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THÉSÉIDE, s. f. (Mytholog.) partie d’une mythologie des anciens, composée en vers ; c’étoit un centon de différens poëtes nommé le cycle épique. Le morceau qui concernoit Thesée, son regne, ses actions, s’appelloit théseide. La théséide étoit encore une maniere de se raser la tête introduite par Thésée. Ce héros étant allé à Delphes, offrit aux dieux sa chevelure ; ce fut ceux de devant qu’il fit couper. On l’imita d’abord, ensuite la mode changea ; & l’on donna le nom de théséide à l’ancienne. Les Romains ont eu un poëme intitulé la théséide dont Juvenal s’est moqué ; rauci théseïde Codri. Codrus étoit l’auteur de ce poëme insipide.

THESIS, s. f. (en Musique.) positio, abaissement. C’est ainsi qu’on appelloit autrefois le tems fort ou le frappé de la mesure, à la différence du levé qui portoit le nom d’Arsis. Voyez Arsis & Thesis. (S)

THESKERÉ ou TESCARET, s. m. (Comm.) on nomme ainsi dans les états du grand seigneur, & particulierement à Smyrne, un certificat que donnent les commis de la douane, lorsque les marchandises y ont payé les droits d’entrée. En vertu de ce theskeré ou acquit, ces marchandises doivent passer franches dans les autres villes des états du grand seigneur où on les peut envoyer, c’est-à-dire, dans l’étendue de la ferme où elles ont payé ; car dans les autres, comme dans celles du Caire, elles doivent payer un nouveau droit. Dictionn. de Commerce.

THESMIE ou THESMOPHORE, (Antiq. greq.) épithete de Cérès qui signifie la législatrice. Elle avoit sous ce nom un temple à Phénéon en Arcadie, au bas du mont Cyllène, & un autre à Tithronium en Phocide, où la fête des thesmophories se célébroit tous les ans avec un grand concours de peuple. Voyez Thesmophories. (D. J.)

THESMOPHORIES, s. f. plur. (Antiq. greque.) θεσμοφόρια, on appelloit ainsi les fêtes qui se célébroient dans l’Attique au mois Pyanepsion (Novembre, selon le p. Petau), en l’honneur de Cérès législatrice, parce que cette déesse avoit, dit-on, donné de sages lois aux mortels. Il n’étoit point permis aux hommes d’assister aux thesmophories, & il n’y avoit que les femmes de condition libre qui pussent les célébrer ; elles se rendoient en procession à Eleusis, & faisoient porter par des filles choisies les livres sacrés. Toutes ces femmes étoient vêtues de robes blanches, selon Ovide ; & durant la solemnité qui étoit de cinq jours, elles étoient obligées de se séparer de la compagnie de leurs maris, pour célébrer les mysteres de la déesse avec plus de pureté. Voyez Eleusinies.

Potter, dans ses archæol. græc. t. I. p. 403 & suiv. a décrit plusieurs détails de cette solemnité, consultez-le. (D. J.)

THESMOTHETE, s. m. (Antiq. greq.) θεσμοθέτης, grand magistrat d’Athenes ; il y avoit six thesmothetes qu’on tiroit du nombre des neuf archontes, & qu’on élisoit tous les ans, pour être les surveillans & les conservateurs des lois. Les six derniers archontes d’Athènes étoient appellés d’un nom commun thesmothetes, parce qu’ils avoient une intendance particuliere sur les lois. Leur principal devoir étoit de veiller à leur intégrité, de s’opposer aux nouvelles lois, avant qu’elles eussent été examinées, & de maintenir les anciennes dans toute leur pureté. Ils jugeoient ce qui regarde l’adultere, les insultes, les calomnies, les fausses inscriptions & citations, la corruption des magistrats & des juges inférieurs, les fraudes des marchands & des contrats de commerce ; ils pouvoient convoquer les assemblées extraordinairement, quand les affaires le requéroient, punir de la peine du talion les faux accusateurs, & marquer le rang des juges & des assesseurs. Pour entendre ce mot assesseur, il faut savoir que les trois premiers archontes

se choisissoient chacun deux coadjuteurs pour former leur tribunal ; c’étoient comme des conseillers ; ils les présentoient au sénat, & les faisoient agréer au peuple. On pouvoit appeller de leurs jugemens, & dans le cas d’appel, c’étoit à eux d’introduire les parties au tribunal où la cause étoit renvoyée. (D. J.)

THESPHATA, (Littérat.) θέσφατα, c’étoit un des noms que les Grecs donnoient aux oracles. Voyez Oracle. (D. J.)

THESPIADES, (Mytholog.) surnom des muses pris de la ville de Thespie, où elles étoient honorées. (D. J.)

THESPIE, (Géog. anc.) Thespia ou Thespiæ ; car ce mot, selon Strabon, s’écrit de ces deux manieres. C’étoit une ville de la Béotie, au pié du mont Hélicon, du côté du midi, sur le bord du golfe Chryssæus. Pausanias, Bæot. c. xxvj. dit qu’elle étoit au pié de l’Hélicon ; de façon qu’elle regardoit aussi le mont Cithéron. Le périple de Scylax, Hérodote, Etienne le géographe, Tite-Live & Pline parlent de cette ville. Ce dernier, l. IV. c. vij. en fait une ville libre.

L’itinéraire d’Antonin la marque sur la route de l’Epire, de la Thessalie & de la Macédoine, en suivant la côte, & il la place entre Phocides & Mégare, à quarante milles du premier de ces lieux, & à égale distance du second. Les habitans de Thespie faisoient gloire d’ignorer tous les arts, sans excepter même l’agriculture.

Les Thébains victorieux sous Epaminondas saccagerent Thespie, & n’en épargnerent que les temples. Athènes recueillit les Thespiens qui eurent le bonheur d’échapper à la fureur du soldat. Ceux-ci avoient été de tout tems si dévoués aux Athéniens, qu’autant de fois, c’est-à-dire de cinq ans en cinq ans, que les peuples de l’Attique s’assembloient dans Athènes pour la célébration des sacrifices ; le héraut ne manquoit pas de comprendre les Thespiens dans les vœux qu’il faisoit à haute voix pour la république.

On célébroit à Thespie une fête solemnelle en l’honneur des muses ; & pendant cette fête on faisoit des jeux qui étoient appellés musées. Il y en avoit aussi d’autres qu’on nommoit étotidies, à l’honneur de Cupidon, & on décernoit des prix non-seulement aux musiciens, mais encore aux athletes.

On admiroit dans cette ville une statue de bronze de Jupiter sauveur ; l’histoire dit que c’étoit un jeune homme nommé Cléostrate qui se dévoua pour sa patrie, & que les Thespiens érigerent cette statue en son honneur ; mais Cicéron dans une de ses harangues contre Verres, & Pline, l. XXXVI. c. v. prétendent que l’on alloit à Thespie uniquement pour y voir le Cupidon de Praxitele. Ils ont tous raison, en distinguant les tems. (D. J.)

THESPROTIE, (Géog. anc.) Thesprotia, selon Etienne le géographe, & Thesprotis, selon Thucydide, l. I. p. 32, petite contrée de l’Epire. Le périple de Scylax appelle les habitans de cette contrée Thesproti ; ils avoient au midi la Chaonie, à l’orient l’Ambracie & le lac Ambracius. Hérodote, l. VIII. c. xlvj. les dit voisins des Ambraciotes. Dans la suite les Cassiopenses ayant été séparés des Thesprotes, le pays de ces derniers eut des bornes plus étroites.

C’est dans la Thesprotie qu’étoit l’oracle de Dodone, & ces fameux chênes consacrés à Jupiter. On y voyoit aussi le marais Achéruseia, le fleuve Acheron & le Cocyte dont l’eau étoit d’un goût fort désagréable. Il y a bien de l’apparence qu’Homere avoit visité tous ces lieux, dit Pausanias, & que c’est ce qui lui a donné l’idée d’en tirer parti dans sa description des enfers, où il a consacré les noms de ces fleuves.

Plutarque, dans la vie de Thésée, dit que le roi des Thesprotiens étoit Pluton, qu’il avoit une femme appellée Proserpine, une fille nommée Coré, & un chien