romains ; mais il ne paroit pas que les suffetes fussent chargés du commandement des armées pendant leur magistrature ; pour l’ordinaire leurs fonctions étoient purement civiles ; cependant nous voyons qu’Annibal, Himilcon & Magon ont commande les armées des Carthaginois dans le tems même qu’ils étoient revêtus de la dignité de suffetes ; ils convoquoient le sénat auquel ils présidoient ; ils y proposoient les matieres sur lesquelles on devoit délibérer ; ils recueilloient les suffrages. Quelques auteurs croient qu’ils avoient le droit de vie & de mort, & d’infliger les punitions qu’ils jugeoient à-propos.

Aucune loi ne pouvoit passer dans le sénat sans leur concours ; lorsqu’ils n’étoient point d’accord avec le sénat, le peuple décidoit. Chaque ville de la domination carthaginoise avoit des suffetes, à l’exemple de la capitale.

SUFFIBULUM, s. m. (Littérat.) ce mot, dans Festus, signifie le voile blanc que les vestales mettoient sur leurs têtes lors des sacrifices, & qui étoit attaché avec une agraffe. (D. J.)

SUFFISANT, SUFFISANCE, (Lang. franç.) lorsque suffisant est participe, il signifie seulement qui suffit, comme un ordinaire suffisant, des provisions suffisantes ; mais lorsqu’il est adjectif, il désigne un présomptueux ; « rien de plus insupportable dans la vie que ces hommes suffisans, ces femmes suffisantes, qui décident de tout sans rien savoir. » Ce mot ne se prend en bonne part que quand il est joint à un autre qui en détermine la signification. Il ne faudroit donner les premieres places de l’état qu’à des gens suffisans, & capables de remplir les grandes charges de la couronne.

L’on doit faire la même remarque du mot suffisance ; il se dit du vrai mérite & du faux mérite. Les riches gâtés par la fortune montrent ordinairement une suffisance orgueilleuse ; mais l’adversité jointe au génie produit la grande capacité & la suffisance modeste.