en montant, jusqu’à ce que la quatrieme mi fasse la tierce majeure bien juste avec le premier son ut, ce qu’on appelle la preuve. 2°. En continuant d’accorder par quintes, dès qu’on est arrivé sur les dièses, on renforce les quintes, quoique les tierces en souffrent, & l’on s’arrête quand on est arrivé au sol dièse. 3°. On reprend l’ut, & l’on accorde les quintes en descendant, savoir, fa, si bémol, &c. en les renforçant toujours, jusqu’à ce qu’on soit parvenu au ré bémol, lequel, pris comme ut dièse, doit se trouver d’accord, & faire la quinte avec le sol dièse auquel on s’étoit arrêté. Les dernieres quintes se trouveront un peu fortes, de même que les tierces. Mais cette dureté sera supportable, si la partition est bien faite, & d’ailleurs ces quintes par leur situation sont rarement dans le cas d’être employées.
Les musiciens & les facteurs regardent cette maniere de tempérament comme la plus parfaite que l’on puisse pratiquer ; en effet, les tons naturels jouissent par cette méthode de toute la pureté de l’harmonie, & les tons transposés qui forment des modulations peu usitées, offrent encore des ressources au musicien quand il a besoin d’expressions dures & marquées. Car il est bon d’observer, dit M. Rameau, que nous recevons des impressions différentes des intervalles à proportion de leurs différentes altérations. Par exemple, la tierce majeure qui nous excite naturellement à la joie, nous imprime jusqu’à des idées de fureur lorsqu’elle est trop forte, & la tierce mineure qui nous porte naturellement à la douceur & à la tendresse, nous attriste lorsqu’elle est trop foible.
Les habiles musiciens, continue le même auteur, savent profiter à-propos de ces différens effets des intervalles, & font valoir par l’expression qu’ils en tirent, l’altération qu’on pourroit y condamner.
Mais dans sa génération harmonique, M. Rameau parle bien un autre langage. Il se reproche sa condescendance pour l’usage actuel ; & détruisant en un moment tout ce qu’il avoit établi auparavant, il donne une formule d’onze moyennes proportionnelles entre les deux termes de l’octave, sur laquelle il veut qu’on regle toute la succession du système chromatique ; de sorte que ce système résultant de douze semi-tons parfaitement égaux, c’est une nécessité que tous les intervalles semblables qui en seront formés soient aussi parfaitement égaux entre eux.
Pour la pratique, prenez, dit-il, telle touche du clavecin qu’il vous plaira ; accordez-en d’abord la quinte juste, puis diminuez-la si peu que rien, procédez ainsi d’une quinte à l’autre toujours en montant, c’est-à-dire du grave à l’aigu, jusqu’à la derniere dont le son aigu aura été le grave de la premiere, vous pouvez être certain que le clavecin sera bien d’accord, &c.
Il ne paroît pas que ce système ait été goûté des musiciens, ni des facteurs. Le premier ne peut se resoudre à se priver de la variété qu’il trouve dans les différentes impressions qu’occasionne le tempérament. M. Rameau a beau lui dire qu’il se trompe, & que le goût de variété se prend dans l’entrelacement des modes, & nullement dans l’altération des intervalles ; le musicien répond que l’un n’exclut pas l’autre, & ne se tient pas convaincu par une assertion.
A l’égard des facteurs, ils trouvent qu’un clavecin accordé de cette maniere n’est point aussi bien d’accord que l’assure M. Rameau ; les tierces majeures leur paroissent dures & choquantes ; & quand on leur répond qu’ils n’ont qu’à s’accoutumer à l’altération des tierces, comme ils l’étoient ci-devant à celles des quintes, ils repliquent qu’ils ne conçoivent pas comment l’orgue pourra s’accoutumer à ne plus faire les battemens désagréables qu’on y entend par cette maniere de l’accorder. Le pere Mersenne remarque que de son tems plusieurs pensoient que les premiers
qui pratiquerent sur le clavecin les semi-tons, qu’il appelle feintes, accorderent d’abord toutes les quintes à-peu-près justes, selon l’accord égal que nous propose aujourd’hui M. Rameau ; mais que leur oreille ne pouvant souffrir la dissonance des tierces majeures nécessairement trop fortes, ils tempérerent l’accord en affoiblissant les quintes pour baisser les tierces majeures. Voilà ce que dit le pere Mersenne.
Je ne dois point finir cet article sans avertir ceux qui voudront lire le chapitre de la génération harmonique, où M. Rameau traite la théorie du tempérament, de ne pas être surpris s’ils ne viennent pas à bout de l’entendre, puisqu’il est aisé de voir que ce chapitre a été fait par deux hommes qui ne s’entendoient pas même l’un l’autre, savoir un mathématicien & un musicien.
La théorie du tempérament offre une petite difficulté de physique, de laquelle il ne paroît pas qu’on se soit beaucoup mis en peine jusqu’à présent.
Le plaisir musical, disent les physiciens, dépend de la perception des rapports des sons. Ces rapports sont-ils simples ? les intervalles sont consonans, les sons plaisent à l’oreille. Mais dès que ces rapports deviennent trop composés, l’ame ne les apperçoit plus, & cela forme la dissonance. Si l’unisson nous plait, c’est qu’il y a rapport d’égalité qui est le plus simple de tous ; dans l’octave, le rapport est d’un à deux, c’est un rapport simple, toutes ses puissances sont dans le même cas ; c’est toujours par la simplicité des rapports que notre oreille saisit avec plaisir les tierces, les quintes, & toutes les consonnances ; dès que le rapport devient plus composé seulement comme de 8 à 9, ou de 9 à 10, l’oreille est choquée ; elle est écorchée quand il est de 15 à 16.
Cela étant, je dis qu’un clavecin parfaitement d’accord, devroit, étant bien joué, produire la plus affreuse cacophonie que l’on puisse jamais entendre ; prenons la quinte ut, sol, son rapport est , rapport simple & facile à appercevoir ; mais il a fallu diminuer cette quinte ; & cette diminution qui est d’un quart de comma, formant une nouvelle raison, le rapport de la quinte ut, sol, ainsi tempérée, est justement de , à 240. Je demande donc en vertu de quoi, un intervalle dont les termes sont en telle raison, n’écorche pas les oreilles.
Si l’on chicane, & qu’on soutienne qu’une telle quinte n’est pas harmonieuse ; je dis en premier lieu que si l’on est instruit, ou qu’on ait de l’oreille, c’est parler de mauvaise foi ; car tous les musiciens savent bien le contraire : de plus, si l’on n’admet pas cette quinte ainsi altérée, on ne sauroit nier, du-moins, qu’une quinte parfaitement juste ne soit susceptible de quelque altération sans être moins agréable à l’oreille. Or il faut remarquer que, plus cette altération sera petite, & plus le rapport qui en résultera sera composé ; d’où il s’ensuit, qu’une quinte peu altérée devroit déplaire encore plus que celle qui le seroit davantage.
Dira-t-on que dans une petite altération, l’oreille supplée à ce qui manque à la justesse de l’accord, & suppose cet accord dans toute son exactitude ? qu’on essaye donc d’écouter une octave fausse ; qu’on y supplée ; qu’on y suppose tout ce qu’on voudra, & qu’on tâche de la trouver agréable. (S)
TEMPÉRANT, adj. (Thérapeutiq.) remede tempérant, ou sédatif ; c’est un nom que les Médecins modernes donnent à certains remedes, ou bien c’est une certaine vertu de remede déterminée par les modernes, & assez mal déterminée, & qui consiste selon l’idée qu’ils attachent à ce mot, à calmer l’organe, ou la fougue des humeurs, & l’action excessive des solides : cette vertu paroît composée de l’anodine, de la rafraîchissante, de l’antiphlogistique,