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que nous tournons les yeux de leur côté, & ce que l’on éprouve bien plus sensiblement encore, quand on les va voir de près, comme nous fîmes ces jours passés. Je ne sai même s’il n’y a pas quelque chose à gagner pour eux dans l’état où ils sont, & si, en général, un air un peu délâbré ne sied pas mieux à des endroits célebres, que s’ils étoient dans tout leur lustre ; car alors l’imagination, grande embellisseuse de son métier, travaille seule à nous les peindre, ne manque guere à leur prêter des charmes que peut-être ils n’ont jamais eu ». Nous rapportons ce morceau pour confirmer le détail que nous avons dejà fait d’après les historiens du tems, au mot Uranibourg. (D. J.)

WEERE, (Géog. mod.) ou WERE, petite ville des Provinces-unies, dans l’île de Walcheren, avec un port, à une lieue au nord-ouest de Middelbourg, avec tire de marquisat. Long. 21. 17. latit. 51. 30. (D. J.)

WEERT, (Géog. mod.) petite ville des Pays bas, dans le Brabant, au quartier de Bois-le-Duc, dans le Péeland, à 4 lieues de Ruremonde. Long. 23. 29. lat. 51. 9.

Il y a dans cette petite ville un couvent de recolets, un prieuré de chanoines augustins, & un monastere de religieuses pénitentes, fondé par Jean de Weert, natif de cette ville, dont il prit le nom.

Cet homme d’une naissance obscure, s’éleva par sa valeur au plus haut grade militaire, & rendit son nom très-célebre. Il commença sa fortune d’une maniere fort étonnante. Il apprenoit le métier de cordonnier ; son maître le battit, il s’engagea dans un régiment de troupes allemandes qui étoit à Weert. Bientôt il se fit distinguer, & après avoir passé d’une maniere brillante par tous les grades militaires, il devint vice-roi de Bohème, & commandant de Prague, où il mourut vers l’an 1665. C’est lui dont le nom, après avoir fait grand bruit dans les nouvelles publiques, retentit enfin dans nos chansons françoises. On en fit courir un grand nombre à la cour & à la ville, où il servoit de refrain.

Ménage voulant prouver que nous employons également le mot tudesque dans le discours familier, pour dire un allemand, cite M. de Montplésir, qui a dit dans une de ses chansons :

Faut-il se lever si matin,
Dit le comte de Fiesque ;
On ne dort non plus qu’un lutin
Avecque ce tudesque.
Maugré-bleu de la nation :
Le diable emporte Gassion,
Et Jean de Weert.

Mademoiselle l’Héritier nous aprend, dans le Mercure galant, d’Avril 1702, l’origine de ces chansons. Elle dit que Jean de Weert s’etant rendu maître de plusieurs places dans la Picardie, porta la terreur jusqu’aux portes d’Amiens, par les troupes qu’il envoyoit en parti. Cette terreur se répandit jusque dans Paris ; & comme le peuple grossit toujours les objets, le seul nom de Jean de Weert y inspiroit l’effroi.

Ce général ayant été fait prisonnier à la bataille de Rheinfeld, en 1638, la muse du Pont-Neuf célébra ses transports de joie sur un air de trompette qui couroit alors. Elle disoit que les François avoient fait un tel nombre de prisonniers, & Jean de Weert. Comme il y avoit dans ces chansons une certaine naïveté grossiere, mais réjouissante, la cour & la ville les chanterent. Enfin, des gens d’esprit en firent d’autres délicates & fort jolies sur le même air de Jean de Weert. Ce vaillant officier, dont le nom avoit fait un bruit si éclatant, laissa en France une mémoire immortelle de sa prise, & l’on nomma le

tems où elle étoit arrivée, le tems de Jean de Weert. (Le chevalier de Jaucourt.)

WEIBSTAT, (Géog. mod.) petite ville d’Allemagne, dans le palatinat du Rhein, entre Hailbron & Heidelberg. Long. 26. 31. lat. 49. 17. (D. J.)

WEIDA, (Géog. mod.) petite ville d’Allemagne, dans la haute-Saxe, au cercle de Voigtland, sur une riviere de même nom.

Weida, la, (Géog. mod.) ou la Weide, riviere d’Allemagne, en Silésie. Elle a sa source aux confins de la Pologne, & se perd dans l’Oder, un peu au-dessous de Breslaw. (D. J.)

WEIDEN, (Géog. mod.) petite ville d’Allemagne dans la Baviere, au palatinat de Neubourg, sur la riviere de Nab. Elle est le chef-lieu d’un bailliage, & passe pour être l’ancienne Idunum. Long. 29. 52. latit. 49. 41. (D. J.)

WEIGATS, détroit de, ou VEGATZ, ou VAIGATS, ou détroit de Nassau : (Géog. mod.) détroit entre les Samoyedes & la nouvelle Zemble. Il fait la communication entre les mers de Moscovie & de Tartarie.

On a cherché long-tems par ce détroit un passage à la Chine & au Japon, & ce projet n’est pas encore abandonné. Le premier qui fit cette tentative, fut Hughes Willoughby, en 1553 ; après lui, Etienne Burrough entreprit la même recherche en 1556. Les capitaines Arthur Peety & Charles Jackman poursuivirent la même entreprise en 1580, par ordre de la reine Elisabeth : ils passerent le détroit de Weigatz, & entrerent dans la mer qui est à l’est. Ils y trouverent une si grande quantité de glaces, qu’après avoir essuyé de grands dangers & des fatigues extraordinaires, ils furent contraints de revenir sur leurs pas : le mauvais tems les écarta, & l’on n’a jamais eu de nouvelles de Peety ni de son équipage.

Guillaume Barentz renouvella cette tentative par ordre du Prince Maurice en 1595 ; mais trouvant les mêmes difficultés que ses prédécesseurs à découvrir un passage à la Chine par le détroit de Weigatz, il se flatta de réussir par le nord de la nouvelle Zemble, fit deux voyages inutiles de ce côté-là, & mourut en route.

Le capitaine Wood, navigateur anglois, mit à la voile en 1675, porta droit au nord-est du nord-cap, & découvrit en 1676 comme un continent de glaces à 76 degrés de latitude, & environ à 60 lieues à l’est de Groenland, où il s’imagina qu’en allant plus à l’est, il pourroit trouver une mer libre ; mais découvrant toujours de nouvelles glaces, il perdit toute espérance.

Il reste encore une grande incertitude sur la possibilité du passage, soit par le nord de la nouvelle Zemble, soit par le midi, c’est-à-dire, par le détroit de Weigatz. Les uns prennent pour un golfe la mer qui est à l’est de ce détroit, & les autres veulent que ce soit une mer libre qui communique à celle de la Chine. Ce dernier sentiment paroît aujourd’hui le plus vraissemblable, car le nouvelle carte de l’empire de Russie, dressée sur de nouvelles observations, nous apprend que le Weigatz communique avec la mer de Tartarie, & que les glaces de ce détroit ne se fondent point pendant l’été, à moins que quelque tempête du nord-est ne vienne les briser.

Quoi qu’il en soit, c’est ici que l’Océan gelé jusqu’au fond de ses abîmes, est enchaîné lui-même, & n’a plus le pouvoir de rugir. Toute cette mer n’est qu’une étendue glacée : triste plage dépourvue d’habitans. Oh ! dit le peintre des saisons, combien sont malheureux ceux qui, embarrassés dans les amas de glaces, reçoivent en ces lieux le dernier regard du soleil couchant, tandis que la très-longue nuit, nuit de mort, & d’une gelée fiere & dix fois redoublée, est suspendue sur leurs têtes, & tombe avec