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(in modo constans.)
Molestus, (pro mole stans.)
Mæstus, (in mærore constans.)
Honestus, (in honore constans.)
Scelestus, (in scelere constans.)

3°. Dans les verbes, la terminaison scere ajoûtée à quelque radical significatif par lui-même, donne les verbes inchoatifs, c’est-à-dire ceux qui marquent le commencement de l’acquisition d’une qualité ou d’un état ; cette terminaison paroît avoir été prise du vieux verbe escere, esco, dont on trouve des traces dans le II. livre des lois de Cicéron, dans Lucrece, & ailleurs. Ce verbe, dans son tems, signifioit ce qu’a signifié depuis esse, sum, & a été consacré dans la composition à exprimer le commencement d’être. Selon ce principe,

Calesco, je commence à avoir chaud, je m’échauffe, équivaut à calidus esco.
Frigesco, je commence à avoir froid, (frigidus esco.)
Albesco, (albus esco.)
Senesco, (senex esco.)
Duresco, (durus esco.)
Dormisco, (dormiens esco.)
Obsolesco, (obsoletus esco.)

Une observation qui confirme que le vieux mot escere est la racine de la terminaison de cette espece de verbes, c’est que comme ce verbe n’avoit ni prétérit ni supin (voyez l’article Prétérit, où nous en ferons voir la cause), les verbes inchoatifs n’en ont pas d’eux-mêmes : ou ils les empruntent du primitif d’où ils dérivent, comme ingemisco, qui prend ingemui de ingemo ; ou ils les forment par analogie avec ceux qui sont empruntés, comme senesco qui fait senui ; ou enfin ils s’en passent absolument, comme dormisco.

Cette petite excursion sur le système des formations latines, suffit pour faire entrevoir l’utilité & l’agrément de ce genre d’étude : nous osons avancer que rien n’est plus propre à déployer les facultés de l’esprit ; à rendre les idées claires & distinctes ; & à étendre les vûes de ceux qui voudroient, si on peut le dire, étudier l’anatomie comparée des langues, & porter leurs regards jusque sur les langues possibles. (E. R. M.)

Formation, en terme de Philosophie ; c’est l’action par laquelle une chose est produite : ainsi on dit, la formation du fœtus, (voyez Fœtus) ; la formation des pierres, des métaux dans le centre de la terre. Voyez Pierre, Métal, &c.

Formation s’employe aussi, en Géométrie, dans le même sens que le mot génération, pour désigner la maniere dont une courbe, une surface, un corps est engendré. Voyez Engendrer. Ainsi on dit, la formation des sections coniques dans le cone se fait par un plan qui coupe le cone de différentes manieres, &c.

Enfin formation se dit aussi en Algebre ; on dit la formation d’une équation, pour désigner la suite des opérations qui conduisent à cette équation : on dit dans le même sens, la formation des puissances de tel ou tel nombre, telle ou telle quantité, &c. voyez Puissance. On dit aussi, former une table de nombres, de quantités qui ont rapport à quelque objet, pour dire, calculer & construire cette table. (O)

FORME, s. f. (Métaphysique.) on définit ordinairement la forme, ce qui est de moins commun & de plus particulier ou de plus distingué dans un être. Quoique par cette définition, la forme semble pouvoir convenir aux esprits aussi-bien qu’aux corps, néanmoins, dans l’usage ordinaire, la forme, aussi-bien que la matiere, s’attribue aux seuls corps. Je définirois volontiers la forme des corps (laquelle est à la portée de notre esprit, & dont nous pouvons juger), la mesure

ou portion de mouvement & d’arrangement, qui nous détermine à donner à certaine partie de la matiere une dénomination particuliere, plûtôt que toute autre dénomination.

Je ne parle pas ici de cette forme qu’on supposeroit consister dans un germe ou un atome particulier ; elle surpasseroit la sagacité de nos sens, puisque nous n’avons rien à dire de ce que nous ne pouvons connoître, & que nous ne connoissons rien dont l’idée primitive ne nous soit venue par la voie de l’expérience & des sensations.

Au reste, ce que nous avons dit de la forme ordinaire des corps, suffit pour nous donner distinctement à entendre tout ce que nous comprenons sous le nom de forme purement corporelle. Il ne faut pourtant pas croire que par-là nous puissions discerner toûjours en quoi consiste précisément la forme de chaque corps, c’est à-dire en quel degré de mouvement, d’arrangement, de situation, & de configuration de ses parties les plus petites, consiste la forme de chaque corps ; c’est de quoi s’occupe la Physique, & souvent avec assez peu de succès. Cependant l’analogie d’une forme à l’autre, & celle des corps que nous connoissons à ceux que nous ne connoissons pas, nous donne en général quelque idée de la forme des corps. Ainsi il arriveroit à tout homme sensé, qui n’auroit jamais vû de la farine & du pain, d’y trouver d’abord à-peu près la même différence de forme & même de substance, qu’entre du cuivre & de l’or : mais quand nous lui aurons fait connoître que la substance du pain n’est autre chose que de la farine dont les parties se sont rapprochées par la conglutination de l’eau, qui l’a rendue pâte, & ont encore été serrées par la cuisson qui l’a fait devenir pain, il jugera bientôt que l’eau & le feu n’y ont apporté d’autre changement, sinon celui qui s’est fait par les qualités que nous nommons couleur & dureté.

Nous jugerons de même qu’avec un changement pareil, dans un degré plus ou moins considérable, & avec plus ou moins de tems, ce qui est aujourd’hui du plomb ou du cuivre pourroit bien devenir tout autre métal, & peut-être de l’or. Article tiré des papiers de M. Formey.

Les philosophes scholastiques distinguent la figure de la forme, en ce que la premiere est la disposition des parties extérieures du corps ; & la seconde, celle des parties intérieures : c’est ce qui donne lieu à cette scène si plaisante du mariage forcé, où Pancrace, docteur péripatéticien, soûtient qu’on doit dire la figure d’un chapeau, & non la forme, & croit que l’état est renversé par l’usage contraire.

Forme substantielle, (Métaphysique.) terme barbare de l’ancienne philosophie scholastique, dont on s’est principalement servi pour désigner de prétendus êtres matériels qui n’étoient pourtant pas matiere. Nous ne nous chargeons pas d’expliquer ce que cela signifie : nous dirons seulement, que la question si épineuse de l’ame des bêtes a donné occasion à cette opinion absurde. Voici, selon toutes les apparences, par quels degrés les Scholastiques y ont été conduits, c’est-à-dire par quelle suite de raisonnemens ils sont parvenus à déraisonner.

Si les bêtes sentent, pensent, & même raisonnent, comme l’expérience paroît le prouver, elles ont donc en elles un principe distingué de la matiere : car ce seroit renverser les preuves de la spiritualité de l’ame, que de croire que Dieu puisse accorder à une substance étendue le sentiment & la pensée. Or si l’ame des bêtes n’est point matiere, pourquoi s’éteint-elle à la destruction de leur corps ? Pourquoi l’Etre suprème ayant mis dans les animaux un principe de sentiment semblable à celui qu’il a mis dans l’homme, n’a-t-il pas accordé à ce principe l’immortalité qu’il a donnée à notre ame ? La philosophie de l’éco-