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dessus les nombres 1001, 1002, 1003, &c. qui marquent les dégrés de condensation ou de raréfaction de la liqueur.

Il est absolument nécessaire de se servir du même esprit-de-vin pour avoir des thermometres qui soient comparables étant construits sur ces principes ; & comme il s’en trouve qui ont différens degrés de dilatabilité, M. de Réaumur a choisi celui dont le volume étant 1000 à la congélation, devient 1080 par la chaleur de l’eau bouillante. Voyez les mém. de l’ac. royale des Sciences, ann. 1730, p. 645. hist. p. 15. item 1731. p. 354. hist. p. 7.

Malgré toutes ces précautions, M. Musschenbroeck pense que le thermometre de M. de Réaumur est encore sujet à plusieurs des défauts du thermometre de Florence, savoir que l’esprit-de-vin perd à la longue sa vertu expansive ; que le verre se dilate aussi-bien que la liqueur, qu’en général les thermometres à esprit-de-vin ne peuvent servir que pour mesurer de petits degrés de chaleur ; car aussi-tôt que la liqueur commence à bouillir, ils ne peuvent plus marquer. Or l’esprit-de-vin rectifié bout un peu plutôt que l’eau, de sorte que l’on ne peut découvrir à l’aide de ce thermometre quel est le degré de chaleur de l’eau qui bout, & encore moins celui d’une plus grande chaleur, comme celle de l’huile bouillante, du savon bouillant, du mercure qui bout, &c. enfin ils ne peuvent marquer quelle peut être la chaleur des métaux fondus. Voilà les objections de M. Musschenbroeck contre ce thermometre, que nous nous contentons simplement de rapporter, sans nous en rendre garans, & sans prétendre rien ôter à M. de Réaumur de l’utilité de sa découverte.

Plusieurs auteurs ont proposé diverses méthodes pour trouver un point fixe ou un degré de froid & de chaud, afin de régler sur ce degré les autres degrés, & de pouvoir comparer les observations faites dans les mêmes tems, ou dans des tems différens, & en différens endroits.

Quelques-uns marquent l’endroit où se trouve la liqueur dans l’hiver quand l’eau commence à se geler, comme aussi dans l’été quand le beurre mis auprès de la boule du thermometre commence à se fondre ; ils divisent l’espace intermédiaire en deux parties égales, dont le point du milieu, suivant leur façon de compter, répond à la chaleur tempérée ; & ils subdivisent chaque moitié en dix degrés, ajoutant encore quatre autres degrés égaux à chacune des deux extrémités. Mais cette méthode suppose que le même degré de chaud & de froid répond à la congélation de toutes sortes d’eaux & à la fonte de toutes sortes de beurres ; comme aussi que toutes sortes de thermometres reçoivent les mêmes impressions du même degré de chaleur, quoique toutes ces suppositions soient contraires à l’expérience.

D’autres proposent de mettre la boule du thermometre dans une certaine quantité de neige & de sel, & de marquer le point où s’arrête la liqueur ; ensuite on descend le thermometre dans une cave profonde où l’air extérieur ne sauroit pénétrer ; de sorte que la liqueur recevant l’impression d’un air tempéré, puisse marquer le degré de la chaleur tempérée. Enfin on divise l’espace intermédiaire en quinze ou plusieurs parties égales, ce que l’on continue de faire au-delà de chaque extrémité : mais cette méthode est sujette aux mêmes inconvéniens que la précédente.

Le docteur Halley prend pour un degré fixe de chaleur celui où l’esprit-de-vin commence à bouillir ; mais il y a lieu de soupçonner que cet expédient n’a pas plus de justesse que les autres, quoique M. Amontons s’arrête comme lui au degré de chaleur qui répond à l’eau bouillante pour faire l’échelle de son thermometre de mercure ; mais comme les différentes gravités spécifiques des eaux marquent une différence

dans leur masse & dans leur texture, il est très-probable que la chaleur de toutes sortes d’eaux bouillantes n’est pas la même, de sorte que le point fixe reste encore indéterminé.

M. Musschenbroeck paroît préférer à tous les autres thermometres ceux qui sont faits avec du mercure, qui, selon lui, a beaucoup d’avantages sur l’esprit-de-vin ; car on peut l’avoir pur, il reste toujours le même quoiqu’on l’ait gardé pendant plusieurs années, & il se raréfie toujours également quelque vieux qu’il soit. M. Musschenbroeck prétend que le principal défaut de ces thermometres est celui de la dilatation & de la condensation du verre qu’on ne sauroit empêcher. Il propose cependant différens expédiens pour remédier à ce défaut ; on en peut voir le détail dans le chapitre du feu de son essai de physique. Cependant il n’ose assurer que ce thermometre ait encore toute la perfection que l’on peut desirer. Mais il le croit supérieur à tous les autres. Les thermometres de mercure les plus en usage aujourd’hui sont celui de Farenheit & celui de M. de Lisle. Ces thermometres different du thermometre de Florence, 1°. en ce qu’on s’y sert de mercure bien purgé d’air, au-lieu d’esprit-devin ; 2°. en ce que le tuyau de verre est capillaire & fort étroit, & se termine non par une boule, mais par une bouteille cylindrique, d’une capacité proportionnée au diametre du tuyau, 3°. en ce que les divisions y sont beaucoup plus exactes, sur-tout dans le thermometre de M. de Lisle ; car on ne marque point ces divisions par des parties égales sur la longueur du tuyau, attendu les inégalités intérieures qui peuvent être au-dedans ; mais on verse successivement dans le tuyau une petite quantité de mercure qui est toujours la même, & qui occupe plus ou moins d’espace en longueur dans le tuyau, selon que le tuyau est moins ou plus large en-dedans ; c’est par ce moyen qu’on parvient à graduer les thermometres. Ceux qui desireront un plus grand détail sur ce sujet, peuvent consulter l’essai de Physique de Musschenbroeck, les miscellanea Berolinensia, tom. IV. p. 343. & l’appendice qui est à la fin des leçons de physique de M. Cottes, traduites en françois, & imprimées à Paris en 1742. (O)

On a encore donné depuis quelques années le nom de thermometre à une machine composée de deux métaux, qui en même tems qu’elle indique les variations du froid & du chaud, sert à compenser les erreurs qui en résultent dans les horloges à pendule.

M. Graham, illustre membre de la société royale de Londres, fut un des premiers qui tenta de remédier aux erreurs qu’occasionnent dans les horloges à pendule, les contractions ou dilatations des métaux, par les différens degrés de chaud & de froid qu’ils éprouvent. Voyez Métal. Il imagina pour cet effet de mettre en place de la lentille un tuyau contenant du mercure, afin que ce fluide se dilatant, ou se contractant par le chaud ou par le froid, il s’élevât ou s’abaissât dans le tube, & fît par-là monter ou descendre le centre d’oscillation précisément de la même quantité dont il seroit descendu ou monté, par l’alongement de la verge du pendule.

L’auteur, apparemment, n’a pas tiré de son invention tout l’avantage qu’il auroit pu desirer, car il n’en a point fait usage dans la pendule que messieurs les académiciens ont porté au nord.

Pour parvenir au même but, M. le Roy se sert d’un moyen tout différent, & sans-doute préférable. Il place perpendiculairement à l’horison, sur le coq, ou autrement dit la potence qui porte le pendule, un tuyau de cuivre TY (Voyez Coq, & nos Pl. d’horl.), long de 54 pouces, dans lequel passe une barre d’acier de même longueur ; celle-ci porte par son extrémité supérieure sur le bout du tuyau, & par l’inférieure elle est attachée aux ressorts de suspension