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on n’osa pas les qualifier de rebelles ou de traîtres, on les appella simplement contrarians. On garde encore une liste de ceux qui entrerent dans ce parti, qu’on appelle le rôle des contrarians. Chambers. (H)

CONTRARIÉTÉ, s. f. (Jurispr.) appointement de contrariété, c’est lorsque les parties se trouvant contraires en fait, elles sont appointées à faire preuve respectivement de leurs faits.

Contrariété d’Arrêts, est un moyen & une voie de droit pour se pourvoir au grand-conseil contre un arrêt, lorsqu’il s’en trouve un précédent rendu dans un autre tribunal entre les mêmes parties, pour raison du même fait, dont les dispositions sont contraires en tout ou partie au premier arrêt.

La connoissance des contrariétés d’arrêts a été attribuée au grand-conseil, par édit du mois de Septembre 1552.

La forme en laquelle on y procede est que sur la requête qui lui est présentée, s’il trouve qu’il y ait une contrariété apparente, il accorde une commission pour assigner les parties. Cette commission surseoit l’exécution des deux arrêts ; & si par l’évenement le grand-conseil juge qu’il y a de la contrariété entre les deux arrêts, c’est toûjours le dernier qu’il casse, & il ordonne l’exécution du précédent.

Lorsque deux arrêts rendus dans une même cour, mais en deux chambres différentes, se trouvent contraires, on se pourvoit an grand-conseil, comme s’ils étoient émanés de deux cours différentes. Voyez l’ordonn. de 1667. tit. xxxv. art. 34. (A)

CONTRA-SCRIBA, s. m. (Hist. anc.) officier des grandes maisons Romaines dont la fonction, si nous la rapportons à celle de l’ἀντιγραφεὺς de Julius Pollux, étoit de recevoir les comptes de l’œconome dispensator, de les apostiller, & de les corriger ; fonction qui répond à celle qu’Isidore appelle revisor rationum, & que nous rendrions dans nos usages par celles de contrôlleur de la maison, contrôlleur de la bouche, &c. officiers connus dans la basse latinité sous le nom de contrarotulatores, chargés de l’examen des rôles. Mém. de l’acad. tome IX. (G)

CONTRASTE, s. m. en Peinture ; il consiste dans une position variée des objets présentés sous des formes agréables à la vûe.

Les groupes d’objets qui entrent dans la composition d’un tableau, doivent se contraster, c’est-à-dire ne se point ressembler par la forme, par les lumieres, par les couleurs ; parce que tel groupe qui seroit satisfaisant à tous les égards, deviendroit desagréable dans la répétition. Voyez Composition. Chaque figure doit contraster dans le groupe dont elle fait partie. Il n’y a point de regle fixe pour le contraste : le grand art du peintre consiste à le cacher. Cette manœuvre est une portion du génie & de la facilité donnée par la nature. Le balancement dans une figure seule peut lui-même faire contraste. Les draperies, les ciels, les ornemens, tout contribue au contraste, mais il n’est beau que quand il paroît nécessaire. Voyez de Piles, & le diction. de Peint.

On dit, ce groupe, cette figure, sont un beau contraste ; ce peintre fait bien contraster. (R)

CONTRASTER, v. act. c’est éviter les répétitions de choses pareilles pour plus grande variété, comme lorsqu’on mêle alternativement dans une façade des frontons cintrés & triangulaires, ainsi que M. Mansart l’a pratiqué à la place de Vendôme. (P)

CONTRAT, (Jurisp.) en général est une convention faite entre plusieurs personnes, par laquelle une des parties, ou chacune d’elles, s’oblige de donner ou de faire quelque chose, ou consent qu’un tiers donne ou fasse quelque chose, duorum vel plurium in idem placitum consensus.

Ainsi contrat en général & convention ne sont qu’une même chose ; & ce qui forme le contrat, c’est

le consentement mutuel & réciproque des parties contractantes ; d’où il suit que ceux qui ne sont pas en état de donner un consentement libre, ne peuvent pas faire de contrats, tels que les mineurs, les fils de famille, les imbécilles. Ceux qui sont détenus prisonniers ne peuvent pas non plus contracter, à moins qu’ils ne soient amenés entre deux guichets comme en lieu de liberté.

La plûpart des contrats tirent leur origine du droit des gens, c’est-à-dire qu’ils sont de tous les tems & de tous les pays, ayant été introduits pour l’arrangement de ceux qui ont quelques intérêts à regler ensemble ; tels sont les contrats de loüage, d’échange, de vente, de prêt, & plusieurs autres semblables que l’on appelle contrats du droit des gens, quant à leur origine, mais qui sont devenus du droit civil quant à la forme & aux effets.

Les contrats qu’on appelle du droit civil, sont ceux qui tirent leur origine du droit civil de chaque nation.

Chez les Juifs, dans les premiers siecles, les contrats se passoient devant des témoins & publiquement à la porte des villes, qui étoit le lieu où se rendoit la justice. L’Ecriture en fournit plusieurs exemples, entr’autres celui d’Abraham, qui acquit une piece de terre dans le territoire de Chanaan en présence de tous ceux qui entroient dans la ville d’Hebron. L’histoire de Ruth sait mention de quelque chose de semblable. Moyse n’avoit ordonné l’écriture que pour l’acte de divorce. Il y avoit cependant des contrats que l’on rédigeoit par écrit, & la forme de ceux-ci y est marquée dans le contrat de vente dont il est parlé au ch. xxxij. de Jérem. v. 10. « J’achetai de Hanaméel fils de mon oncle, dit ce prophete, le champ qui est situé à Anathoth, & je lui donnai l’argent au poids sept sicles & dix pieces d’argent ; j’en écrivis le contrat & le cachetai en présence des témoins, & lui pesai l’argent dans la balance, & je pris le contrat de l’acquisition cacheté, avec ses clauses, selon les ordonnances de la loi, & les sceaux qu’on avoit mis au-dehors, & je donnai ce contrat d’acquisition à Baruch, fils de Neri, fils de Mansias, en présence d’Hanaméel mon cousin-germain, & des témoins dont les noms étoient écrits dans le contrat d’acquisition ».

Vatable, sur ce passage, dit qu’il fut fait deux actes : l’un, qui fut plié & cacheté ; l’autre, qui demeura ouvert ; que dans le premier, qui tenoit lieu de minute ou original, outre le nom de la chose vendue & le prix, on inséra les conditions de la vente & le tems du rachat ou rémeré ; que pour les tenir secrettes & éviter toute fraude, on cacheta cet acte d’un sceau public, & qu’après qu’il fut cacheté les parties & les témoins signerent au dos ; qu’à l’égard de l’autre double, on le présenta ouvert aux témoins, qui le signerent aussi avec les contractans, comme on avoit coûtume de faire en pareille occasion.

Vatable ajoûte qu’en justice on n’avoit égard qu’au contrat cacheté ; que les contractans écrivoient eux-mêmes le contrat & le signoient avec les témoins ; qu’on se servoit pourtant quelquefois d’écrivains ou tabellions publics suivant ce passage, lingua mea calamus scriba velociter scribentis.

Les Grecs qui emprunterent leurs principales lois des Hébreux, en usoient aussi à-peu-près de même pour leurs contrats ; les Athéniens les passoient devant des personnes publiques, que l’on appelloit comme à Rome argentarii. Ces actes par écrit avoient leur exécution parée, & l’on n’admettoit point de preuve au contraire.

Les Romains, qui emprunterent aussi beaucoup de choses des Grecs, passoient leurs contrats devant