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important que de trouver des ressources supérieures à la sévérité des lois, pour épargner les crimes & pour sauver à la république tant de sujets qu’on lui ôte ; je dis, rien ne seroit plus important que de trouver des ressources supérieures à la sévérité des lois, parce que l’expérience apprend que cette sévérité ne guérit point le mal. La loi d’Henri II. roi de France, qui condamne à mort la fille dont l’enfant a péri, en cas qu’elle n’ait point déclaré sa grossesse aux magistrats, n’a point été suivie des avantages qu’on s’étoit flaté qu’elle produiroit, puisqu’elle n’a point diminué dans le royaume le nombre des avortemens. Il faut puiser les remedes du mal dans l’homme, dans la nature, dans le bien public. Les états, par exemple, qui ont établi des hôpitaux pour y recevoir & nourrir, sans faire aucune enquête, tous les enfans trouvés & tous ceux qu’on y porte, ont véritablement & sagement détourné un prodigieux nombre de meurtres.

Mais comment parer aux autres avortemens ? c’est en corrigeant, s’il est possible, les principes qui y conduisent ; c’est en rectifiant les vices intérieurs du pays, du climat, du gouvernement, dont ils émanent. Le législateur éclairé n’ignore pas que dans l’espece humaine les passions, le luxe, l’amour des plaisirs, l’idée de conserver sa beauté, l’embarras de la grossesse, l’embarras encore plus grand d’une famille nombreuse, la difficulté de pourvoir à son éducation, à son établissement par l’effet des préjugés qui regnent, &c. que toutes ces choses, en un mot, troublent la propagation de mille manieres, & font inventer mille moyens pour prévenir la conception. L’exemple passe des grands aux bourgeois, au peuple, aux artisans, aux laboureurs qui craignent dans certains pays de perpétuer leur misere ; car enfin il est constant, suivant la reflexion de l’auteur de l’Esprit des Lois, que les sentimens naturels se peuvent détruire par les sentimens naturels mêmes. Les Amériquaines se faisoient avorter, pour que leurs enfans n’eussent pas des maîtres aussi barbares que les Espagnols. La dureté de la tyrannie les a poussées jusqu’à cette extrémité. C’est donc dans la bonté, dans la sagesse, dans les lumieres, les principes, & les vertus du gouvernement, qu’il faut chercher les remedes propres au mal dont il s’agit ; la Medecine n’y sait rien, n’y peut rien.

Séneque qui vivoit au milieu d’un peuple dont les mœurs étoient perdues, regarde comme une chose admirable dans Helvidia, de n’avoir jamais caché ses grossesses ni détruit son fruit pour conserver sa taille & sa beauté, à l’exemple des autres dames romaines. Nunquam te, dit-il à sa gloire, fœcunditatis tuæ quasi exprobaret ætatem, puduit ; nunquam more alienarum, quibus omnis commendatio ex formâ petitur, tumescentem uterum abscondisti, quasi indecens onus ; nec inter viscera tua, conceptas spes liberorum elisisti. Consolat. ad matrem Helviam, cap. xvj.

On rapporte que les Eskimaux permettent aux femmes, ou plûtôt les obligent souvent d’avorter par le secours d’une plante commune dans leur pays, & qui n’est pas inconnue en Europe. La seule raison de cette pratique, est pour diminuer le pesant fardeau qui opprime une pauvre femme incapable de nourrir ses enfans. Voyage de la baie d’Hudson, par Ellys.

On rapporte encore que dans l’île Formose il est défendu aux femmes d’accoucher avant trente ans, quoiqu’il leur soit libre de se marier de très-bonne heure. Quand elles sont grosses avant l’âge dont on vient de parler, les prêtresses vont jusqu’à leur fouler le ventre pour les faire avorter ; & ce seroit non-seulement une honte, mais même un péché, d’avoir un enfant avant cet âge prescrit par la loi. J’ai vû de ces femmes, dit Rechteren, voyages de la compagnie

holland. tom. V. qui avoient déjà fait périr leur fruit plusieurs fois avant qu’il leur fût permis de mettre un enfant au monde. Ce seroit bien là l’usage le plus monstrueux de l’Univers, si tant est qu’on puisse s’en rapporter au témoignage de ce voyageur. Article de M. le Chevalier de Jaucourt.

Fausse-coupe, s. f. (Coupe des pierres.) c’est la direction d’un joint de lit oblique à l’arc du ceintre, auquel il doit être perpendiculaire pour être en bonne coupe. Les joints CD, CD, (figure 13.) sont en bonne coupe, parce qu’ils sont perpendiculaires à la courbe, & les joints mn, mn, sont en fausse-coupe.

Lorsque la voûte est plate comme aux plates-bandes, ce doit être tout le contraire ; la bonne coupe doit être oblique à l’intrados, comme sont les joints mn, mn, (fig. 14.) au plat-fond AB, pour que les claveaux soient faits plus larges par le haut que par le bas ; car si les joints sont perpendiculaires à la platebande, les claveaux deviennent d’égale épaisseur & sont alors en fausse-coupe, & ne peuvent se soûtenir que par le moyen des barres de fer qu’on leur donne pour support, ou par une bonne coupe cachée sous la face à quelques pouces d’épaisseur, comme on en voit aux portes & aux fenêtres du vieux louvre à Paris, dont voici la construction. ABCD (fig. 15.) représente la face d’une plate-bande ; CD est l’intrados ; ABFE est l’extrados en perspective ; mn, mn, est la fausse-coupe apparente ; no, no, est la bonne coupe qui est enfoncée dans la plate-bande de la quantité mr de trois ou quatre pouces d’épaisseur, & occupe l’espace rst. La figure 2. représente la clé, & la figure 3. un des autres voussoirs, où l’on voit une partie concave nrst, propre à recevoir la partie convexe nrotv de la clé, & une partie convexe nrotv (figure 3.) propre à être reçue dans la cavité du voussoir prochain. (D)

Fausse-coupe, s. f. en terme d’Orfévre, est une maniere de vase détaché, orné de ciselure, où la coupe d’un calice paroît être emboîtée & retenue.

Fausse-énonciation, (Jurisprud.) est la même chose que faux-énoncé. Voyez ci-devant Faux-énoncé. (A)

Fausse-équerre, s. f. (Coupe des pierres.) on appelle ainsi ordinairement le compas d’appareilleur, quoiqu’il signifie en général un récipiangle, c’est-à-dire un instrument propre à mesurer l’ouverture d’un angle. Voyez Equerre. (D)

Fausse-étrave, (Marine.) c’est une piece de bois qu’on applique sur l’étrave en-dedans pour la renforcer. (Z)

Fausse-gourmette, (Manége.) Voyez Gourmette. (e)

Fausse-gourme, (Maréchallerie.) maladie plus dangereuse que la gourme même : elle attaque les chevaux qui n’ont qu’imparfaitement jetté. Voyez Gourme.

Fausses-lances ou Passe-volans, (Marine.) Ce sont des canons de bois faits au tour : on les bronze afin qu’ils ressemblent aux canons de fonte verte ; & que de loin on croye le vaisseau plus fort & plus en état de défense : les vaisseaux marchands se servent quelquefois de cette petite ruse.

Fausse-mesure, voyez Mesure.

Fausse-monnoie, voyez Monnoie.

Fausse-neige ou nage, terme de Riviere ; c’est une petite buche aiguisée par un bout, que l’on met entre les chantiers pour soûtenir la véritable neige.

Fausse-Page, (Imprimerie.) Voyez Page.

Fausse-plaque, terme d’Horlogerie ; il signifie en général une plaque posée sur la platine des piliers, & sur laquelle est fixé le cadran.

Dans les pendules, & même dans les montres angloises, cette plaque a de petits piliers, dont les pivots entrant dans la grande platine, forment entre