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donc trop achetée par le sang Chrétien qui couloit sous le glaive homicide des tyrans ? Si les Anglois ne regrettent pas des flots de sang dans lesquels ils prétendent avoir noyé l’idole du despotisme, s’ils croyent s’en être dédommagés par l’heureuse constitution de leur gouvernement, dont la liberté politique est l’ame ; pense-t-on que le Christianisme puisse laisser des regrets dans le cœur des peuples qui l’ont reçû, quoiqu’il ne s’y soit cimenté que par le sang de plusieurs de ses enfans ? Non sans doute ; il a produit dans la société trop de bien, pour qu’elle ne lui pardonne pas quelques maux nécessairement occasionnés par son établissement.

Que prétend-on faire signifier à ces mots, que la religion ancienne est liée à la constitution d’un état, & que la nouvelle n’y tient point ? Si cette religion est mauvaise, dès-lors son vice intérieur influe sur la constitution même de l’état à laquelle elle se lie ; & par conséquent il importe au bonheur de cet état que sa constitution soit changée, puisqu’il n’y a de bonne constitution que celle qui conserve les mœurs. M’alléguerez-vous la nature du climat, auquel se refuse le Christianisme ? Mais quand il seroit vrai qu’il est des climats où la Physique a une telle force que la Morale n’y peut presque rien, est-ce une raison pour l’en bannir ? Plus les vices du climat sont laissés dans une grande liberté, plus ils peuvent causer de desordres ; & par conséquent c’est dans ces climats que la religion doit être plus réprimante. Quand la puissance physique de certains climats viole la loi naturelle des deux sexes, & celle des êtres intelligens ; c’est à la religion à forcer la nature du climat, & à rétablir les lois primitives. Dans les lieux de l’Europe, de l’Afrique, & de l’Asie, où habite aujourd’hui la mollesse Mahométane, & qui sont devenus pour elle des séjours de volupté, le Christianisme avoit su autrefois y forcer la nature du climat, jusqu’au point d’y établir l’austérité, & d’y faire fleurir la continence, tant est grande la force qu’ont sur l’homme la religion & la vérité. Voyez Religion.

CHRISTIANOPLE, (Géog.) ville forte de Suede, capitale de la Blekingie, avec un port sur la mer Baltique. Long. 34. 12. lat. 56. 20.

CHRISTIANSAND, (Géog.) petite ville fortifiée, avec un port dans la Norwege.

CHRISTIANSBOURG, (Géog.) ville d’Allemagne, dans le cercle de Basse-Saxe, au comté d’Oldenbourg sur le Jade.

CHRISTIANSTADT, (Géog.) petite ville de Suede dans la Blekingie, sur la Schouwen. Long. 32. 5. lat. 56. 3.

Christianstadt, (Géog.) petite ville d’Allemagne, dans le cercle de Haute-Saxe, dans la Lusace, sur le Bober.

CHRISTINCHAM, (Géog.) petite ville de Suede, dans la province de Wermeland.

CHRISTINE-STADT, (Géog.) petite ville & port de Suede en Finlande, dans la province de Cajanie, à l’orient du golfe de Bothnie.

CHRISTOLYTES, s. m. pl. (Hist. ecclés.) hérétiques qui s’éleverent dans le vj. siecle & qu’on nomma ainsi du Grec Χριϛος Christ ; & λυο délier, séparer, parce qu’ils séparoient la divinité de Jesus-Christ d’avec son humanité, soûtenant que le fils de Dieu, après sa résurrection, étant descendu aux enfers y laissa son corps & son ame, & ne monta au ciel qu’avec la seule divinité. S. Jean de Damas est le seul auteur ancien qui ait parlé de cette secte, qui ne paroît pas avoir été fort étendue. (G)

CHRISTOPHE, (Saint) Géog. île de l’Amérique, l’une des Antilles, appartenant aux Anglois, qui y ont plusieurs forts. Long. 315. lat. 17. 30.

CHRISTOPHLE-DE-VATAN, (Saint) Géog. petite ville de France dans l’Orléanois, au pays de Romorantin.

* CHROME, s. m. (Belles-Lett.) en Rhétorique, signifie couleur, raison spécieuse, prétextes, qu’employe un orateur, au défaut des motifs solides & fondés. Ce mot est originairement Grec ; χρομα signifie à la lettre couleur.

CHROMATIQUE, adj. (Musique.) genre de Musique qui procede par plusieurs semi-tons de suite. Ce mot vient du Grec χρῶμα qui signifie couleur, soit parce que les Grecs marquoient ce genre par des caracteres rouges ou diversement colorés, soit parce que le genre chromatique est moyen entre les deux autres, comme la couleur entre le blanc & le noir ; ou selon d’autres, parce que le genre chromatique varie & embellit le genre diatonique par ses semi-tons, qui font dans la Musique le même effet que la variété des couleurs fait dans la peinture.

Boece attribue à Timothée de Milet l’invention du genre chromatique ; mais Athenée la donne à Epigonus.

Aristoxene divise ce genre en trois especes, qu’il appelle molle, hemiolion & tonicum. Ptolomée ne le divise qu’en deux ; molle ou anticum, qui procede par de plus petits intervalles ; & intensum, dont les intervalles sont plus grands. Nous expliquerons au mot Genre le chromatique des Grecs ; quant aux modifications que ce même genre recevoit dans ses especes, c’est un détail qu’il faut chercher dans les auteurs mêmes.

Aujourd’hui le genre chromatique consiste à donner une telle marche à la basse fondamentale, que les diverses parties de l’harmonie puissent procéder par semi-tons, tant en montant qu’en descendant, ce qui ne convient guere qu’au mode mineur, à cause des altérations auxquelles la sixieme & la septieme note y sont sujettes par la nature même du mode.

La route la plus commune de la basse fondamentale, pour engendrer le chromatique ascendant, est de descendre de tierce & remonter de quarte alternativement, portant par-tout la tierce majeure. Si la même basse fondamentale procede de dominante tonique en dominante tonique, par des cadences parfaites évitées, elle engendrera le chromatique descendant.

Comme on change de ton à chaque note, il faut borner ces successions, de peur de s’égarer. Pour cela, on doit se souvenir que l’espace le plus convenable pour les mouvemens chromatiques est entre la dominante & la tonique en montant, & entre la tonique & la dominante en descendant. Dans le mode majeur on peut encore descendre chromatiquement de la dominante sur la seconde note. Ce passage est fort commun en Italie ; & malgré sa beauté, il commence à l’être un peu trop parmi nous.

Le genre chromatique est admirable pour exprimer la douleur & l’affliction ; il est encore plus énergique en descendant : on croit alors entendre de véritables gémissemens. Chargé de son harmonie, ce genre devient propre à tout : mais semblable à ces mets délicats, dont l’abondance rassassie bientôt ; autant il nous enchante, sobrement ménagé, autant devient-il rebutant entre les mains des Musiciens qui le prodiguent à tout propos. (S)

* CHRONIQUE, s. f. histoire succinte où les faits abregés qui se sont passés pendant une portion de tems plus ou moins grande, sont rangés selon l’ordre de leurs dates. Pour se faire une idée juste, non de ce que c’est qu’une chronique, mais de ce que ce devroit être, il faut considérer l’histoire, ou comme embrassant dans sa relation tout ce qui s’est passé pen-