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Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 7.djvu/399

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l’eau froide. On sait encore que suivant les différens aciers, il faut qu’il soit plus ou moins rouge ; ce que nous ne détaillerons pas ici.

Je dirai seulement, que par une suite de pratique, j’ai trouvé que pour avoir de l’acier le plus dur possible & le moins sujet à grener, il falloit lui donner le degré de chaleur, en le faisant rougir le plus promptement qu’il sera possible.

Soit la ligne , divisée en sept parties, & que ces nombres représentent des degrés de chaleur qui se reconnoissent par la rougeur ; que pour la trempe d’une qualité d’acier, il fallût le rougir au degré 4 : si on passe ce degré de chaleur, quoiqu’on y laissât redescendre le corps, la trempe est absolument manquée, & l’acier ne vaut rien.

L’acier ainsi trempé, pour le travailler il faut qu’il soit revenu d’un jaune tirant sur le violet, à un feu très-doux, & avoir soin de le mouvoir pour qu’il s’échauffe également.

Ce n’est qu’avec un acier ainsi préparé, qu’on peut parvenir à faire des pivots très-fins & très-ronds, en observant de les tourner au burin le plus petit qu’il sera possible, pour laisser très-peu à faire aux limes qui les doivent finir & polir.

Comme j’ai fait beaucoup de petites montres, où il faut des pivots extrèmement fins, je sais par expérience jusqu’à quel point on les peut diminuer ; & pour leur assurer une mesure connue, j’ai fait un calibre qui me donne leur diametre ; & j’ai trouvé que ces pivots avoient la vingt-quatrieme partie d’une ligne : j’en ai même fait à une aiguille de boussole, que j’ai voulu suspendre par deux pivots, pour ôter son frémissement ; à quoi j’ai réussi, en lui donnant la même liberté qu’elle a dans les suspensions ordinaires, par la réduction des pivots, que j’ai portés à n’avoir pour diametre que la trentieme partie d’une ligne : je crois même que c’est le dernier terme, ou la limite à laquelle l’on puisse les réduire

Après la diminution des pivots, il est nécessaire que leurs pressions soient paralleles aux parois de leurs trous. Pour cela, il faudroit que la toue & le pignon fussent entre les deux pivots au milieu de l’axe, & non comme on le pratique ordinairement, où le pignon est proche d’un pivot, & la roue de l’autre, & concourent par leurs action, contraires, à incliner l’axe : & cette inclinaison est d’autant plus grande que la montre est plus haute, & augmente par-là leur frottement : d’où j’infere que les montres plates, tant décriées par quelques-uns, ont une propriété que les autres n’ont pas, parce que les roues ne pouvant avoir de l’éloignement avec leurs pignons, le frottement des pivots approche plus d’être parallele à leurs trous.

Que l’on dise qu’elles sont plus difficiles à faire, plus sujettes à être nettoyées & à être gâtées par la plûpart des Horlogers ; j’en conviens. Mais les autres montres, pour être plus faciles à faire, y sont-elles moins exposées ? Tous les jours l’on voit un bon horloger qui a porté tous ses soins à son ouvrage, & l’a décoré de son nom ; ensuite ce même ouvrage passe dans les mains d’un particulier, qui ne sachant pas qu’il importe beaucoup à l’auteur de cette montre que lui seul la nettoye ou la répare, la donne indistinctement à un horloger, qui n’étant pas aussi habile que celui qui l’a faite, ne peut que la dégrader. C’est comme celui qui ayant à faire réparer dans le tableau d’un grand-maître quelques petits accidens, prendroit au hasard le premier peintre.

Dans les pendules, le poids de la lentille & l’étendue de l’arc qu’elle décrit, fait la base des frottemens que la suspension éprouve : c’est la raison de préférence des petits arcs.

Si la suspension ne se trouve pas être parfaitement dans le centre de l’axe de la fourchette, il se fait alors un frottement de la fourchette avec le pendule, qui est d’autant plus grand, que le centre du mouvement de l’un est plus éloigné du centre du mouvement de l’autre.

Les différentes suspensions qui sont en usage présentent aussi plus ou moins de résistance par leurs frottemens : il s’en pratique de quatre sortes ; à pivot, à ressort, à soie, & à couteau.

Celles à pivot ne sont plus d’usage, depuis que l’on a pris celui des lentilles pesantes ; ce qui demanderoit de gros pivots, & augmenteroit les frottemens.

Celles à ressort causent des frottemens d’autant plus grands que le ressort est plus fort : on doit donc le diminuer & le rendre aussi foible & aussi flexible que pourra le permettre le poids de la lentille.

Celles à soie sont bien flexibles, & ne résistent pas : mais elles ont l’inconvénient de s’alonger ou racourcir par le sec & l’humide ; ce qui est un grand défaut.

Enfin celles à couteau ont moins de frottement que les autres ; mais elles exigent tant de soins par le sommet de l’angle, le coussinet sur lequel il porte, le poli, la dureté de ces parties, que je crois que l’on peut leur préférer celles à ressort avec assez d’avantage dans la pratique ordinaire.

§. VI. Des frottemens des ressorts moteurs & reglans.

Le ressort moteur est susceptible de frottement, par plusieurs causes ; par le fond, par le couvert du barillet, par les lames les unes contre les autres ; ce qui concourt à diminuer & à suspendre même toute sa force élastique. L’épaisseur de la lame éprouve encore un frottement d’autant plus grand qu’elle est plus épaisse, parce qu’il s’y trouve un plus grand nombre de parties à rentrer les unes dans les autres du côté du concave ; de même, en se dilatant du côté du convexe, il y a plus de parties pour se desunir ; ce qui, dans l’un & l’autre côté, augmente le frottement des parties.

A cet égard, il seroit bien utile de trouver la solution de ce problème. La matiere & la solidité étant données, quelle est la figure qu’il lui faudra assigner pour avoir sa plus grande intensité élastique ? Sans prétendre de la donner, je dirai que par les expériences & les réflexions que j’ai faites sur ce sujet, j’ai trouvé qu’une lame de ressort étoit d’autant plus élastique, & conservoit d’autant plus cette force, qu’elle étoit plus mince, plus large, & plus longue ; ensorte que cette lame étant ployée en spirale autour de l’arbre dans son barillet, son rayon fût égal à la largeur ou hauteur du ressort.

Si l’on fait la lame des ressorts en diminuant d’épaisseur imperceptiblement du dehors au-dedans, c’est encore un moyen pour que les lames ne se frottent pas.

Je considere deux forces dans les ressorts ; une relative à la matiere, & l’autre relative à la forme.

La matiere étant constante, la force du ressort n’est plus variable que par la longueur, la largeur, l’épaisseur, & la figure.

Si l’on rend encore constantes l’épaisseur & la largeur, la force du ressort ne sera plus variable que par la longueur & la figure. Donc si l’on sait encore la figure constante, la force ne variera plus que par la longueur ; mais il est évident que les ressorts les plus courts, tout étant égal d’ailleurs, soûtiendront les plus grands poids, & parcourront d’autant moins d’espace.

L’on sait que les tensions des ressorts, suivant les expériences de s’Gravesande, suivent assez bien la proportion des poids, pourvû qu’on s’éloigne sensiblement des premiers & derniers termes de tension.