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TEMPLE, TEMPE, s. f. (Synonym.) on nomme indifféremment par ces deux termes, la partie double de la tête, qui est à l’extrémité du front, entre les yeux & les oreilles. L’académie françoise préfere temple à tempe, & je ne crois pas qu’elle ait raison, car outre que tempe ôte l’équivoque, il répond au mot latin tempora, qui désigne le tems ou l’âge de l’homme, à cause que le poil de cet endroit blanchit ordinairement le premier. De-là vient qu’Homere appelle poliocrotaphes les hommes qui grisonnent ; en grec πολιοκρόταφος, de πολίος, chauve, & κροταφος, tempora, la tempe. (D. J.)

Temple, Église, (Synonym.) ces mots signifient un édifice destiné à l’exercice public de la religion ; mais temple est du style pompeux ; église du style ordinaire, du moins à l’égard de la religion romaine : car à l’égard du paganisme, & de la religion protestante, on se sert du mot de temple, même dans le style ordinaire, au-lieu de celui d’église. Ainsi l’on dit le temple de Janus, le temple de Charenton, l’église de S. Sulpice.

Temple paroît exprimer quelque chose d’auguste, & signifier proprement un édifice consacré à la divinité. Eglise paroît marquer quelque chose de plus commun, & signifier particulierement un édifice fait pour l’assemblée des fideles.

Rien de profane ne doit entrer dans le temple du Seigneur : on ne devroit permettre dans nos églises que ce qui peut contribuer à l’édification des chrétiens.

L’esprit & le cœur de l’homme sont les temples chéris du vrai Dieu ; c’est-là qu’il veut être adoré ; envain on fréquente les églises, il n’écoute que ceux qui lui parlent dans leur intérieur.

Les temples des faux dieux étoient autrefois des asyles pour les criminels ; mais c’est, ce me semble, deshonorer celui du très-haut, que d’en faire un réfuge de malfaiteurs. Si l’on ne peut apporter à l’église un esprit de recueillement, il faut du moins y être d’un air modeste, la bienséance l’exige, ainsi que la piété. Girard. (D. J.)

Temple, s. m. (Archit.) c’est dans l’ancienne architecture, un bâtiment destiné au culte divin, & où l’on faisoit les sacrifices : ce bâtiment étoit composé de quatre parties. La premiere étoit formée par des aîles en forme de galerie, ou portiques, nommés pleromata. La seconde étoit un porche appellé pronaos ; une partie à-peu-près semblable étoit opposée à celle-ci ; & une troisieme beaucoup plus grande, étoit au-milieu de ces trois parties.

L’art de l’architecture des temples étoit aussi perfectionné que diversifié chez les Grecs & les Romains ; mais il s’agit seulement d’expliquer ici les principaux termes qui prouvent cette diversité.

Temple amphitrostyle, ou double prostile. Temple qui avoit des colonnes devant & derriere, & qui étoit aussi tétrastyle. Voyez ci-après Temple tétrastile.

Temple à antes. C’étoit, selon Vitruve, le plus simple de tous les temples ; il n’avoit que des pilastres angulaires, appellés antes ou parastates, à ses encoignures, & deux colonnes d’ordre toscan aux côtés de sa porte.

Temple diptere. Temple qui avoit deux rangs de colonnes isolées en son circuit, & qui étoit octostyle, c’est-à-dire, avec huit colonnes de front ; tel étoit le temple de Diane à Ephese. Le mot diptere vient du grec διπτερος, qui a deux aîles.

Temple hypêtre. Temple dont la partie intérieure étoit à découvert, ainsi que l’indique le mot hypêtre, dérivé du grec ιπαιτρας, qui signifie lieu découvert. Il étoit décastyle, ou avec dix colonnes de front, & avoit deux rangs de colonnes en son pourtour extérieur, & un rang dans l’intérieur. Tel étoit le

temple de Jupiter Olympien à Athenes.

Temple monoptere. Temple rond & sans murailles, qui avoit un dôme porté sur des colonnes ; c’est ainsi qu’étoit le temple d’Apollon Pythien, à Delphes.

Temple périptere. Temple qui étoit décoré de quatre rangs de colonnes isolées en son pourtour, & qui étoit hexastyle, c’est-à-dire, avec six colonnes de front, comme le temple de l’Honneur & de la Vertu à Rome. Le mot périptere est formé de deux mots grecs, πέρι, à-l’entour, & πτέρον, aîle.

Temple périptere rond. Temple dont un rang de colonnes forme un porche circulaire, qui environne une rotonde, comme les temples de Vesta à Rome, & de la Sybille à Tivoli, & une petite chapelle près S. Pierre in montorio, à Rome, bâtie par Bramante, fameux architecte.

Temple prostyle. Temple qui n’avoit des colonnes qu’à la face antérieure, comme le temple d’ordre dorique de Cérès Eléusis, en Grece. Le mot prostyle est dérivé de deux mots προ, devant ; & στυλίς, colonne.

Temple pseudodiptere, ou diptere imparfait. Temple qui avoit huit colonnes de front, avec un seul rang de colonnes qui régnoit au pourtour, comme le temple de Diane, dans la ville de Magnesie en Grece.

Temple tétrastyle. Le mot grec τετραστυλος, qui signifie quatre colonnes de front, caractérise ce temple. Tel étoit celui de la Fortune virile à Rome. (D. J.)

Temple, de Dieu, (Critique sacrée.) νέως τοῦ θεοῦ ; ce mot, outre le sens propre d’un édifice consacré au culte public de Dieu, se prend au figuré dans l’Ecriture, 1°. pour le séjour des bienheureux, 2°. pour l’Eglise de Jesus-Christ. « L’antechrist, dit Saint Paul, II. Thessalon. ij. 4. siégera dans le temple de Dieu, c’est-à-dire, usurpera dans l’Eglise le pouvoir & les honneurs divins ». 3°. Pour les fideles : Vous êtes le temple de Dieu ; car l’esprit de Dieu habite en vous, I. Corinth. iij. 16. Un poëte grec a dit de la divinité, « qu’elle trouve autant de plaisir à habiter chez les gens de bien que dans l’olympe ». (D. J.)

Temple de Salomon, (Hist. sacrée) David rassembla long-tems des matériaux pour la construction de ce temple, que Salomon éleva sur le mont de Sion, & qu’il acheva dans le cours de deux ans & avec des dépenses prodigieuses. Ce n’étoit cependant qu’une masse de bâtiment, qui n’avoit que cent cinquante piés de long, & autant de large en prenant tout le corps de l’édifice d’un bout à l’autre, ce qui est au-dessous de plusieurs de nos églises paroissiales. On ne conçoit guere qu’un si petit édifice ait occupé cent soixante mille ouvriers, que les rois d’Egypte & de Tyr fournirent à Salomon, au rapport de Clément qui dit avoir lu cette particularité dans un ouvrage d’Alexandre Polyhistor. Il faut donc supposer que c’étoit au travail exquis des ornemens & des décorations intérieures, que la plûpart de ces ouvriers furent occupés. Le livre des chroniques, ch. iij. dit que la seule dépense des décorations du saint des saints, qui étoit une place de trente piés en quarré & de trente piés de haut, montoit à six cens talens d’or. S’il ne s’est point glissé d’erreur dans le texte, c’est une somme de quatre millions trois cens vingt mille livres sterling pour cette seule partie du temple, mais cela n’est pas vraissemblable.

Les édifices extérieurs étoient fort considérables ; car la cour dans laquelle le temple étoit placé, & celle du dehors nommée la cour des femmes, étoient environnées de bâtimens & de bâtimens magnifiques. Les portes qui y conduisoient, répondoient à cette magnificence. Enfin, la cour intérieure qui formoit un quarré de mille sept cens cinquante piés de chaque côté, & qui embrassoit tout le reste, étoit entourée d’une galerie soutenue de trois rangs de colonne à