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Ce droit de suite n’a été établi par aucune loi précise ; il paroît tirer son origine de ce qu’anciennement le scel du châtelet étoit unique & universel pour tout le royaume ; on s’en servoit même, au défaut du grand, pour sceller les actes de chancellerie.

Ce scel étant exécutoire dans toute l’étendue du royaume, il est naturel que les officiers du châtelet ayant commencé à instrumenter en vertu de ce sceau, continuent de le mettre à exécution dans tous les lieux où il y a occasion de le faire.

Ce droit de suite résulte d’ailleurs de l’indivisibilité de la matiere, & l’on argumente pour cela du titre du code ubi de hæreditate agatur, & des interprétations que les docteurs lui ont donné, tantôt en fixant la compétence du juge par le lieu où se trouvent les choses héréditaires ou la plus grande partie, par le lieu du domicile du défunt, ce qui doit sur-tout avoir lieu en France, où les meubles suivent le domicile du défunt pour la maniere d’y succéder.

Quoi qu’il en soit des motifs qui ont pu faire introduire cet usage, il est certain qu’il a été autorisé par plusieurs réglemens ; il l’est implicitement par un édit du mois de Décembre 1477, qui donne pour motif d’une nouvelle création de commissaires examinateurs, que le roi avoit recouvré par ses conquêtes plusieurs duchés, comtés, villes, châteaux, seigneuries & possessions, ce qui donnoit, est-il dit, beaucoup plus d’étendue à la jurisdiction du châtelet, tant à cause des privileges de l’université qu’autrement ; motif qui supposent que les commissaires peuvent apposer le scellé dans tout le royaume par droit de suite.

Ce même droit a été autorisé par divers arrêts.

On peut néanmoins voir ce que dit à ce sujet l’auteur du recueil des réglemens sur les scellés & inventaires, liv. II. ch. ix. lequel prétend que ce droit de suite n’est point particulier aux offices du châtelet, qu’il ne résulte que de l’indivisibilité du scellé & de l’inventaire ; il prétend même que divers arrêts qu’il rapporte ont mis des bornes à ce privilege, mais il est certain que les officiers du châtelet ont pour eux la possession. Voyez le traité de la police par de la Mare, tom. I. liv. I. tit. 12. le style du châtelet.

Quelques autres officiers jouissent aussi du droit de suite pour les scellés, comme Messieurs de la chambre des comptes sur les biens des comptables, en quelque endroit du royaume que ces biens soient situés ; mais c’est moins en vertu d’un privilege attaché à leur sceau, qu’en conséquence de leur jurisdiction, qui s’étend par-tout sur les biens des personnes qui sont leurs justiciables. Voyez Attribution, Compétence, Privilege. (A)

Suite, (Art numismat.) les antiquaires appellent suite, l’arrangement qu’ils donnent à leurs médailles, de grand, moyen & petit bronze, comme nous l’avons expliqué au mot médaille. Voyez Médaille.

Mais la méthode la plus ordinaire est de former les suites par le côté de la médaille qu’on nomme la tête, & c’est de cette distribution dont nous allons entretenir ici les curieux.

Il y a dans les médailles parfaites deux côtés à considerer, qui contribuent à leur beauté & à leur rareté ; le côté qu’on appelle la tête, & celui qu’on appelle le revers. Le côté de la tête détermine les suites, & fixe l’ordre & l’arrangement de chacune, soit qu’effectivement l’on y voie la tête d’un personnage, comme d’un dieu, d’un roi, d’un héros, d’un savant, d’un athlete, soit qu’il s’y rencontre autre chose qui tienne lieu de la tête, & qu’on ne laisse pas cependant de nommer ainsi, comme une figure, un nom, ou quelque monument public, dont l’inscription est mise de l’autre côté.

De ces différentes têtes dont nous parlons, se forment cinq ordres différens de médailles, dont on peut composer des suites fort curieuses. Dans le premier on met la suite des rois. Dans le second celle des villes, soit greques, soit latines ; soit avant, soit après la fondation de l’empire romain. Dans le troisieme se rangent les familles romaines, dont les médailles se nomment aussi consulaires. Dans le quatrieme, les impériales, & toutes celles qui y ont rapport. Dans le cinquieme, les déités, soit qu’elles se trouvent sur les médailles en simple buste, soit qu’elles y soient tout de leur haut, & revêtues de leurs qualités, & de leurs symboles. On y voit les héros & les hommes illustres dont on a conservé les médailles, comme Homere, Pythagore, & certains capitaines grecs & latins, &c.

Dans le premier ordre, qui est celui des rois, les suites peuvent être fort belles, & même très-nombreuses, si l’on veut mêler les métaux, car il nous reste beaucoup de médailles greques de ce genre. M. Vaillant nous a donné les rois de Syrie, dont il a formé une histoire pleine de savantes remarques. Le titre de son livre est Seleucidarum imperium, sive historia regum Syriæ ad fidem numismatum accomodata, Paris, 1601, in-4°. Il a ramassé dans cet ouvrage la suite complette des rois de Syrie depuis Séleucus I. dit Nicator, jusqu’à Antiochus XIII. du nom appellé Epiphanes, Philopator, Callinicus, & connu par la qualité d’asiatique, ou comagene ; c’est-à-dire, que M. Vaillant a renfermé dans son histoire numismatique le regne de 27 rois, qui fait l’espace de plus de 250 ans ; puisque Séleucus commença de regner environ l’an 312 avant J. C. & que le dernier Antiochus finit environ l’an 75. On trouve dans cet ouvrage une suite de 120 médailles, gravées & expliquées avec beaucoup de netteté.

Le même auteur nous a donné les rois d’Egypte, dont il a fait un recueil très-curieux, intitulé historia Ptolemæorum Ægypti regum ad sidem numismatum accommodata. Amst. 1701, in-fol. Près de 20 ans après la mort de ce savant antiquaire, on a publié en deux volumes de sa main, & achevé avant sa mort, l’ouvrage qui regarde les médailles & l’histoire des rois parthes, des rois du Pont, du Bosphore & de Bithynie. Le premier volume est intitulé, Arsacidarum imperium sive regum Parthorum historia ad finem numismatum accommodata ; & le second : Achæmenidarum imperium, sive regnum Ponti, Bosphori & Bithyniæ historia, ad fidem numismatum accommodata. Paris, 1425, in-4°. Il seroit à souhaiter que quelqu’un nous donnât de même l’histoire des rois de Macédoine, de Thrace, de Cappadoce, de Paphlagonie, d’Arménie, de Numidie, par les médailles ; nous avons celle des rois de l’Osrhoesne, & de la Bactriane, par M. Bayer.

Il se voit des rois goths, dont les médailles ont passé jusqu’à nous, soit en bronze, soit en argent. Quelques-unes ne sont pas méprisables. Telles sont celles d’Athalaric, de Wiiigez, de Baduela, & de Thela. On en trouve même d’or, mais d’un or très-pâle & très-bas, où M. Patin dit qu’il n’y a que la quatrieme partie de fin. On ne peut point former de suites de pareilles médailles.

Dans le deuxieme ordre, qui est celui des villes, on trouve de quoi faire des suites considérables ; des seules villes greques, l’on peut en ramasser plus de 250 ; j’entends à n’en prendre qu’une de chaque ville : car les différens revers conduiroient beaucoup plus loin.

Goltzius paroît y avoir travaillé avec beaucoup d’application, parce qu’il regardoit ces monumens non-seulement comme un embellissement, mais encore comme des preuves de son histoire. Il en a composé un gros ouvrage où il y a beaucoup à appren-