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étoit proche du soleil, la vapeur s’élevoit prodigieusement vîte ; & continuant ensuite de monter en souffrant du retardement dans son mouvement par la gravité de ses particules, elle augmentoit la longueur de la queue : & cette queue, malgré l’immensité de son étendue, n’étoit autre chose qu’une simple vapeur exhalée pendant le tems du périhelie ; la vapeur qui s’étoit élevée la premiere, & qui composoit l’extrémité de la queue, ne s’évanoüit que lorsqu’elle fut trop loin du soleil pour réfléchir une lumiere sensible.

On voit aussi que les queues des cometes qui sont plus courtes, ne s’élevent pas d’un mouvement prompt & continuel pour disparoître tout de suite ; mais que ce sont des colonnes permanentes de vapeurs qui sortent de la tête avec un mouvement très-modéré pendant un grand espace de tems, & qui en participant du mouvement qu’elles ont d’abord reçû de la tête, continuent à se mouvoir avec facilité dans les espaces célestes ; d’où l’on peut aisément inférer le vuide de ces espaces. Voy. Vuide.

5°. Les queues paroissent les plus grandes & les plus brillantes immédiatement après qu’elles ont passé près du soleil. Cela suit de ce que le corps central étant alors le plus échauffé doit exhaler le plus de vapeurs.

La lumiere du noyau ou étoile apparente de la comete, fait conclure que ces astres sont dans notre système, & qu’ils ne sont en aucune maniere dans la région des fixes, puisque dans ce cas leurs têtes ne seroient pas plus éclairées par le soleil, que les planetes ne le sont par les étoiles fixes.

6°. Les queues déclinent un peu de la ligne tirée par le soleil & par la comete, en se rapprochant vers le côté que la comete vient de quitter ; parce que toute fumée ou vapeur poussée par un corps en mouvement s’éleve obliquement, en s’éloignant un peu du côté vers lequel va le corps fumant.

7°. Cette déviation est plus petite auprès du corps de la comete que vers l’extrémité de la queue, & est la moindre lorsque la comete est dans sa plus petite distance au soleil ; parce que la vapeur monte avec plus de vîtesse auprès du corps de la comete qu’à l’extrémité de la queue, & qu’elle s’éleve aussi avec plus de vîtesse lorsque la comete est plus proche du soleil.

8°. La queue est plus brillante & mieux terminée dans sa partie convexe que dans sa partie concave ; parce que la vapeur qui est dans la partie convexe s’étant élevée la premiere, est un peu plus dense & plus propre à réfléchir la lumiere.

9°. La queue paroît plus large vers l’extrémité qu’auprès de la tête ; parce que la vapeur qui est dans un espace libre se raréfie & se dilate continuellement.

10°. Les queues sont transparentes, parce qu’elles ne sont que des vapeurs très déliées, &c.

On voit donc que cette hypothese sur les queues des cometes s’accorde avec tous les phénomenes.

Phases des cometes. Le noyau, qu’on appelle aussi corps ou tête de la comete, étant regardé au-travers d’un télescope, paroît d’une forme différente de celle des étoiles fixes ou des planetes.

Sturmius rapporte qu’en observant la comete de 1680 avec un télescope, il la trouva moins lumineuse vers les bords que dans le centre, & qu’elle lui parut plûtôt ressembler à un charbon enflammé d’un feu obscur, ou à une masse informe de matiere éclairée par une lumiere accompagnée de fumée, qu’à une étoile ronde & d’une lumiere vive.

Hevelius observant la comete de 1661, trouva que le corps étoit d’une lumiere jaunâtre, brillante, & terminée, mais sans étinceler, ayant dans le milieu un noyau rougeâtre de la grosseur de Jupiter, & environné d’une matiere beaucoup plus rare. Le 5 Février sa tête étoit un peu plus foncée & plus brillan-

te que la couleur d’or, mais d’une lumiere plus sombre

que le reste des étoiles : de plus le noyau lui parut divisé en plusieurs parties. Le 6 le disque étoit diminué, le noyau toûjours existant, mais moindre qu’auparavant : une de ces parties dont on vient de parler, celle qui étoit au bas de la comete & sur la gauche, sembloit plus dense & plus lumineuse que le reste : le corps entier étoit rond, & représentoit une étoile très-peu lumineuse, & le noyau paroissoit toûjours environné d’une matiere différente de la sienne. Le 10 la tête de la comete étoit un peu obscure, & le noyau moins terminé, mais plus brillant vers le haut que vers le bas. Le 13 la tête étoit fort diminuée, tant en grandeur qu’en lumiere. Le 2 Mars sa rondeur étoit altérée, & ses bords dentelés, &c. Le 28 Mars elle étoit très-pâle, & extrèmement rare, sa matiere fort dispersée, & sans noyau distingué du reste.

Weigelius qui en observant la comete de 1664, vit dans le même moment la lune & un petit nuage éclairé par le soleil, trouva que la comete, au lieu d’être d’une lumiere continue comme la lune, ressembloit au contraire à une espece de nuage : c’est ce qui lui avoit fait conclure que les cometes étoient, ainsi que les taches du soleil, des exhalaisons de cet astre. La longueur de la queue des cometes est variable ; celle de 1680, suivant Sturmius, n’avoit guere le 20 Décembre que vingt degrés de longueur : en peu de tems elle s’accrut jusqu’à soixante degrés ; ensuite elle diminua très-sensiblement. Wolff.

Formation des queues des cometes. M. Newton a fait voir que l’atmosphere des cometes peut fournir une vapeur suffisante pour former leurs queues ; il se fonde sur l’extrème dilatation de l’air à une certaine distance de la terre ; un pouce cube d’air commun élevé à la distance d’un demi-diametre de la terre, seroit suffisant pour remplir un espace aussi grand que toute la région des étoiles, c’est ce qu’a démontré M. Gregory dans son Astronomie physique. Puis donc que la chevelure ou l’atmosphere de la comete est dix fois plus haute que la surface du noyau, elle doit être prodigieusement rare, & il est tout simple qu’on voie les étoiles au-travers.

Quant à l’ascension des vapeurs qui forment la queue des cometes, Newton la suppose occasionnée par la raréfaction de l’atmosphere au tems du périhelie. La fumée comme tout le monde sait, s’éleve par l’impulsion de l’air dans lequel elle nage ; l’air le plus raréfié monte par la diminution de sa pesanteur spécifique, & enleve avec lui la fumée. Pourquoi ne supposeroit-on pas que la queue d’une comete seroit élevée de la même maniere par la chaleur du soleil ?

Les queues étant ainsi produites, la force qu’elles ont pour conserver leur mouvement & celle qui les pousse vers le soleil, les oblige à décrire des ellipses ainsi que la comete même, & à l’accompagner dans toute son orbite. En effet, la gravitation des vapeurs vers le soleil, n’est pas plus propre à détacher la queue d’une comete de sa tête & à la faire tomber sur le soleil, qu’à détacher la terre de son athmosphere ; mais leur gravitation commune est cause qu’elles se meuvent également, & qu’elles sont poussées de la même maniere.

Par ce moyen les queues des cometes produites pendant le tems de leurs périhelies, peuvent être entraînées avec ces astres dans les régions du ciel les plus reculées, & revenir ensuite avec les cometes au bout d’un grand nombre d’années : mais il est plus naturel qu’elles se détruisent peu-à-peu entierement, & qu’en se rapprochant du soleil les cometes en reprennent de nouvelles, d’abord très-peu sensibles, ensuite plus grandes par degrés jusqu’au périhelie, tems auquel elles reprennent toute leur grandeur, la comete étant alors le plus échauffée qu’il est possible.

Les vapeurs dont ces queues sont composées, se