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signes célestes donnerent lieu à inventer la Peinture & l’Ecriture. On trouvera les preuves de cette hypothese dans le IV. tome du spectacle de la nature, & plus-au-long encore dans le I. tome de l’histoire du ciel. On ne sauroit disconvenir que ses conjectures ne soient extrèmement ingénieuses, & qu’elles n’ayent même au premier coup-d’œil un air de simplicité qui plaît. On voit éclore l’idolatrie & tous les immenses détails de principes faciles, & qui réduisent l’origine de toutes les superstitions & de toutes les fables à des observations physiques faites d’abord pour les besoins de l’homme & la culture de la terre, mais ensuite méconnues à cause des figures symboliques, dont elles étoient accompagnées & transportées à des usages tout différens. Cependant on a proposé dans divers journaux des objections à M. Pluche sur son hypothese, que ses réponses ne paroissent pas avoir entierement levées. Certaines conformités l’avoient frappé, & elles sont effectivement frappantes, mais il n’a défriché qu’une très-petite partie d’un champ immense dont on ne sauroit venir à bout avec ces seuls principes. D’ailleurs la science des étymologies qui fait la principale & souvent l’unique base de ses hypotheses, est sujette à difficulté & remplie d’équivoques.

Ainsi lorsqu’on dit qu’une étoile est dans tel ou tel signe du zodiaque, on n’entend pas par-là qu’elle est dans la constellation qui porte le même nom, mais dans la partie du zodiaque qui a gardé le nom de cette constellation. Voyez Signe, Etoile, &c.

M. Cassini a appellé zodiaque des cometes une grande bande céleste que la plupart des cometes n’ont pas passé. Cette bande est beaucoup plus large que le zodiaque des planetes, & renferme les constellations d’Antinous, de Pegase, d’Andromede, du Taureau, d’Orion, de la Canicule, de l’Hidre, du Centaure, du Scorpion & du Sagittaire. Au reste, on a reconnu qu’il n’y a point de zodiaque des cometes, ces corps étant indifféremment placés dans la vaste étendue des cieux. Voyez Comete. Chambers.

Zodiaque, (Littér.) M. Pluche, auteur de l’histoire du ciel, fait remonter jusqu’au voisinage du déluge de Noé & jusqu’au tems où l’Egypte n’étoit point encore habitée, l’institution du zodiaque sous la même forme qu’il conserve aujourd’hui parmi nous, & il tâche d’établir que les premiers hommes arrivés en Egypte y apporterent de la Chaldée le même zodiaque, dont les Egyptiens, les Grecs & les Latins se sont servis, & dont nous nous servons nous-mêmes. Comme il semble poser ce principe pour fondement de son système sur les années égyptiennes & sur les antiquités de l’Egypte en général, en déclarant d’avance que s’il y a quelque chose de solide dans son ouvrage, il en est redevable à cette explication du zodiaque, nous croyons pouvoir transcrire ici l’examen qu’en a fait M. de la Nauze.

Macrobe cherchant les raisons de la dénomination donnée aux signes du Cancer & du Capricorne, avoit dit qu’à l’exemple de l’Ecrevisse qui marche à reculons, le Soleil arrivé au Cancer rétrograde & descend obliquement ; & de l’exemple de la Chevre qui en broutant gagne les hauteurs, le Soleil parvenu au Capricorne commence à remonter vers nous. Sur ce plan d’analogie, l’écrivain de l’histoire du ciel imagine à son tour la dénomination des autres signes, & il prétend que les instituteurs du zodiaque ont réellement voulu marquer la saison des agneaux par le Bélier à l’équinoxe du printems, l’égalité des jours & des nuits par la Balance à l’équinoxe d’automne, le tems de la moisson par la Vierge tenant un épi, le tems des pluies d’hiver par le Verseau, ainsi du reste.

Or comme les pluies n’ont point lieu en Egypte,

que la moisson s’y fait dans une saison différente de celle où le Soleil est dans la Vierge, & qu’en un mot l’ordre que les signes expriment n’est pas celui du climat égyptien, de-là il infere que le zodiaque n’a point pris naissance en Egypte, qu’il y a été porté d’ailleurs, qu’il a été inventé avant qu’il y eut de colonie égyptienne sur les bords du Nil ; que ce sont les premiers habitans de la Chaldée qui, avant leur dispersion, ont donné aux maisons du Soleil les noms qu’elles portent, & que les signes d’été, par exemple, furent dès-lors comme ils l’ont été depuis l’Ecrevisse, le Lion, la Vierge, & les signes d’automne la Balance, le Scorpion, le Sagittaire, ainsi des autres.

Cette idée paroît à M. de la Nauze tout à-fait insoutenable, parce que dans ces tems reculés qui remontent au-moins à quatre mille ans d’antiquité, la constellation de l’Ecrevisse étoit dans les signes du printems, celle de la Balance dans les signes d’été, celle du Capricorne dans les signes d’hiver. C’est ce qui est démontré par le calcul du mouvement propre des étoiles fixes, qui, de l’aveu de tous les Astronomes modernes, doit être reglé sur le pié d’environ un degré de signe en 72 ans ; par exemple, prenons la constellation du Bélier dont la derniere étoile, celle de l’extrémité de la queue, est plus orientale de 50 degrés que le point équinoxal ne l’étoit en l’année 1740. Les 50 degrés du mouvement de l’étoile à 72 ans par degrés font trois mille six cens ans, qui se sont écoulés depuis que l’équinoxe a commencé d’entamer la constellation appellée aujourd’hui Bélier. Il ne l’avoit donc pas entamée encore il y a quatre mille ans, & par conséquent elle étoit alors dans les signes d’hiver.

Pendant le cours de ces quatre mille ans, les étoiles ont avancé de 55 degrés par rapport aux équinoxes, d’où il suit que les pléiades, qui font partie de la constellation du Taureau & qui sont présentement à 55 degrés de l’équinoxe, lui répondoient exactement il y a 4000 ans, dans ce tems-là ; donc le Taureau ouvroit le printems. Ainsi qu’on ne dise point que le Bélier a été dès-lors comme il le fut depuis le premier signe du printems ; car enfin il n’est pas possible d’imaginer que les auteurs du zodiaque ayent jamais prétendu placer les constellations hors de leurs propres signes.

Il est vrai qu’aujourd’hui elles se trouvent à-peu-près dans les signes précédens, le Belier dans le Taurus, le Taureau dans les Gemini, &c. Il est encore vrai dans un sens qu’elles se sont autrefois trouvées dans les signes subséquens, c’est-à-dire, par exemple, que la constellation qui porte le nom du Bélier a été anciennement dans le signe d’hiver, appellé Pisces. Mais elles ne furent jamais dans les signes subséquens reconnus pour tels, ou, ce qui est le même, jamais on ne donna le nom de Bélier au premier signe du printems, pendant que la constellation du Bélier étoit encore dans les signes d’hiver il y a quatre mille ans. Il est évident au contraire qu’entre cet ancien tems & celui d’à-présent, il y a eu un tems intermédiaire où les constellations ont répondu à leurs signes avec le plus grand rapport possible, & que c’est dans ce tems intermédiaire qu’a été institué le zodiaque des Grecs, qui ensuite a passé des Latins jusqu’à nous. Il demeure donc prouvé que notre zodiaque n’a point été en usage à beaucoup près avant que l’Egypte fut habitée, & qu’on n’a point dû établir sur un fondement pareil les antiquités de l’Egypte en général & l’origine des années égyptiennes en particulier.

La différence du zodiaque égyptien & du zodiaque grec n’est-elle pas d’ailleurs bien certaine ? Achillès Tatius a déja observé que les Grecs transporterent à leurs héros & à leur histoire le nom des constel-