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a la voix belle ; butté, qui a des nodus aux jointures des jambes.

Les chiens sont sujets à la galle, au flux de sang, aux vers, à des maux d’oreilles, sur-tout à la rage, &c. Voy. dans les auteurs de chasse la maniere de les traiter.

Chien de berger. Cet animal est quelquefois plus précieux que celui dont il est le gardien. Il faut le choisir hardi, vif, vigoureux, velu ; l’armer d’un collier, & l’attacher à sa personne & aux bestiaux par les carresses & par le pain.

Les Grecs & les Romains dressoient leurs chiens avec soin. Xénophon n’a pas dédaigné d’entrer dans quelque détail sur la connoissance & l’éducation de ces animaux. Les Grecs faisoient cas des chiens Indiens, Locriens, & Spartiates. Les Romains regardoient les Molosses comme les plus hardis ; les Pannoniens, les Bretons, les Gaulois, les Acarnaniens, &c. comme les plus vigoureux ; les Crétois, les Etoliens, les Toscans, &c. comme les plus intelligens ; les Belges, les Sicambres, &c. comme les plus vîtes.

On immoloit le chien à Hécate, à Mars, & à Mercure. Les Egyptiens l’ont révéré jusqu’au tems où il se jetta sur le cadavre d’Apis tué par Cambise. Les Romains en sacrifioient un tous les ans, parce que cet animal n’avoit pas fait son devoir lorsque les Gaulois s’approcherent du capitole. Il est fait mention d’un peuple d’Ethiopie gouverné par un chien, dont on étudioit l’abboiement & les mouvemens dans les affaires importantes. Le chien de Xantipe pere de Périclès, fut un héros de la race : son maître s’étant embarqué sans lui pour Salamine, l’animal se précipita dans les eaux, & suivit le vaisseau à la nage. Le chien est le symbole de la fidélité. L’attachement que quelques-uns ont pour cet animal va jusqu’à la folie. Henri III. aima les chiens mieux que son peuple. Je me souviendrai toûjours, dit M. de Sully, de l’attitude & de l’attirail bisarre où je trouvai ce prince un jour dans son cabinet : il avoit l’épée au côte, une cape sur les épaules, une petite toque sur la tête, un panier plein de petits chiens pendu à son cou par un large ruban ; & il se tenoit si immobile, qu’en nous parlant il ne remua ni tête, ni pié, ni main. Les Mahométans ont dans leurs bonnes villes des hôpitaux pour ces animaux ; & M. de Tournefort assûre qu’on leur laisse des pensions en mourant, & qu’on paye des gens pour exécuter les intentions du testateur. M. Leibnitz (Hist. acad. 1715.) a fait mention d’un chien qui parloit ; & l’histoire de ces animaux fourniroit des anecdotes très honorables pour l’espece.

Chiens. (Jurisprud.) Ceux qui ont des chiens dangereux doivent les tenir à l’attache. L. 51. enim ff. de adilit. edict. l. 1. ff. si quadrup. paup. Le maître est tenu de payer des dommages & intérêts pour la morsure faite par son chien. Arrêt du 18 Juin 1688. Journ. des aud.

Celui qui les anime est tenu du dommage. Leg. item Melaff. ad leg. Aquil.

Celui qui a été mordu d’un chien n’a aucune action contre le maître, si l’on prouve qu’il l’a provoqué. Bouvot, tom. I. verbo bétail, quæst. ij. Voyez l’art. Chasse. (A)

Chien, (Matiere médicale & Pharmacie.) Le petit chien ouvert & appliqué tout chaud sur la tête, est recommandé par d’excellens praticiens dans les douleurs violentes de cette partie, dans celles même qui sont censées dépendre de l’affection des parties intérieures ; savoir du cerveau, & de ses membranes. On l’applique de la même façon sur le côté affecté dans la pleurésie. Ce remede de bonne femme, peut-être trop négligé aujourd’hui, ainsi que la plûpart des applications extérieures, a produit quelquefois de bons effets dans l’un & dans l’autre de ces deux cas.

La graisse de chien passe pour plus atténuante, plus détersive, & plus vulnéraire que la plûpart des

autres graisses ; elle est recommandée extérieurement dans les douleurs de la goutte, & dans celles des oreilles ; dans la galle & la gratelle ; dans la dureté d’oreille, &c. Quelques auteurs l’ont recommandée aussi intérieurement dans les ulceres du poûmon.

Les gants de peau de chien passent pour dissiper les contractions des mains, pour adoucir la peau de cette partie, & pour en soulager les demangeaisons. On se sert aussi de bas de peau de chien, dans les mêmes vûes, & dans celles de fortifier les jambes, & d’en prévenir l’enflure, l’engorgement, & les varices, &c. Voyez Varice.

La crotte ou l’excrément de chien, connu plus communément dans les boutiques des Apoticaires, sous le nom de album græcum, album canis, se prépare, selon la Pharmacopée de Paris, de la maniere suivante.

Prenez de la crotte d’un chien nourri d’os, autant que vous voudrez, faites-la secher, & la réduisez en poudre fine sur le porphyre, avec l’eau distillée de bursa pastoralis, & formez-en de petits trochisques.

La prescription de cette eau distillée peut être regardée comme une double inutilité ; car premierement cette eau ne possede aucune vertu particuliere ; elle est exactement dans la classe des eaux distillées parfaitement insipides & inodores. Secondement, l’eau employée à la préparation de l’album canis, doit en être ensuite absolument chassée par la dessication. De bonne eau pure y est par conséquent aussi propre que l’eau distillée la plus riche en parties actives.

Plusieurs auteurs, & entr’autres Etmuller, ont donné beaucoup de propriétés à l’album græcum ; ils l’ont célebré comme étant sudorifique, atténuant, fébrifuge, vulnéraire, émollient, hydragogue, spécifique dans les écroüelles, l’angine, & toutes les maladies du gosier, employé tant extérieurement qu’intérieurement, &c. On ne s’en sert guere parmi nous que dans les angines ; on le mêle dans ce cas à la dose d’un demi-gros ou d’un gros, dans un gargarisme approprié.

L’album græcum n’est proprement qu’une terre animale, & par conséquent absorbante, analogue à l’ivoire préparé, à la corne de cerf philosophiquement préparée, &c. Les humeurs digestives du chien & l’eau employée aux lotions de cet excrément dans sa préparation, ont épuisé les os machés & avalés par le chien, ou en ont dissous la substance lymphatique, à-peu-près de la même façon que l’eau bouillante a épuisé la corne de cerf dans sa préparation philosophique. On ne voit donc pas quel avantage il pourroit avoir au-dessus des autres substances absorbantes de la même classe.

Les petits chiens entrent dans une composition pharmaceutique, très-connue sous le nom d’huile de petits chiens ; en voici la dispensation tirée de la Pharmacopée de Paris.

Prenez trois petits chiens nouvellement nés ; jettez-les tous vivans dans trois livres d’huile d’olive bien chaude, & faites les cuire dans cette huile jusqu’à ce que leurs os paroissent presque dissous. Alors passez cette huile à-travers une toile, en exprimant fortement ; après quoi vous y ajoûterez, pendant qu’elle est encore toute chaude, des sommités d’origan, de serpolet, de poüiilot, de millepertuis, de marjolaine, de chacune deux onces ; mettant le tout dans une cruche bien fermée, que vous exposerez au soleil pendant quinze jours, au bout desquels vous passerez le mêlange, le laisserez reposer pour le clarifier, & garderez l’huile pour l’usage. Cette préparation est recommandée dans toutes les douleurs, les tensions, & les contractions des membres, particulierement dans la sciatique & les rhumatismes. Mais ces vertus lui sont communes avec toutes les