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sortes de translations est beaucoup plus moderne.

Pour passer dans un ordre plus austere, un religieux doit demander la permission de son supérieur ; mais si le supérieur la refuse, le religieux peut néanmoins se retirer.

A l’égard des mendians, il leur est défendu, sous peine d’excommunication, de passer dans un autre ordre, même plus austere, sans un bref du pape ; & il est défendu aux supérieurs, sous la même peine, de les recevoir sans un bref de translation : on excepte seulement l’ordre des Chartreux.

Le pape est aussi le seul qui puisse transférer un religieux dans un ordre moins austere, lorsque sa santé l’exige.

Le bref de translation doit être fulminé par l’official, après avoir entendu les deux supérieurs ; & si la translation est accordée à cause de quelque infirmité du religieux, il faut qu’elle soit constatée par un rapport des médecins.

Les brefs de translation, pour être exécutés en France, doivent être expédiés en la daterie de Rome, & non par la congrégation des cardinaux, ni par la pénitencerie.

L’usage de la daterie qui est suivi parmi nous, oblige le religieux transféré, de faire un noviciat & une nouvelle profession, lorsqu’il passe dans un ordre plus austere, ou qu’il passe d’un ordre où l’on ne possede pas de bénéfice, dans un ordre où l’on en peut tenir. Cap. licet extra de regularibus : cap. viam extravag. comm. de regular. concil. Trid. session 25. de regul. cap. xxix. D’Héricourt, tit. de la translation d’ordre. (A)

Translation, s. f. dans nos anciennes musiques, c’est le transport de la signification d’un point à une note séparée par d’autres notes, de ce même point. Voyez Point. (S)

TRANSMARISCA, (Géogr. anc.) ville de la basse Mœsie. L’itinéraire d’Antonin la marque sur la route de Viminacium à Nicomédie. Ptolomée, l. VIII. c. x. nomme cette ville Tromarisca, & le nom moderne est Marice, selon Lazius. (D. J.)

TRANSMETTRE, v. act. (Gram.) c’est faire passer. Il se dit des choses, des tems, & des lieux : on transmet un fait à la postérité ; on transmet un privilege qui est à quelqu’un ; on transmet une chose d’un lieu dans un autre ; on transmet ses sentimens à son ami, ses vices & quelquefois ses infirmités à ses enfans ; l’action de la lumiere se transmet à-travers le verre.

TRANSMIGRATION, s. f. (Gram.) transport d’une nation entiere dans un autre pays, par la violence d’un conquérant. Voyez Colonie.

Quelques-uns, en traduisant l’endroit de l’Ecriture où il est parlé du transport des enfans d’Israël à Babylone, se servent du terme de transmigration. Voyez Transport.

Transmigrations des Juifs, (Hist. des Hébr.) on compte quatre transmigrations des Juifs à Babylone, toutes par Nabuchodonosor ; la premiere se fit au commencement du regne de Joakim, lorsque Daniel & autres furent transférés en Chaldée ; la deuxieme sous le regne de Sédécias ; la troisieme & la quatrieme en divers tems ; & dans cette derniere, tout ce qui restoit en Judée fut emmené à Babylone. Les dix tribus furent aussi transférées hors de leur patrie : d’abord par Tiglath-Pilesec, & ensuite par Salmanasar, qui, après avoir pris Samarie, emmena le reste du royaume d’Israël en Médie & en Assyrie, sur le fleuve de Gozan. De ces captifs Israélites, les uns revinrent dans leurs pays, pendant la domination des Perses & des Grecs ; le reste se multiplia, & se dispersa dans toutes les provinces de l’Orient. (D. J.)

Transmigration des ames, (Théol. & Philos.)

on peut voir d’abord dans ce Dictionnaire l’article Métempsycose.

Mais qu’il nous soit permis de recueillir en abregé, d’après M. de Chaufepié, ce que l’histoire nous apprend de plus curieux sur cette matiere, & de quelle cause la doctrine de la transmigration des ames, a pu tirer sa naissance. Ce détail ne déplaira peut-être pas à quantité de lecteurs, qui n’ont ni le tems, ni l’occasion de recourir aux sources & aux ouvrages des savans qui y ont puisé.

Il est certain, dit Burnet, que jamais doctrine ne fut plus générale que celle-ci ; elle régna non-seulement par-tout l’Orient, mais en Occident chez les Druides & les Pythagoriciens ; elle est si ancienne qu’on n’en sauroit marquer l’origine, & qu’on diroit qu’elle est descendue du ciel, tant elle paroît être sans pere, sans mere, & sans généalogie.

Les cabalistes gardent encore cette ancienne erreur ; ils prétendent que les ames humaines passent d’un corps dans un autre, au moins trois fois, afin qu’elles n’aient point à alléguer devant le souverain juge de notre vie, qu’elles n’ont point eu de corps propre à la vertu. C’est sur ce principe qu’ils disent que la même ame qui a animé successivement Adam & David, animera le Messie.

Il y a eu chez les chrétiens des docteurs célebres par leur savoir & par leur piété, qui ont adopté cette erreur. M. Huet prétend qu’Origene lui-même a cru que les ames animoient divers corps successivement, & que leurs transmigrations étoient réglées à proportion de leurs mérites, ou de leurs démérites. Un savant moderne doute que l’évêque d’Avranches ait bien interprété les passages d’Origène qu’il cite. Quoi qu’il en soit, il est certain que l’erreur de la transmigration des ames a été adoptée par Synésius. On la trouve en divers endroits de ses ouvrages, & peut-être dans cette priere qu’il adresse à Dieu, Hymn. III. vers. 725. « O Pere, accordez-moi que mon ame réunie à la lumiere, ne soit plus replongée dans les ordures de la terre ».

Νεῦσον δὲ Πατέρ
Φωτὶ μιγεῖσαν
Μηκέτι δῦναι
Ἐς χθονὸς ἄταν

Mais Chalcidius plus ancien que Synésius, se déclare hautement pour la même erreur : « les ames qui ont négligé de s’attacher à Dieu, dit ce philosophe, sont obligées par la loi du destin, de commencer un nouveau genre de vie, tout contraire au précédent, jusqu’à ce qu’elles se repentent de leurs péchés ».

La transmigration des ames fut aussi un des dogmes des Manichéens ; leur doctrine sur ce sujet se réduisoit à ces articles : 1°. que les ames des méchans passent dans des corps vils ou misérables, & attaqués de maladies douloureuses, afin de les châtier & de les corriger ; 2°. que celles qui ne se convertissent pas après un certain nombre de révolutions, sont livrées au démon pour être tourmentées & domptées, après quoi elles sont renvoyées dans ce monde, comme dans une nouvelle école, & obligées de fournir une nouvelle carriere ; 3°. que les ames des auditeurs qui cultivoient la terre, se marioient, négocioient, &c. & qui du reste vivoient en gens de bien, n’étant pas néanmoins assez pures pour entrer dans le ciel au sortir du corps, passent dans des courges, &c. afin que ces fruits étant mangés par les élus qui ne se marioient point, elles ne soient plus liées avec la chair, & qu’elles achevent leur purification avec les élus ; 4°. qu’entre ces ames, il y en a qui sont renvoyées dans des corps mortels, pour vivre de la vie des élus & consommer ainsi leur purification & leur salut : car le privilege des ames des élus, étoit de retourner