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Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 6.djvu/396

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supérieur que l’on distingue par son habit. Chaque fakir porte un cor, dont il sonne quand il arrive en quelque lieu & quand il en sort. Ils ont aussi une espece de racloir ou truelle pour racler la terre de l’endroit où ils s’asseyent & où ils se couchent. Quand ils sont en bande, ils partagent les aumônes qu’ils ont eues par égales parties, donnent tous les soirs le reste aux pauvres, & ne reservent rien pour le lendemain.

Il y a une autre espece de fakirs idolatres, qui menent le même genre de vie. M. d’Herbelot rapporte qu’il y a dans les Indes huit cents mille fakirs mahométans, & douze cents mille idolatres, sans compter un grand nombre d’autres fakirs, dont la pénitence & la mortification consistent dans des observances très-pénibles. Quelques-uns, par exemple, restent jour & nuit pendant plusieurs années dans des postures extrèmement génantes. D’autres ne s’asseyent ni ne se couchent jamais pour dormir, & demeurent suspendus à une corde placée pour cet effet. D’autres s’enferment neuf ou dix jours dans une fosse ou puits, sans manger ni boire : les uns levent les bras au ciel si long-tems, qu’ils ne peuvent plus les baisser lorsqu’ils le veulent ; les autres se brûlent les piés jusqu’aux os ; d’autres se roulent tout nuds sur les épines. Tavernier, &c. O miseras hominum mentes ! On se rappelle ici ce beau passage de saint Augustin : Tantus est perturbatæ mentis & sedibus suis pulsæ furor, ut sic dii placentur quemadmodum ne homines quidem sæviunt.

Une autre espece de fakirs dans les Indes sont des jeunes gens pauvres, qui, pour devenir moulas ou docteurs, & avoir de quoi subsister, se retirent dans les mosquées où ils vivent d’aumône, & passent le tems à l’étude de leur loi, à lire l’alcoran, à l’apprendre par cœur, & à acquérir quelque connoissance des choses naturelles.

Les fakirs mahométans conservent quelque reste de pudeur ; mais les idolatres vont tout nuds comme les anciens gymnosophistes, & menent une vie très-débordée. Le chef des premiers n’est distingué de ses disciples, que par une robe composée de plus de pieces de différentes couleurs, & par une chaîne de fer de la longueur de deux aunes qu’il traîne attachée à sa jambe. Dès qu’il est arrivé en quelque lieu, il fait étendre quelques tapis à terre, s’assied dessus, & donne audience à ceux qui veulent le consulter : le peuple l’écoute comme un prophete, & ses disciples ne manquent pas de le préconiser. Il y a aussi des fakirs qui marchent avec un étendart, des lances, & d’autres armes ; & sur-tout les nobles qui prennent le parti de la retraite, abandonnent rarement ces anciennes marques de leur premier état. D’Herbelot, biblioth. orient. & Chambers. (G)

FALACA, s. f. (Hist. mod.) bastonnade que l’on donne aux chrétiens captifs dans Alger. Le falaca est proprement une piece de bois d’environ cinq piés de long, troüée ou entaillée en deux endroits, par où l’on fait passer les piés du patient, qui est couché à terre sur le dos, & lié de cordes par les bras. Deux hommes le frappent avec un bâton ou un nerf de bœuf sous la plante des piés, lui donnent quelquefois jusqu’à 50 ou 100 coups de ce nerf de bœuf, selon l’ordonnance du patron & du juge, & souvent pour une faute très-legere. La rigueur des châtimens s’exerce dans tous pays en raison du despotisme. Art. de M. le Chevalier de Jaucourt.

* FALACER, (Mythol.) dieu des Romains, dont Varron ne nous a transmis que le nom. La seule chose que nous en sachions, c’est qu’entre les Flamens il y en avoit un qui étoit surnommé Flamen Falacer, de ce dieu passé de mode.

FALAISE, s. f. (Marine.) c’est ainsi qu’on appelle les côtes de la mer qui sont élevées & escarpées. (Z)

Falaise, (Géog.) Falesia, ville de France dans la basse Normandie, située sur le ruisseau d’Ante, entre Caën & Seez, & bâtie par les Normans, suivant l’abbé de Longuerue. Elle est renommée dans le pays par son commerce de serges, de toiles, & par la foire de Guibray l’un de ses fauxbourgs. Elle étoit déjà connue sous Guillaume le Conquérant, & elle est remarquable par la naissance de ce prince, par celle de Roch le Baillif surnommé la Riviere, medecin du roi, qui a publié les antiquités de la Bretagne armorique, & encore par la naissance de Gui le Fevre sieur de la Boderie, précepteur du duc d’Alençon frere d’Henri III, très-savant dans les langues orientales. Long. selon Cassini, 17d 19′ 23″. latit. 48d 53′ 28″. (D. J.)

FALAISER, v. n. la mer falaise, terme peu usité, pour dire que la mer vient frapper & se briser contre une falaise ou une côte escarpée. (Z)

FALARIQUE, s. f. (Art milit.) c’étoit une espece de dard composé d’artifice, qu’on tiroit avec l’arc contre les tours des assiégés pour y mettre le feu.

La falarique étoit beaucoup plus grosse que le malleolus, autre espece de dard enflammé, qui servoit à mettre le feu aux maisons ; lequel feu ne pouvoit s’éteindre avec de l’eau, mais seulement en l’étouffant avec de la poussiere.

Tite-Live en parlant du siége de Sagonte en Espagne, donne trois piés de long à la falarique ; mais Silius Italicus, en racontant le même siége, fait mention d’une falarique beaucoup plus terrible ; c’étoit une poutre ferrée à plusieurs pointes, chargée de feux d’artifice, qui étoit jettée par la catapulte ou par la baliste. Daniel, hist. de la milice franç. (Q)

FALBALA, s. m. bandes d’étoffe plissées & festonées, qui s’appliquent sur les robes & jupons des femmes. C’est la garniture des jupons qui est particulierement appellée falbala ; elle est connue aussi sous le nom de volans ; celle des robes s’appelle communément pretintaille. Les falbalas sont placés par étages autour du jupon ; cette mode est, dit-on, fort ancienne, mais le mot est nouveau.

On conte que deux de ces hommes chargés de modes & de ridicules, & qui se ruinent pour être aimables, traversoient les salles du palais ; les petites marchandes leur offrirent de tout selon l’usage : il n’existe rien, dit l’un, que l’on ne trouve ici ; vous y trouverez même, répondit l’autre, ce qui n’existe pas : inventez un mot qui ne soit qu’un son sans idée, toutes ces femmes y en attacheront une ; falbala fut le mot qui s’offrit, & des garnitures de robes furent présentées avec assûrance sous ce nom qui venoit d’être fait, & qu’elles porterent depuis. Voyez l’article Etymologie.

Les savans amateurs de l’antiquité feroient remonter, s’ils pouvoient, l’origine des falbalas jusqu’au déluge ; c’est bien assez pour l’honneur de cette mode, qu’elle ait passé des Perses aux Romains : divers législateurs ennemis du luxe l’ont, dit-on, condamnée ; mais les graces & le goût ne reçoivent de lois que de l’amour & du plaisir.

Cette grande roue du monde qui ramene tous les évenemens, ramene aussi toutes les modes, & fait reparoître aujourd’hui les falbalas avec plus d’éclat que jamais, les plus riches étoffes en sont ornées, les plus communes en reçoivent du relief, & toutes les femmes, les belles, les laides, les coquettes, & les prudes, ont des falbalas jusque sur leurs jupons les plus intimes : les dévotes même en portent sous le nom de proprété recherchée : on renonce plus facilement au plaisir d’aimer qu’au desir de plaire.

Falbala, en terme de Boutonnier, est une longueur de bouillon, attaché en demi-cercle à côté de la zone sur le roste, dans les espaces où le cerceau seul paroît.