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Arlande en Dauphiné, d’azur au croissant versé d’or sur une étoise d’argent.

VERSEAU, (Const.). aquarius. Le verseau est le onzieme signe du Zodiaque, en comptant depuis Aries ou le bélier. Il donne son nom à la onzieme partie de ce cercle. Voyez Signe & Constellation. Le soleil parcourt le verseau dans le mois de janvier. On désigne cette constellation par ce caractere ♒. Voyez Caractere.

Les Poëtes ont feint que c’étoit Ganimede que Jupiter sous la forme d’un aigle, enleva & transporta, disent-ils, aux cieux, pour lui servir d’échanson, à la place d’Hebé & de Vulcain ; & c’est de-là que cette constellation s’appelle le verseau. D’autres prétendent que ce nom lui vient, de ce que le tems est ordinairement pluvieux, lorsqu’elle paroît sur l’horison.

Les étoiles qui forment cette constellation sont, selon le catalogue de Ptolomée, au nombre de 45 ; selon celui de Tycho, au nombre de 40, & selon le catalogue Britannique, au nombre de 99. Chambers.

Verseau, (Littérat.) nous avons un passage de Manilius sur le verseau, lib. IV. v. 259. trop curieux pour ne pas le rapporter ici.

Ille quoque inflexâ fontem qui projicit urnâ,
Cognatas tribuit juvenilis aquarius artes,
Cernere sub terris undas, inducere terris,
Ipsaque conversis aspergere fluctibus astra.

C’est-à-dire « le verseau, ce signe, qui panché sur son urne, en fait sortir des torrens impétueux, influe sur les avantages que nous procure la conduite des eaux : c’est à lui que nous devons l’art de connoître les sources cachées dans le sein de la terre, & c’est lui qui nous apprend à les élever à sa surface & à les élancer vers les cieux, où elles semblent se mêler avec les astres. »

Ce passage nous prouve les connoissances des anciens dans l’hydraulique, & que ce n’est point au siecle de Louis XIV. qu’on doit l’art des eaux jaillissantes, comme M. Perrault l’a imaginé. (D. J.)

VERSEIL, (Géog. mod.) petite ville, ou plutôt bourg de France, dans le haut Languedoc, à quatre lieues au levant de Toulouse, avec titre d’archiprêtré. (D. J.)

VERSER, v. act. (Gram.) c’est vuider un vaisseau d’un fluide qui y est contenu. Versez à boire. Versez par inclination, ou décantez. Les évangélistes n’accusent pas unanimement Hérode d’avoir versé le sang des innocens. Que l’esprit saint verse sur vous sa grace sanctifiante. Verser se prend dans des sens très-différens ; on dit qu’un carosse a versé ; que les blés sont versés, lorsqu’ils ont été battus de l’orage ; qu’un homme est versé dans l’histoire, dans les lettres, lorsqu’il s’en est occupé long-tems & avec succès.

VERSET, s. m. (Critique sacrée.) petit article ou portion d’un chapitre de l’Ecriture-sainte. On sait que toute la bible est actuellement divisée par chapitres, & les chapitres par versets ; mais on demande avec curiosité, quand cette division en versets & en chapitres a commencé, tant dans les bibles hébraïques, que dans celles de nos langues modernes. Nous allons discuter cette question avec un peu d’étendue, à cause des choses instructives qu’elle renferme.

Les cinq livres de la loi ont été anciennement partagés en 54 sections, & chaque section fut divisée en versets, nommés par les Juifs pésumkim. Nos bibles hébraïques les marquent par deux points à la fin, qu’on appelle à cause de cela soph-pasuk, c’est-à-dire la fin du verset. Si ce n’est pas Esdras qui est l’auteur de cette division, comme on le croit communément, du-moins ce ne peut pas être long-tems après lui qu’elle s’est introduite : car il est constant qu’elle

est fort ancienne. Il y a beaucoup d’apparence qu’elle a été inventée pour l’usage des Targumistes, ou des interpretes chaldéens. En effet, quand l’hébreu cessa d’être la langue vulgaire des Juifs, & que le Chaldéen eut pris sa place, ce qui arriva au retour de la captivité de Babylone, on lisoit au peuple premierement l’original hébreu ; & ensuite un interprete traduisoit en chaldéen ce qui venoit de se lire en hébreu, afin que tout le monde l’entendît parfaitement, & cela se faisoit à chaque période.

Pour distinguer donc mieux ces périodes, & faire que le lecteur sût où s’arrêter à chaque pause, & l’interprete jusqu’où devoit aller sa traduction ; il falloit nécessairement quelques marques. La regle étoit que dans la lecture de la loi, le lecteur devoit lire un verset, & l’interprete le traduire en chaldaïque ; dans celle des prophetes, le lecteur en devoit lire trois de suite, & l’interprete les traduire aussi de suite. Cela prouve manifestement la distinction de l’Ecriture en versets dans les synagogues, après la captivité de Babylone.

D’abord on ne la faisoit qu’à la loi, car jusqu’au tems des Macchabées, on n’y lisoit que la loi ; dans la suite on étendit cette distinction jusqu’aux prophetes & aux hagiographes mêmes, sur tout lorsqu’on commença à lire aussi les prophete en public. C’est-là vraissemblablement la maniere dont s’est introduite la distinction des versets dans l’Ecriture. Mais on ne mettoit pas alors les nombres à ces versets. Ils sont encore aujourd’hui distingués dans les bibles hébraïques communes par les deux points l’un sur l’autre, qu’on appelle soph-pasuk, comme on la dit plus haut.

Il est fort vraissemblable que la distinction des versets dans les livres consacrés à l’usage des synagogues, se faisoit par des lignes ; & ce qui confirme cette pensée, qu’autrefois chaque verset de la bible hébraïque faisoit une ligne à part ; c’est que parmi les autres nations de ce tems-là, on appelloit vers, les lignes des auteurs en prose, aussi bien que celles des poëtes. Ainsi par exemple l’histoire remarque, que les ouvrages de Zoroastre contenoient deux millions de vers, & ceux d’Aristote quatre cens quarante-cinq mille deux cent soixante & dix, quoique l’un & l’autre n’aient rien écrit qu’en prose. Nous voyons tout de même qu’on mesuroit les ouvrages de Cicéron, d’Origène, de Lactance, & d’autres encore, par le nombre de vers qu’ils contenoient ; c’est-à-dire de lignes. Pourquoi donc les versets de la bible, n’auroient-ils pas été de même espece, je veux dire des lignes assez grandes pour une période ? Il est vrai cependant que la vûe se perdoit dans ces longues lignes, que ce n’étoit qu’avec peine qu’on retrouvoit le commencement de la ligne suivante, & qu’on s’y méprenoit souvent en revenant à la même, ou en sautant à une trop éloignée ; quoi qu’il en soit, cette incommodité ne détruit point l’antiquité des versets, que nous avons démontrée.

La division de l’Ecriture en chapitres, telle que nous l’avons, est de bien plus fraîche date. Il n’y a que les pseaumes qui ont été de tout tems divisés comme aujourd’hui, car S. Paul, dans son sermon à Antioche en Pisidie, cite le pseaume second, act. xiij. 33. Mais pour tout le reste de l’Ecriture, la division actuelle en chapitres est inconnue à toute l’antiquité. Les bibles greques parmi les chrétiens avoient leurs τιτλοι & leurs κεφαλαια. Mais c’étoient plutôt des sommaires que des divisions, & quelque chose de fort différent de nos chapitres. Plusieurs de ces especes de divisions ne contenoient qu’un fort petit nombre de versets ; & quelques-uns n’en avoient qu’un seul. Les savans qui l’attribuent à Etienne Langton, archevêque de Cantorbery, sous le regne du roi Jean & sous celui d’Henri III. son fils, se trompent ; le véritable auteur de cette invention,