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qu’en prenant les auspices par les poulets sacrés, il leur étoit tombé du bec quelque morceau de la pâte qu’on avoit mise devant eux ; cela s’appelloit tripudium solistimum, ce qui étoit regardé comme le meilleur augure qu’on pût avoir. Il y avoit encore le tripudium sonivium, dont le nom est tiré du son que faisoit en tombant à terre par accident quelque chose que ce fût ; alors on tiroit des présages bons ou mauvais, selon la qualité du son. (D. J.)

TRIPYRGA, (Géog. mod.) nom que les habitans d’Athènes donnent aujourd’hui à un lac marécageux de la Morée, environ à une lieue d’Athènes. Ce lac ou marais étoit nommé, selon Xénophon, Phalaræa palus, & il y avoit auprès un lieu nommé Tripyrgia, à cause de trois tours qui y étoient bâties. Du nom de ce lieu on a formé celui du lac, & de Tripyrgia on a fait par corruption Tripyrga. M. Wheler, voyage d’Athènes, l. III. p. 207. croit que ces trois tours pouvoient être des restes de la ville Limes. Du-reste, ajoute-t-il, ce lac s’étend en long du-moins une lieue & demie sur la côte, & il sort de son extrémité orientale un petit ruisseau qui se jette dans la mer, assez proche de la baie de Phalara, où il y a une petite église ruinée, appellée S. Nicolo. C’est apparemment ce lieu qui s’appelloit autrefois Colias promontorium. (D. J.)

TRIQUEBALLE, s. m. (Art milit.) machine très simple qui sert dans l’artillerie à transporter du canon. Elle est composée d’une grande fleche de bois ou timon appuyé sur un essieu à deux roues par-derriere, & sur un avant train par-devant. On attache le canon sur cette fleche avec une chaîne de fer ou de bons cordages. Mémoires d’Artillerie de Saint-Remy. (Q)

TRIQUE-MADAME, s. f. (Botan.) nom vulgaire du sedum minùs luteum, folio acuto, de C. B. & de Tournefort. C’est une espece de petite joubarbe, qui pousse des tiges tendres, rampantes, revêtues de beaucoup de feuilles épaisses, oblongues, grasses, pointues, bleuâtres, ou rougeâtres, remplies de suc ; ses fleurs sont à plusieurs pétales disposées en rose, au sommet des branches, de couleur jaune : il leur succede un petit fruit composé de cinq graines. On cultive cette plante dans les jardins, parce qu’on en mêle dans les salades ; mais elle croît naturellement sur les murailles, & ailleurs. (D. J.)

TRIQUER, v. act. (Comm.) séparer une chose d’avec une autre : il signifie aussi quelquefois mêler plusieurs choses ensemble.

Dans ce dernier sens, les ordonnances de la ville de Paris, chap. iij. défendent aux marchands de triquer, & mêler les marchandises de différens prix & qualités ; & dans l’autre signification, les mêmes ordonnances enjoignent aux marchands de bois à brûler qu’on empile dans les chantiers, de triquer & séparer le bois blanc & de l’empiler à part. Dictionnaire de Commerce.

TRIQUET, s. m. (Charpenterie.) échafaud fait de plusieurs pieces de bois réunies ensemble, qui s’applique contre les murs, & qu’on appelle autrement chevalet. Il faut pour échafauder deux triquets qui s’attachent avec des cordages, & s’éloignent l’un de l’autre suffisamment par la longueur des planches qu’on met dessus.

TRIREME, s. m. (Littérat.) triremis, galere, bâtiment, vaisseau des Romains, qui avoit de chaque côté trois hommes sur chaque rame, quelque nombre de rames qu’il eût d’ailleurs ; messieurs le Baif & Dacier tiennent pour l’hypothèse des étages de rames les uns sur les autres. Ils citent en leur faveur des médailles, & la colonne trajane, où ce fait n’est pas de la derniere évidence ; je sai même que Scheffer & plusieurs autres savans, ont essayé à force de supputations mathématiques, de trouver une com-

binaison & un arrangement, pour prouver que la

chose n’est pas impossible ; mais quelque effort que l’on fasse, & de quelque maniere que l’on dispose ces étages, soit en files perpendiculaires, soit en files obliques, soit en forme de rampe, je ne crois pas, avec Scaliger, Saumaise, & le P. Sanadon, qu’on réussisse jamais à nous montrer une possibilité pratique, c’est-à-dire, qui puisse être d’un usage aisé, constant, & uniforme ; sans quoi tout ce système se réduit à une spéculation vaine & stérile, qui ne décide rien, & qui ne touche pas même à la question. (D. J.)

TRISACRAMENTAIRES, ou TRISACRAMENTAUX, s. m. pl. (Hist. ecclés.) nom que l’on a donné à une secte de religionnaires qui n’admettent que trois sacremens. Voyez Sacrement.

Il y a eu plusieurs trisacramentaires parmi les protestans qui admettoient le Baptême, l’Eucharistie, & l’Absolution, comme sacremens.

M. Chambers observe qu’on confond mal-à-propos les Anglois avec les Trisacramentaires, parce qu’on suppose qu’ils regardent l’ordination comme un sacrement ; mais quelle que soit l’opinion des Anglois sur ce point, il est sûr que les épiscopaux regardent la Confirmation comme un sacrement, & que d’ailleurs ils comptent pour sacremens le Baptême & l’Eucharistie ; ainsi l’on peut à cet égard le comprendre parmi les Sacramentaires.

TRISAGION, s. m. dans l’histoire ecclésiastique, est le nom qu’on donne à un hymne où le nom de saint est répété trois fois.

Ce mot est grec, composé de τρεῖς, trois, ou trois fois, & d’ἅγιος, saint.

Le trisagion proprement dit est composé de ces paroles, sanctus, sanctus, sanctus Dominus Deus sabaoth. Saint, saint, saint, Seigneur Dieu des armées, comme nous les lisons dans Isaïe, c. vj. ℣. 3. & dans l’Apocalypse, c. jv. de ces mots l’Eglise a formé un autre trisagion, qu’on chante dans l’église latine seulement le jour du Vendredi-saint, avant l’adoration de la croix. Il est conçu en ces termes : sanctus Deus, sanctus fortis, sanctus immortalis, miserere nobis, que les Grecs ont rendu par ceux-ci, ἅγιος ὁ θεός, ἅγιος ἰσχυρός, ἅγιος ἀθάνατος, ἐλέησον ἡμᾶς ; saint Dieu, saint puissant, saint immortel, ayez pitié de nous ; qu’ils répetent souvent non-seulement dans l’office, mais encore dans leurs prieres particulieres.

Pierre Gnaphée ou le Foulon, patriarche d’Antioche dans le v. siecle, y fit ajouter ces paroles qui crucifixus est propter nos ; attribuant ainsi la passion non-seulement au fils, mais aussi aux deux autres personnes de la sainte Trinité, & prononça anathème contre ceux qui refuseroient de dire la même chose ; mais le pape Félix III. & les Catholiques rejetterent cette addition qui autorisoit manifestement les erreurs des Patripassiens. Voyez Patripassiens & Théopaschites.

Ce dernier trisagion exclusivement aux paroles que Pierre le Foulon y vouloit ajouter, commença à être en usage dans l’église de Constantinople, d’où il passa dans les autres églises d’orient, & ensuite dans celles d’occident.

S. Jean Damascene, Codin Balsamon, & d’autres disent que le trisagion fut introduit à Constantinople à l’occasion d’un terrible tremblement de terre, arrivé la trente-cinquieme année de l’empire de Théodose le jeune, & du tems du patriarche Proclus ; que celui-ci ayant ordonné une procession solemnelle, où l’on chanta pendant plusieurs heures de suite le kyrie eleison, Seigneur, ayez pitié de nous, un enfant fut élevé en l’air, où il crut avoir entendu les anges chanter le trisagion ; que cet enfant à son retour, ayant raconté la chose, le peuple commença aussi-tôt à chanter cette hymne, avec d’autant plus