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Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 5.djvu/154

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positif, au lieu que le commandement d’honorer son pere & sa mere est de droit naturel. Le droit positif est sujet à changement ; mais le droit naturel est invariable, étant fondé sur la raison & la justice, qui sont immuables de leur nature.

Le droit positif est de deux sortes, savoir divin & humain.

On appelle droit positif divin, ce qu’il a plû à Dieu de commander aux hommes, soit qu’il leur en ait déclaré la raison, ou non. Pour qu’on puisse le qualifier droit divin, il faut que la révélation soit certaine, comme pour les autres points de morale & les articles de foi. Voyez Droit divin.

Le droit positif humain est ce qu’il a plû aux hommes d’établir entr’eux, soit avec raison, ou non ; mais étant établi il est raisonnable de l’observer, à moins qu’il ne fût contraire au droit naturel ou au droit divin.

On distingue deux sortes de droit positif humain : savoir celui qui est établi du consentement de plusieurs peuples, lequel forme un droit des gens, comme ce qui regarde le commerce, la navigation, la guerre ; & le droit positif humain particulier à un peuple, lequel forme un droit civil, & doit être établi par la puissance publique, souveraine du même peuple, après quoi tous les particuliers y sont obligés : tels sont les droits des mariages, des successions, des jugemens. Ces droits, quoique communs à la plûpart des peuples, sont réglés différemment par chacun d’eux. Voyez Droit des Gens & Droit naturel. (A)

Droit prétorien, chez les Romains étoit une jurisprudence fondée sur les édits des préteurs. On comprenoit aussi quelquefois sous ce terme les édits des édiles-curules, à cause que ces officiers étoient aussi qualifiés de préteurs. Les préteurs & les édiles accordoient par leurs édits certaines actions & priviléges que le droit civil refusoit ; ensorte que le droit prétorien étoit opposé au droit civil : par exemple, ceux qui ne pouvoient succéder comme héritiers, suivant le droit civil, prenoient en certains cas, en vertu du droit prétorien, la possession des biens, appellée en droit bonorum possessio.

Comme la fonction des préteurs étoit annale, leurs édits ne duroient aussi qu’un an, de même que les actions qui dérivoient de ces édits. Chaque nouveau préteur annonçoit par un nouvel édit gravé sur un carton blanc appellé album prætoris, qui étoit exposé au-dessus de sa porte, la maniere dont il exerceroit sa jurisdiction pendant son année. Le jurisconsulte Julien fit, par ordre de l’empereur Adrien, une compilation de tous ces édits, pour servir dorénavant de regle aux préteurs dans l’administration de la justice. Cette compilation fut appellée édit perpétuel. Voy. ci-apr. Edit des Édiles, Édit perpétuel, & Édit du Prêteur. (A)

Droit privé, est celui qui a directement pour objet l’intérêt des particuliers, considérés chacun séparément, & non collectivement.

Il est composé en partie du droit naturel, en partie du droit des gens, & du droit civil.

Ses dispositions s’étendent sur les personnes, sur les biens, sur les obligations & les actions. Voyez ce qui en est dit au digeste de justitiâ & jure, & aux institutes, eodem tit. Voyez aussi ce qui est dit du droit aux articles qui précedent & à ceux qui suivent. (A)

Droit public, est celui qui est établi pour l’utilité commune des peuples considérés comme corps politique, à la différence du droit privé, qui est fait pour l’utilité de chaque personne considérée en particulier & indépendamment des autres hommes.

Le droit public est général ou particulier.

On appelle droit public général, celui qui regle les

fondemens de la société civile, commune à la plûpart des états, & les intérêts que ces états ont les uns avec les autres.

Quelques-uns confondent le droit public général avec le droit des gens, ce qui n’est pourtant pas juste, du moins indistinctement ; car le droit des gens ayant, comme tout le droit en général, deux objets, l’utilité publique & celle des particuliers, se divise en droit public des gens & droit privé des gens : ainsi le droit public général est bien une partie du droit des gens, & la même chose que le droit public des gens ; mais il ne comprend pas tout le droit des gens, puisqu’il ne comprend pas le droit privé des gens. Voyez ci-devant Droit des Gens.

Le droit public particulier est celui qui regle les fondemens de chaque état ; en quoi il differe & du droit public général, qui concerne les liaisons que les différens états peuvent avoir entr’eux, & du droit privé ou particulier simplement, qui concerne chacun des membres d’un état séparément.

Ce droit public particulier est composé en partie des préceptes du droit divin & du droit naturel, qui sont invariables ; en partie du droit des gens, qui change peu, si ce n’est par une longue suite d’années ; & enfin il est encore composé d’une partie du droit civil de l’état qu’il concerne, c’est-à-dire de la partie de ce droit qui a pour objet le corps de l’état : ainsi une partie du droit public particulier est fondée sur les anciennes coûtumes écrites ou non écrites, sur les lois, ordonnances, édits, déclarations, chartres, diplomes, &c. Cette partie du droit public particulier étant fondée sur un droit positif humain, peut être changée, selon les tems & les conjonctures, par ceux qui ont la puissance publique.

L’objet du droit public particulier de chaque état, est en général d’établir & de maintenir cette police générale, nécessaire pour le bon ordre & la tranquillité de l’état ; de procurer ce qui est de plus avantageux à tous les membres de l’état, considérés collectivement ou séparément, soit pour les biens de l’ame, soit pour les biens du corps, ou pour les biens de la fortune.

La destination des hommes dans l’ordre de la providence, est de cultiver la terre, & d’aspirer au souverain bien. Les hommes qui habitent un même pays ayant senti la nécessité qu’ils avoient de se prêter un mutuel secours, se sont unis en société : c’est ce qui a formé les différens états.

Pour maintenir le bon ordre dans chacune de ces sociétés ou états, il a fallu établir une certaine forme de gouvernement ; & pour faire observer cette forme ou police générale, les membres de chaque société ou état ont été obligés d’établir au-dessus d’eux une puissance publique.

Cette puissance a été déférée à un seul homme ou à plusieurs, ou à tous ceux qui composent l’état, & en quelques endroits elle est perpétuelle ; dans d’autres ceux qui en sont revêtus, ne l’exercent que pendant un certain tems fixé par les lois : de-là vient la distinction des états monarchiques, aristocratiques, & démocratiques ou populaires.

Les droits de la puissance publique sont le pouvoir législatif ; le droit de faire exécuter les lois, ou d’en dispenser ; de rendre & faire rendre la justice ; d’accorder des graces, distribuer les emplois & honneurs ; instituer des officiers & les destituer, avoir un fisc ou patrimoine public, mettre des impositions, faire battre monnoie, permettre à certaines personnes de former ensemble un corps politique, régler les états, faire avec les étrangers des traités d’alliance, de navigation & de commerce ; faire fortifier les places, lever des troupes & les licencier, faire la guerre & la paix.

Ces droits s’étendent non-seulement sur ceux qui