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pétuosité, & forme près de-là un lac brûlant. Son eau est, dit-il, plus chaude que l’eau bouillante. Varenius, cap. xvij. prop. 18. rapporte ces détails sur la foi d’un certain Caron, qui a été à la tête de la compagnie des Indes d’Hollande.

Près du lac de Côme dans le duché de Milan, à sept milles de la ville de Côme, est une fontaine que Pline le jeune a décrite au long, lib. IV. epistol. 30. elle hausse & baisse trois fois le jour par des retours périodiques. Deux historiens de la ville de Côme, Thomas Porcacchi & Benoît Jove, confirment ce qu’en dit Pline. Ils ajoûtent que près de celle ci que l’on nomme fontaine de Pline, est une autre source sujette aux mêmes variations ; elle est intermittente & uniforme, suivant les tems de sécheresse ou de pluie.

La fontaine des merveilles près de Haute-Combe en Savoie, presque sur les bords du lac Burges, coule & cesse de couler deux fois par heure. Ses écoulemens sont précédés d’un grand bruit ; l’eau en est si considérable, qu’elle fait tourner un moulin. Le P. Dechalles qui l’a vûe, assûre qu’elle tarit entierement par la sécheresse ; que pendant les pluies elle coule douze fois par heure. Ce même pere parle aussi d’une autre, située au village de Puis-Gros, à deux milles de Chamberi, qui est quelquefois entierement à sec. Après les plures, elle coule par intervalles quelquefois dix & vingt fois de suite, de forte qu’à peine le tems d’un écoulement à l’autre suffit pour laisser vuider son bassin. Elle éprouve beaucoup de variations dans ses intermittences.

Scheuchzer, dans ses itinera alpina, fait mention de trois fontaines périodiques La premiere (tome II. pag. 401.) nommée andem Burgenberg, coule du pié d’une montagne dans le canton d’Underwald ; elle est non seulement maïale, mais encore périodique intermittente. Ses écoulemens paroissent huit ou dix fois par jour. La seconde (tom. I. pag. 27.) est la fontaine d’Hen Shen dans le comté de Berne, au bailliage de Thun ; elle est maïale & intermittente comme la premiere. Il n’y a rien de constate sur ses périodes, ainsi que sur celles de la troisieme nommée Lugibacq, c’est-à-dire menteuse, qui est située près d’une glaciere dans le canton d’Underwald ; elle est temporaire & intermittente, tom. II. pag. 485. Nous ferons observer ici que ces fontaines prennent leur source dans les croupes de montagnes, aux sommets desquelles les neiges forment des réservoirs & des lacs, dont les eaux se filtrent dans les cavernes intérieures des collines, qui présentent partout au-dehors des antres, des ruptures, des rochers entr’ouverts, & tout ce qui annonce la grande possibilité des réservoirs & des siphons que nous avons supposés d’abord.

Piganiol de la Force (Descrip. de la France, tome VIII. pag. 480.) parle d’une fontaine périodique, située sur le chemin de Touillon à Pontarlier, en Franche-Comté. Quand le flux va commencer, on entend un bouillonnement, & l’eau sort aussitôt de trois côtés en formant plusieurs petits jets arrondis, qui s’élevent peu-à peu jusqu’à la hauteur d’un pié. Ensuite ces jets diminuent en aussi peu de tems qu’ils ont mis à s’élever, & tout ce jeu dure environ un demi-quart d’heure. Le repos de l’intermission est de deux minutes. Au reste rien de fixe dans ses variations. Il est parlé fort succinctement dans l’ancienne histoire de l’académie des Sciences, lib. III. cap. iij. de deux sources périodiques situées en Franche Comté, dont l’une est salée & l’autre douce, & dont les écoulemens n’étoient assujettis à aucune regle. Celle que nous venons de déduire, sera probablement une des deux.

On trouve près de Colmar, dans le diocèse de Senes en Provence, une fontaine qui coule huit fois

dans une heure, & qui s’arrête autant de fois. Un leger murmure annonce ses accès. Gassendi assure que sa période est assez constante dans tout le cours de l’année. La seule inégalité qu’on y ait observée, est que l’intermission dure huit, sept ou six minutes ; variations qui ont pour principe les pluies. Gassendi, physic. sect. 3. lib. I. cap. vij.

Fonsanche dans le diocese de Nîmes, entre Sauve & Quissac, sort de terre à l’extrémité d’une pente assez roide, adossée à une longue chaine de montagnes nommée Coutach ; elle coule assez régulierement deux fois dans vingt-quatre heures, & éprouve deux intermissions dans le même tems. Chaque écoulement est de sept heures vingt-cinq minutes, & chaque intermission de cinq heures. Les écoulemens & les intermissions retardent environ cinquante minutes chaque jour, par rapport aux mêmes effets du jour précédent. Ce qui est très-évident, puisque le tems des deux écoulemens & des deux intermissions surpasse vingt-quatre heures de cinquante minutes. Ces deux écoulemens en vingt-quatre heures & le retard de cinquante minutes, si conformes aux variations des marées, ont fait illusion, & on a regardé long-tems Fonsanche comme une fontaine à flux & reflux : mais comment aller chercher la mer de Gascogne à 130 lieues, la mer Méditerranée ne produisant point sensiblement ces effets sur les côtes de Languedoc ? D’ailleurs ceux qui cherchent des analogies entre des effets qui n’en ont point, doivent être déconcertés par une observation constante : c’est que Fonsanche, après de grandes pluies, a un cours uniforme, & qu’elle ne reprend son intermittence qu’après que les pluies ont eu leur écoulement. M. Astruc, (mem. pour servir à l’hist. de Languedoc) a vû & observé cette fontaine.

Catel, dans ses mémoires sur l’histoire du Languedoc, pag. 171. parle d’une espece de fontaine periodique appellée Vieissan, dans le diocese de Beziers, laquelle sort d’une montagne du même nom, à une demi-lieue de Rochebrune, & se rend dans la riviere d’Orb. Cette fontaine est intermittente, & dans ses flux jette de l’eau comme la jambe d’un homme suivant Catel. On en place une aussi en Poitou près du village de la Godiniere ; une autre au village de Dorgues, à deux lieues & demie de Castres en Languedoc ; une à Marsac près de Bordeaux, & une quatrieme à Varins près de Saumur. Nous ne les rappellons ici, ainsi que quelques autres qui précedent, que pour engager des observateurs exacts de constater leur état qui paroît incertain, lorsqu’ils se trouveront à portée de le faire.

J’ajoûterai ici comme un phénomene analogue, celui que la source de la Reinette à Forges offre vers les six à sept heures du soir & du matin. L’eau de cette source se trouble, devient rougeâtre, & se charge de floccons roux, sans être plus abondante dans ces changemens. Je serois porté à croire que cette eau se charge des sédimens qui se sont amassés au fond d’un réservoir, qu’un siphon a puisé deux fois en vingt-quatre heures ; & comme l’ouverture de la source n’est pas assez considérable pour épuiser l’eau du siphon à mesure qu’elle coule, elle n’éprouve ni intermittence ni accès. Il suffit de supposer pour cela, que l’intermittence & l’écoulement du siphon soient de douze heures, & que le réservoir immédiat de la source vuide le produit du siphon pendant le tems de son intermittence & de son écoulement.

On peut rapporter au même méchanisme les singularités de quelques étangs ; les uns situés au milieu des continens, sont pleins pendant la sécheresse, & presqu’à sec pendant les pluies ; d’autres assez près de la mer ou des rivieres qui ont flux & reflux, baissent quand la marée est haute, & montent quand