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leur propre église, sans s’être présentés à leur évêque : ils ne pourroient le faire contre sa volonté ; & si c’est en sa présence, même dans leur église, ils doivent attendre sa bénédiction. Pour prêcher dans les autres églises ils ont besoin de sa permission, qui est révocable ad nutum.

Lorsque les exempts abusent de leurs priviléges, ils doivent en être privés, suivant la doctrine du concile de Latran, en 1215 ; de celui de Sens, en 1269 ; d’Avignon, en 1326 ; & de Saltzbourg, en 1386.

Ils peuvent même quelquefois en être privés sans en avoir abusé, lorsque les circonstances des tems, des lieux & des personnes exigent quelque changement. Voyez le traité de exemptionibus de Jacobus de Canibus, & celui de Baldus ; les Mémoires du Clergé, tom. l. & Vl. la Bibliot. can. tom. I. p. 603. Preuves des libertés, tom. II. ch. xxxviij. Fevret, traité de l’Abus, liv. III. ch. j. les Lois ecclésiastiques de d’Héricourt, part. I. ch. xj. (A)

EXEMPTIONS, (Finances.) c’est un privilége qui dispense d’une imposition, d’une contribution, ou de toute autre charge publique & pécuniaire, dont on devroit naturellement supporter sa part & portion.

Une exemption de cette espece est donc une exception à la regle générale, une grace qui déroge au droit commun.

Mais comme il est juste & naturel, que dans un gouvernement quelconque, tous ceux qui participent aux avantages de la société, en partagent aussi les charges ; il ne sauroit y avoir en finances d’exemption absolue & purement gratuite ; toutes doivent avoir pour fondement une compensation de services d’un autre genre, & pour objet le bien général de la société.

La noblesse a prodigué son sang pour la patrie ; voilà le dédommagement de la taille qu’elle ne paye pas. Voyez Taille, Noblesse.

Les magistrats veillent pour la sûreté des citoyens, au maintien du bon ordre, à l’exécution des lois ; leurs travaux & leurs soins compensent les exemptions dont ils jouissent.

Des citoyens aussi riches que desintéressés, viennent gratuitement au secours de la patrie, réparent en partie la rareté de l’argent, ou remplacent par le sacrifice de leur fortune, des ressources plus onéreuses au peuple ; c’est au peuple même à les dédommager par des exemptions qu’ils ont si bien méritées.

Des étrangers nous apportent de nouvelles manufactures, ou viennent perfectionner les nôtres ; il faut qu’en faveur des fabriques dont ils nous enrichissent, ils soient admis aux prérogatives des regnicoles que l’on favorise le plus.

Des exemptions fondées sur ces principes, n’auront jamais rien d’odieux ; parce qu’en s’écartant, à certains égards, de la regle générale, elles rentreront toûjours, par d’autres voies, dans le bien commun.

Ces sortes de graces & de distinctions, n’exciteroient & ne justifieroient les murmures du peuple, & les plaintes des citoyens, hommes d’état, qu’autant qu’il arriveroit que par un profit, par un intérêt pécuniare, indépendant d’une exemption très avantageuse, le bénéfice de la grace excéderoit de beaucoup les sacrifices que l’on auroit faits pour s’en rendre digne ; la véritable compensation suppose nécessairement de la proportion : il est donc évident que dès qu’il n’y en aura plus entre l’exemption dont on joüit, & ce que l’on aura fait pour la mériter, on est redevable du surplus à la société ; elle est le centre où tous les rayons doivent se réunir ; il faut s’en séparer, ou contribuer dans sa proportion à ses charges. Quelqu’un oseroit-il se dire exempt de coopérer au bien commun ? on peut seulement y concourir différemment, mais toûjours dans la plus exacte égalité.

S’il arrivoit que la naissance, le crédit, l’opulence, ou d’autres considérations étrangeres au bien public, détruisissent, ou même altérassent des maximes si précieuses au gouvernement, il en résulteroit, contre la raison, la justice & l’humanité, que certains citoyens joüiroient des plus utiles exemptions, par la raison même qu’ils sont plus en état de partager le poids des contributions, & que la portion infortunée seroit punie de sa pauvreté même, par la surcharge dont elle seroit accablée.

Que les exemptions soient toûjours relatives, jamais absolues, & l’harmonie générale n’en souffrira point la plus legere atteinte ; tout se maintiendra dans cet ordre admirable, dans cette belle unité d’administration, qui dans chaque partie, apperçoit, embrasse & soûtient l’universalité.

Ces principes ont lieu, soit que les exemptions portent sur les personnes, soit qu’elles favorisent les choses.

On n’exempte certains fonds, certaines denrées, certaines marchandises des droits d’entrée, de ceux de sortie, des droits locaux, qu’en faveur du commerce, de la circulation, de la consommation, & toûjours relativement à l’intérêt que l’on a de retenir ou d’attirer, d’importer ou d’exporter le nécessaire ou le superflu.

Il ne faut pas au surplus confondre les priviléges & les exemptions.

Toutes les exemptions sont des priviléges, en ce que ce sont des graces qui tirent de la regle générale les hommes & les choses à qui l’on croit devoir les accorder.

Mais les priviléges ne renferment pas seulement des exemptions.

Celles-ci ne sont jamais qu’utiles & purement passives, en ce qu’elles dispensent seulement de payer ou de faire une chose ; au lieu que les priviléges peuvent être à la fois utiles ou honorifiques, ou tous les deux ensemble, & que non-seulement ils dispensent de certaines obligations, mais qu’ils donnent encore quelquefois le droit de faire & d’exiger. Voyez Privilége pour le surplus des idées qui les distinguent & les caractérisent.

EXEQUATUR, s. m. (Jurisprud.) terme latin qui, dans le style des tribunaux, s’étoit long-tems conservé, comme s’il eût été françois. C’étoit une ordonnance qu’un juge mettoit au bas d’un jugement émané d’un autre tribunal, portant permission de le mettre à exécution dans son ressort ; c’étoit proprement un pareatis. Voyez Pareatis. (A)

EXERCICE, s. m. (Art. milit.) On entend par ce terme, dans l’art de la guerre, tout ce qu’on fait pratiquer aux soldats, pour les rendre plus propres au service militaire.

Ainsi l’exercice consiste non-seulement dans le maniement des armes & les évolutions, mais encore dans toutes les autres choses qui peuvent endurcir le soldat, le rendre plus fort & plus en état de supporter les fatigues de la guerre.

Dans l’usage ordinaire, on restraint le terme d’exercice au maniement des armes ; mais chez les Romains, on le prenoit dans toute son étendue. Les exercices regardoient les fardeaux, qu’il falloit accoûtumer les soldats à porter ; les différens ouvrages qu’ils étoient obligés de faire dans les camps & dans les siéges, & l’usage & le maniement de leurs armes.

Les fardeaux que les soldats romains étoient obligés de porter, étoient fort pesans ; car outre les vivres qu’on leur donnoit, suivant Cicéron, pour plus de quinze jours, ils portoient différens ustensiles, comme une scie, une corbeille, une bêche, une hache, une marmite pour faire cuire leurs alimens, trois ou quatre pieux pour former les retranchemens du