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lon Tacite, Hist. l. IV. Le nom moderne est Zulpich. (D. J.)

TOLBOOTH, s. m. (Comm.) est le nom de la principale prison d’Edimbourg en Ecosse, & l’endroit où, en d’autres villes de la grande Bretagne, on pese les marchandises, pour régler en conséquence les droits d’entrée & de sortie, comme ce qu’on appelle en France la douane.

TOLE, s. m. (Hist. nat. Botan.) substance végétale dont les habitans des Antilles se servent au défaut d’amadou pour se procurer du feu ; cette substance provient d’une grande & belle plante nommée karatas, que les botanistes rangent au nombre des aloës ; les feuilles de cette plante naissent directement de la racine ; elles sont longues, étroites par rapport à leur longueur, fermes, pliées en gouttieres, terminées en pointe aiguë, & disposées en rond à-peu-près comme celles de l’ananas, formant une grosse tousse du milieu de laquelle s’éleve un jet de plus de douze piés de hauteur, rond, droit comme une fleche, & terminé par une gerbe chargée de boutons qui s’épanouissent en fleurs à cinq pointes ; ce jet seche en peu de tems & se renverse de lui-même ; toute sa substance se trouve alors aussi légere que du liege, ayant quelque rapport à l’agaric, mais un peu plus ligneuse ; dans cet état on la coupe par tronçons, on la fait noircir au feu & on l’enferme dans des petites calebasses pour s’en servir au besoin, en employant la pierre & le briquet.

Tole, s. f. (Serrur.) fer mince ou en feuille, qui sert à faire les cloisons des moyennes serrures, les platines des verroux & targettes, & les ornemens de relief amboutis, c’est-à-dire, ciselés en coquille. On fait aussi des ornemens de tole évidée ou découpée à jour. Il y a de ces ornemens aux clôtures des chapelles de l’église des pp. Minimes à Paris. (D. J.)

TOLEDE, (Géog. mod.) ville d’Espagne, aujourd’hui capitale de la nouvelle Castille, sur le bord du Tage, qui l’environne des deux côtés, à 16 lieues au midi de Madrid, & à 45 au nord-est de Mérida.

La situation de Tolede sur une montagne assez rude, rend cette ville inégale, de sorte qu’il faut presque toujours monter ou descendre ; les rues sont étroites, mais les places où l’on tient des marchés sont fort étendues. Le château royal, que l’on appelle Alcaçar, d’un mot retenu des Maures, est un beau & vaste bâtiment antique. L’église cathédrale est l’une des plus riches de toute l’Espagne. Le sagrario ou la principale chapelle, est un trésor en ouvrage d’or & d’argent ; la custode ou le tabernacle qui sert à porter le Saint-sacrement à la Fête-Dieu, est si pesant qu’il ne faut pas moins de trente hommes pour le porter.

Si cette église est superbement ornée, elle n’est pas moins bien rentée ; son archevêque est primat du royaume, conseiller d’état, grand chancelier de Castille, & jouissant du privilege de parler le premier après le roi ; il possede dix-sept villes, & son revenu est au-moins d’un million de notre monnoie ; les honneurs qu’il reçoit comme archevêque à son entrée dans Tolede, sont tels qu’on en rendroit à un monarque.

Le clergé de son église jouit d’environ 400000 écus de rente. Le cardinal Ximénès, qui fut archevêque de Tolede, au commencement du seizieme siecle, a singulierement contribué à l’ornement de cette église, car on prétend que les dépenses qu’il y fit montoient à cinquante mille ducats ; il employa environ cinquante mille écus à la seule impression des missels & des bréviaires mozarabes. Voyez Mozarabe, office.

On compte dans Tolede dix-sept places publiques, vingt-sept paroisses, trente-huit maisons religieuses, & plusieurs hôpitaux. Il s’y est tenu divers conciles.

Son université fondée en 1475, a été fort enrichie par le cardinal Ximénès. La ville est forte d’assiette, & fait un grand commerce de soie & de laine ; mais ce commerce fleuriroit bien davantage, pour peu qu’on voulût travailler à rendre le Tage navigable, afin que les bateaux arrivassent au pié de la ville.

L’air y est très-pur, mais ses environs sont secs & stériles. On nous a conservé l’inscription suivante tirée des restes d’un ancien amphithéatre découvert hors de la ville ; cette inscription faite à l’honneur de l’empereur Philippe porte ces mots : Imp. Cæs. M. Julio Philippo Pio. Frel. Aug. Partico. Pont. Max. Trib. Pott. P. P. Consuli Toletani Devotiss. Numini Majest. Que Ejus D. D.

Long. de Tolede, suivant de la Hire, 12d. 51′. 30″. latit. 39d. 46′. & suivant Street, long. 18d. 16′. 45″. latit. 39d. 54′.

La ville de Tolede a été dans l’ancien tems une colonie des Romains, dans laquelle ils tenoient la caisse du trésor. Jules César en fit sa place d’armes ; Auguste y établit la chambre impériale ; Léovigilde, roi des Goths, y choisit sa résidence ; Bamba l’aggrandit & l’entoura de murailles. Les Maures la prirent l’an 714, lorsqu’ils entrerent en Espagne, & le roi Alphonse VI. roi de la vieille Castille, la reprit sur eux à l’instigation du Cid, fils de dom Diegue, qui s’étoit tant distingué contre les Musulmans, & qui offrit au roi Alphonse tous les chevaliers de sa banniere pour le succès de l’entreprise.

Le bruit de ce fameux siége, & la réputation du Cid, appellerent de l’Italie & de la France beaucoup de chevaliers & de princes. Raimond, comte de Toulouse, & deux princes du sang de France de la branche de Bourgogne, vinrent à ce siége. Le roi mahométan, nommé Hiaja, étoit fils d’un des plus généreux princes dont l’histoire ait conservé le nom. Almamon son pere avoit donné dans Tolede un asyle à ce même roi Alphonse, que son frere Sanche persécutoit alors. Ils avoient vécu long-tems ensemble dans une amitié peu commune, & Almamon loin de le retenir, quand après la mort de Sanche il devint roi, & par conséquent à craindre, lui avoit fait part de ses trésors ; on dit même qu’ils s’étoient séparés en pleurant. Plus d’un chevalier mahométan sortit des murs pour reprocher au roi Alphonse son ingratitude envers son bienfaiteur, & il y eut plus d’un combat singulier sous les murs de Tolede.

Le siege dura une année ; enfin Tolede capitula en 1085, mais à condition qu’il traiteroit les Musulmans comme il en avoit usé avec les Chrétiens, qu’on leur laisseroit leur religion & leurs lois, promesse qu’on tint d’abord, & que le tems fit violer. Toute la Castille neuve se rendit ensuite au Cid, qui en prit possession au nom d’Alphonse ; & Madrid, petite place qui devoit être un jour la capitale de l’Espagne, fut pour la premiere fois au pouvoir des Chrétiens.

Plusieurs familles vinrent de France s’établir dans Tolede : on leur donna des privileges qu’on appelle même encore en Espagne franchises. Le roi Alphonse fit aussi-tôt une assemblée de prélats, laquelle sans le concours du peuple autrefois nécessaire, élut pour évêque de Tolede un prêtre nommé Bernard, à qui le pape Grégoire VII. conféra la primatie d’Espagne à la priere du roi.

La conquête fut presque toute pour l’Eglise ; mais le primat eut l’imprudence d’en abuser, en violant les conditions que le roi avoit jurées aux Maures. La plus grande mosquée devoit rester aux Mahométans. L’archevêque pendant l’absence du roi en fit une église, & excita contre lui une sédition. Alphonse revint à Tolede, irrité contre l’indiscretion du prélat ; il appaisa le soulevement en rendant la mosquée