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leur donnera un bain ou deux de bresil, suivant la couleur.

Les écarlates, ou rouges rancés n’auront de pié de rocou, que la moitié de ce qui s’en donne aux orangés, puis seront alunés ; & ensuite on leur donnera deux bains de brésil.

Les céladons, verds de pomme, verds de mer, verds naissants, verds gais, &c. seront alunés, & ensuite gaudés avec gaude ou sarrette, suivant la nuance ; puis passés sur la cuve d’inde.

Les verds bruns seront alunés, gaudés avec gaude, ou sarrette, & passés sur une bonne cuve d’inde, puis rabattus avec le verdet & le bois d’inde.

Les feuilles mortes seront alunés, puis teints avec la gaude & fustel, & rabattus avec la couperose.

Les olives, & verds roux, seront alunés, puis montés de gaude & fustel, & rabattus avec le bois d’inde & la couperose.

Le rouge incarnat & rose faux, seront alunés & faits de pur brésil.

Les cannelés & rose-seche, seront alunés & faits de bresil & bois d’inde.

Le gris violent sera aluné & fait de bois d’inde.

Les violets seront montés de brésil, bois d’inde, ou de l’orseille, puis passés sur la cuve d’inde.

Les gris plombés seront tous faits de fustel, ou avec de la gaude ou sarrette, bois d’inde, eaux de galle & couperose.

Les muscs, minimes, gris de maure, couleur de roi & de prince, tristamie, noisettes, & autres couleurs semblables, seront faits de fustel, brésil, bois d’inde & couperose.

En toutes les couleurs ci-dessus ne sera donné aucune surcharge de galle, attendu que la galle appesantit les soies, ce qui cause une perte considérable à ceux qui les achetent & emploient.

Les soies pour mettre en noir seront bien décrassées, comme les précédentes, & ensuite bien lavées & torses, après quoi on fera bouillir un bain de galles, & une heure après qu’il aura bien bouilli, la soie sera mise dans ledit bain, & laissée pendant un jour & demi ou deux jours, puis sera tirée dudit bain, & bien lavée dans de l’eau claire, & après torse & bien chevillée : ensuite sera mise dans une chaudiere de galle neuve, où ne sera mis de galle fine que la moitié de la pesanteur de la soie, pour y demeurer un jour ou deux au plus, & après sera passée sur la teinture noire, & y baillez trois feux au plus, & non davantage, après sera bien battue & bien lavée, puis adoucie avec du savon blanc de bonne qualité, & non autre : ensuite torse & chevillée, & mise sécher

Les gris noirs, vulgairement appellés gris minimes, seront engallés comme le noir, & passés sur la teinture noire, autrement appellé un feu, une fois seulement.

Toutes les soies destinées à demeurer blanches, après avoir été bien decruées & dégorgées, seront passées à l’eau de savon avec azur, pour les reblanchir, & ensuite soufrées, si elles ne sont pas destinées à filer l’argent, dans lequel cas il ne faudra ni les soufrer, ni les aluner.

Teinture du noir pour la soie, à la maniere des Génois, des Florentins, & des Napolitains. La façon dont les Génois, les Florentins, & les Napolitains, se servent pour teindre les soies en noir, est infiniment plus sûre que celle des François, il faut en faire l’explication.

Lorsque la soie est débouillie ou cuite, de façon qu’elle se trouve réduite aux trois quarts de son poids, le teinturier la prépare pour la passer sur la cuve qui contient la préparation des drogues pour le noir ; plus cette préparation est ancienne, plus le noir qu’elle produit se trouve beau. Nos teinturiers de France ont soin de préparer eux-mêmes leurs cuves, les-

quelles ils renouvellent souvent. Il n’en est pas de même

chez les étrangers ; chaque ville de fabrique a un endroit de reserve, nommé le seraglio, où sont posées continuellement huit à dix cuves, qui sont entretenues à ses dépens ; ces cuves sont posées depuis trois à quatre cens années plus ou moins, c’est-à dire, préparées pour passer la soie destinée pour noir, n’ayant besoin que d’être entretenues de drogues convenables, à mesure que la matiere diminue par l’usage qu’on en fait ; le pié y demeurant toujours, ce qui forme une espece de levain qui aide à la fermentation des nouvelles drogues qu’on est obligé d’y ajouter ; les vaisseaux qui contiennent ces drogues, sont tous de fer, & non de cuivre comme en France ; cette derniere matiere étant plus propre à diminuer la solidité du noir, qu’à augmenter sa perfection, par rapport au verd-de-gris qui en est inséparable, attendu l’humide, & qui ne contribue pas peu à son imperfection ; au-lieu que la cuve de fer ne pouvant produire que de la rouille, ingrédient qui perfectionne le noir, il s’ensuit que la qualité de la cuve, & l’ancienneté de sa préparation, ne peuvent que contribuer à la perfection de la couleur qu’elle contient.

Tous les maîtres teinturiers sont obligés de porter les soies qu’ils ont préparées pour noir, au seraglio, afin de les passer sur une des cuves disposées pour cette opération, & donnent tant chaque livre de soie, ce qui ne leur porte aucun préjudice, parce qu’ils sont payés des premieres préparations qu’ils ajoutent à la rétribution qu’ils donnent pour l’entretien des cuves.

On fait un inventaire toutes les années, pour savoir si la dépense des personnes préposées à l’entretien des cuves, les drogues qu’on y emploie, & généralement tous les autres frais excédent la rétribution donnée par les teinturiers : lorsque la dépense excede, la ville fournit au surplus des frais, & lorsque la rétribution est au-dessus, le surplus sert d’indemnité pour les années où elle se trouve au-dessous. Voilà la façon des étrangers, qui certainement est préférable à celle des François.

Teinture de fil. Avant que de mettre aucun fil à la teinture, il sera décrusé, ou lessivé avec bonne cendre, & après, tors & lavé en eau de riviere ou de fontaine, & aussi retors.

Le fil pers, appellé vulgairement fil à marquer, retors & simple, & le bleu brun, clair & mourant, seront teints avec cuve d’inde ou indigo.

Le verd gai sera premierement fait bleu, ensuite rabattu avec bois de campêche & verdet, puis gaudé.

Le verd brun sera fait comme le verd gai, mais bruni davantage, & puis gaudé.

Le citron jaune pâle & plus doré sera teint avec gaude & fort peu de rocou.

L’oranger isabelle couvert, isabelle pâle jusqu’au clair & aurore, sera teint avec fustel, rocou & gaude.

Le rouge clair & plus brun, ratine claire plus couverte, seront teints avec brésil de Fernambouc & autre, & rocou.

Le violet rose seche, amaranthe claire ou brune, sera teint avec brésil, & rabattu avec l’alun d’Inde on indigo.

La feuille morte claire & plus brune, & la couleur d’olive, sera brunie avec gale & couperose, & rabattue avec gaude, rocou ou fustel suivant l’échantillon.

Le minime brun & clair, musc brun & clair, sera bruni avec gale & couperose, & rabattu avec gaude, rocou ou fustel.

Le gris blanc, le gris sale, gris brun, de castor, de breda, & toutes autres sortes de gris, seront bru-