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chevaux qu’on louoit 200 sesterces : d’autres pensent que les ducenarii étoient ceux qui levoient le deux centiéme denier, ou les officiers établis pour avoir l’inspection sur la levée de ce tribut. On rencontre fort souvent dans les inscriptions de Palmyre le titre de ducenaire. Chambers. (Q)

DUCHÉ, s. m. (Jurisprud.) est une seigneurie considérable, érigée sous le titre de duché, & mouvante immédiatement de la couronne.

Il y a deux sortes de duchés ; savoir, les duchés-pairies, & les simples duchés non-pairies : ces derniers sont héréditaires ou seulement personnels, quant au titre de duché, à la personne que le roi en a gratifié. Les uns & les autres peuvent être vérifiés au parlement ou n’avoir pas été vérifiés, ce qui opere une différence pour les prérogatives & droits qui y sont attachés.

Il y a aussi des duchés par simple brevet qui n’a point été suivi de lettres d’érection en duchés.

Les honneurs & droits de la pairie n’appartiennent qu’à ceux dont les duchés-pairies ont été érigées par lettres dûement vérifiées en parlement.

Les duchés-pairies & les duchés simples non-pairies qui ne sont pas enregistrées, ne donnent, en faveur de ceux qui en ont obtenu le brevet ou les lettres d’érection, d’autre prérogative que les honneurs du louvre & dans les maisons du Roi leur vie durant, & de même à leurs femmes ou veuves ; l’antiquité du duché donne le rang à la cour, comme l’antiquité de la pairie le donne au parlement.

Le plus ancien duché non-pairie est celui de Bar, mouvant de la couronne, lequel, de comté qu’il étoit d’abord, fut ensuite érigé en duché.

L’édit du mois de Juillet 1566, porte qu’il ne sera fait aucune érection de terres & seigneuries en duchés, marquisats ou comtés, que ce ne soit à la charge qu’elles seront réunies à la couronne, à défaut d’hoirs mâles.

Cette disposition n’est cependant pas toûjours observée ; il dépend du roi d’apposer telles conditions qu’il juge à-propos à l’érection, mais il faut une dérogation expresse à l’édit de 1566.

Comme les terres érigées en duché relevent immédiatement de la couronne, les seigneurs dont elles relevoient auparavant, sont en droit de demander une indemnité à celui qui a obtenu l’érection du duché.

La mouvance immédiate d’un duché étant une fois acquise à la couronne, ne retourne plus au précédent seigneur, même après l’extinction du titre de duché, suivant un arrêt du 28 Mars 1695.

L’édit du mois de Mai 1711, concernant les ducs & pairs, ordonne que ce qui est porté par cet édit pour les ducs & pairs, aura lieu pareillement pour les ducs non-pairs en ce qui peut les regarder. (A)

DUCHÉ-PAIRIE, (Jurisprud.) est tout à la fois un des grands offices de la couronne, un fief de dignité relevant de la couronne, & une justice seigneuriale du premier ordre avec titre de pairie. Ce n’est pas ici le lieu de traiter de tout ce qui appartient aux pairs & à la pairie en général, ainsi nous nous bornerons à ce qui est propre aux duchés-pairies, considérées sous les trois différens points de vûe que l’on a annoncés, c’est-à-dire comme office, fief, & justice.

On dit d’abord que les duchés-pairies sont de grands offices de la couronne. Les duchés, dont l’usage venoit des Romains, étoient dans les commencemens de la monarchie des gouvernemens de provinces que le roi confioit aux principaux seigneurs de la nation, que l’on appelloit d’abord princes, ensuite barons & ducs ou pairs. Ces ducs réunissoient en leur personne le gouvernement militaire, celui des finances, & l’administration de la justice. Ils jugeoient souve-

rainement au nom du roi, avec les principaux de la

ville où ils faisoient leur résidence, les appels des centeniers, qui étoient les juges royaux ordinaires. Un duché comprenoit d’abord douze comtés ou gouvernemens particuliers ; cette répartition fut depuis faite différemment. Le titre de duc étoit si déchu sur la fin de la premiere race, que pendant la seconde, & bien avant dans la troisieme, celui qui avoit un duché se faisoit appeller comte ; dans la suite les titres de ducs & de duchés reprirent le dessus. Les ducs cesserent de rendre la justice en personne, lorsqu’on institua les baillis & sénéchaux ; de sorte que présentement la fonction des ducs & pairs, comme grands officiers de la couronne, est d’assister au sacre du roi & autres cérémonies considérables, & de rendre la justice au parlement avec les autres personnes dont il est composé.

L’office de duc & pair est de sa nature un office viril ; il y a cependant eu quelques duchés-pairies érigées sous la condition de passer aux femelles à défaut de mâles : ces duchés sont appellés duchés-pairies mâles & femelles : il y en a même eu quelques-uns érigés pour des femmes ou filles, & ceux-ci ont été appellés simplement duchés femelles.

Anciennement les femmes qui possédoient une duché-pairie, faisoient toutes les fonctions attachées à l’office de pair. Blanche de Castille mere de S. Louis, pendant son absence, prenoit séance au parlement. Mahaut comtesse d’Artois étant nouvellement créée pair, signa l’ordonnance du 3 Octobre 1303 : elle assista en personne au parlement de 1314, pour y juger le procès du comte de Flandres & du roi Louis Hutin ; elle assista au sacre de Philippe V. dit le Long, en 1316, où elle fit les fonctions de pair, & y soûtint avec les autres la couronne du roi son gendre. Une autre comtesse d’Artois fit fonction de pair en 1364 au sacre de Charles V. Au parlement tenu le 9 Décembre 1378, pour le duc de Bretagne, la duchesse d’Orléans s’excusa par lettres de ce qu’elle ne s’y trouvoit pas. Présentement les femmes qui possedent des duchés-pairies, ne siégent plus au parlement : il en est de même en Angleterre, où il y a aussi des pairies femelles.

Les duchés-pairies considérées comme fiefs, sont des seigneuries ou fiefs de dignité qui relevent immédiatement de la couronne. Ces sortes de seigneuries tiennent le premier rang entre les offices de dignité.

Les premieres érections des duchés-pairies remontent au moins jusqu’au tems de Louis le Jeune ; d’autres les sont remonter encore plus haut ; c’est ce qui sera discuté plus amplement au mot Pairie.

Toutes les terres érigées en pairies n’ont pas le titre de duché : il y a aussi des comtés-pairies. Il y a eu plusieurs de ces comtés-pairies laïques, tels que le comté de Flandres, de Champagne, de Toulouse, & autres qui sont présentement réunis à la couronne.

Il y a encore trois comtés-pairies qui ont rang de duchés ; savoir, le comté de Beauvais, celui de Châlons, & celui de Noyon, qui forment les trois dernieres des six anciennes pairies ecclésiastiques.

Les autres seigneuries, soit comtés, marquisats, baronies ou autres qui sont érigées à l’instar des pairies, ne sont point des pairies proprement dites ; & si quelques-unes en portent le titre, c’est abusivement, n’ayant d’autre prérogative que de ressortir immédiatement au parlement, comme les duchés & comtés pairies dont on a parlé.

Depuis l’érection des grandes seigneuries en pairies, le titre de duc & pair est toûjours attaché à la possession d’une duché-pairie ; car la pairie qui étoit d’abord personnelle est devenue réelle.

L’édit du mois de Mai 1711, concernant les ducs & pairs, ordonne entr’autres choses, que par les ter-