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port égal des forces qui l’animent ; au lieu que ce dernier suit une progression décroissante de ces mêmes forces. L’expérience m’a toûjours confirmé que les échappemens qui avoient un grand arc de levée, avançoient par la chaleur & retardoient par le froid, & vice versâ. D’où je conclus que quelque effet que puisse produire le chaud ou le froid sur le ressort spiral, il pourra être compensé par l’échappement, suivant les différens arcs de levée qu’on lui donnera à cet égard : donc toutes ces raisons ne sont pas suffisantes pour empêcher de diminuer les vibrations, & par conséquent les frottemens.

Comme en fait de méchanique l’expérience doit l’emporter sur les meilleures théories, & qu’ayant l’exemple de ce que donnent les grandes quantités de vibrations, il est convenable d’opposer un grand exemple de la moindre quantité que l’on peut employer : c’est ce qui m’a engagé à faire la montre dont voici la description.

Description abregée de la montre que j’ai présentée à l’académie royale des Sciences, le 20 Juin 1755.

La montre a de diametre 18 lignes.
Elle a de hauteur 8
Le balancier a de diametre 11 , &
pese 18 grains, fait une vibration par seconde.
Le barillet a de diametre 7
Il a de hauteur 2

Le ressort a 12 tours de lame dans le barillet, & a six tours d’action ; il y en a 3 de travail, un tour de bande, reste un tour .

Le cylindre recevant l’action de la roue fait deux vibrations par chaque dent. Divisant la roue qui en a 30 par son diviseur , le quotient ou l’exposant est 60. Divisant de même chaque roue par son pignon, l’on aura

Résultat. Si l’on divise ce nombre de 702000 par 3600 vibrations qui se font dans une heure, l’on aura 195 heures = 8 jours + 3 heures.

On voit par cette description, 1o. que le ressort est plus foible que ceux qu’on employe aux montres ordinaires de 24 heures & de même volume.

2o. Qu’elle va huit fois plus de tems sans être remontée ; que malgré la réduction prodigieuse de la force motrice, j’ai pu donner encore au balancier près de trois fois plus de masse qu’aux montres ordinaires : ce qui fait voir qu’en diminuant les vibrations, on diminue dans un très-grand rapport celui des frottemens. Toutes les expériences que j’ai faites avec cette montre, ont tellement confirmé les raisons que j’ai opposées à celles que l’on donne communément pour le grand nombre de vibrations, que je me crois autorisé de conclure que c’est une importante découverte, puisqu’elle rend vaines les tentatives de quelques habiles horlogers qui avoient imaginé de mettre deux balanciers à leurs montres qui s’engrenoient l’un dans l’autre, pour prévenir, suivant eux, le mal que les secousses pouvoient produire : c’étoit faire une mauvaise chose pour guérir un mal qui n’existoit pas. L’importance du sujet m’engage à donner ici le rapport fait par l’Acad. R. des Sc.

« Extrait des registres de l’académie royale des Sciences, du 12 Février 1757. Nous avons examiné par ordre de l’académie une montre présentée par M. Romilly horloger, citoyen de Genève.

» Ce que cette montre offre de singulier, consiste principalement dans le balancier ; au lieu que celui des autres montres fait quatre à cinq battemens par seconde, M. Romilly a rendu le sien assez pesant, & le ressort spiral assez foible pour qu’il n’en fasse qu’un dans le même tems. D’où il suit 1o. que les irrégularités qui se pourroient trouver dans le jeu de cette importante piece, seront quatre à cinq fois moins multipliées que dans les montres ordinaires : 2o. que le nombre des vibrations étant diminué, le même roüage qui auroit été 24 heures dans la construction ordinaire, peut avec un très leger changement dans les nombres aller huit jours :

3o. que l’aiguille avançant comme à une pendule de seconde en seconde, cette montre sera plus commode qu’une autre pour les observations.

» On pourroit peut-être soupçonner qu’un balancier si pesant seroit sujet à recevoir beaucoup de mouvement des impressions étrangeres, & que par conséquent cette montre iroit mal au porter ; mais il paroît par les expériences que M. Camus, l’un de nous, en a faites, que dans le gousset d’un homme qui couroit la poste à franc-étrier, elle n’a pas plus varié qu’une bonne montre à balancier ordinaire.

» Mais ce que nous ne pouvons dissimuler, c’est que cette même montre qui a souffert les chocs les plus violens sans se dérégler, n’a jamais pu soûtenir la différence de situation verticale & horisontale, sans tomber dans des erreurs considérables. Il faudra donc choisir de la régler pour être à plat & portée ou pour être pendue & portée, & ne la pas faire passer du plat au pendu, si on veut qu’elle conserve sa régularité.

» Nonobstant cet inconvénient, l’idée de M. Romilly nous a paru neuve & heureuse. Il a au-moins rempli l’objet qu’il s’étoit proposé, en faisant voir que ce n’est pas le grand nombre des vibrations du balancier d’une montre qui la rend capable d’une plus grande régularité, ce qu’on ne croyoit pas avant lui ; & on ne peut que l’encourager à perfectionner cette piece, & à faire ses efforts pour lui ôter l’inconvénient dont nous venons de parler. Il est plus en état que personne d’y remédier, & de donner à la construction qu’il propose tous les avantages dont elle est susceptible[1]. Signé, Camus & de Fouchy. Je certifie l’extrait ci-dessus & de l’autre part conforme à l’original & au jugement de l’académie. A Paris, ce 16 Février 1757. Signé, Grandjean de Fouchy, secrét. perp. de l’Acad. R. des Sc. »

Des révolutions. Le nombre de vibrations étant donné, il s’agit de trouver le moindre nombre de roues pour y satisfaire.

  1. Les erreurs qu’elle avoit données dans les situations horis. & vertic. ont été entierement corrigées, parce qu’elles n’étoient point des suites nécessaires de la construction.