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en les passant le plus de décoction qu’il est possible ; on met cette décoction dans un poëlon ou dans une bassine à confiture avec une livre de sucre, plus ou moins, sur chaque pinte d’eau. On fait cuire le tout ensemble jusqu’à ce que la gelée soit bien formée ; ce qu’on connoit facilement, si en prenant de cette gelée dans une cuilliere, & la versant dans la bassine ou sur une assiette, elle tombe par floccons, & non pas en coulant ou en filant. C’est ainsi qu’on fait les gelées d’abricots, de cerises, de coins, d’épine-vinette, de framboises, de grenades, de groseilles, de poires, de pommes, de verjus.

Il faut seulement observer que les gelées rouges & vertes doivent cuire à petit feu, & être couvertes pendant qu’elles cuisent ; au lieu que les gelées blanches se cuisent à grand feu & découvertes. Il faut aussi plus de sucre à certains fruits qu’à d’autres ; enfin le confiseur a son art de manipulation qu’on ne sauroit décrire, & qui ne s’apprend que par le coup d’œil & la pratique.

Les gelées de fruits sont agréables, rafraîchissantes, savonneuses, acescentes, propres dans plusieurs maladies, & toûjours avantageuses dans l’alkalescence & la putridité des humeurs. On les dissout, on les bat dans de l’eau, on en use en boisson ou d’autre maniere. (D. J.)

Gelée d’Avoine, (Pharm.) gelatina avenacea, préparation d’avoine recommandée par plusieurs medecins dans les maladies naissantes de consomption. On prend une grande quantité d’avoine mondée, par exemple une livre & demie, de la rapure de corne de cerf deux onces, de raisins de Corinthe trois onces, un bon jarret de veau coupé par morceaux, & dont les os ont été rompus. On fait bouillir le tour ensemble à petit feu dans un vaisseau bien fermé pendant un tems suffisant ; on dégraisse ce bouillon s’il en est besoin ; on le coule, & sur le champ il se convertit en gelée, dont on avale plusieurs fois par jour quelques cuillerées dissoutes, soit dans le bouillon leger des mêmes ingrédiens, soit dans du bouillon de limaçons, d’écrevisses, soit dans quelqu’autre véhicule convenable. On en continue long-tems l’usage, & d’ordinaire avec succès. (D. J.)

GELINOTTE, GELINOTTE DES BOIS, s. f. gallina corylorum, Attagen Gesneri, oiseau plus gros que la perdrix, & presqu’aussi gros qu’une poule. Willughby a décrit une gelinotte mâle qui avoit quatorze pouces de longueur depuis l’extrémité du bec jusqu’au bout de la queue, & vingt pouces d’envergure. Le bec en étoit noir, & avoit presqu’un pouce de longueur ; la piece du dessus étoit un peu arquée ; il y avoit au-dessus des yeux à l’endroit des sourcils une membrane dégarnie de plumes & rougeâtre ; cette membrane étoit d’une couleur moins foncée dans la femelle ; les jambes étoient nues jusqu’à environ la moitié de leur longueur. Les deux doigts extérieurs tenoient l’un à l’autre par une membrane jusqu’à la premiere jointure ; ils avoient de chaque côté un feuillet dentelé ; l’ongle du doigt du milieu étoit tranchant sur le côté intérieur ; le ventre & la poitrine étoient blancs avec des taches noires sur le milieu des plumes de la poitrine ; le jabot avoit une couleur rousse & la gorge une couleur noire environnée d’une bande blanche ; la gorge de la femelle n’étoit pas noire ; le mâle avoit une ligne blanche qui s’étendoit depuis les yeux jusqu’à l’occiput ; la tête étoit d’une couleur cendrée mêlée d’une teinte de roux ; le dos & le croupion avoient une couleur cendrée plus foncée comme sur les perdrix ; la partie inférieure du jabot avoit des bandes transversales de couleur noirâtre ; les plumes des côtés de la poitrine au-dessous des épaules étoient rousses ou fauves, à l’exception de la pointe qui avoit une couleur blanche ; les grandes plumes qui s’étendoient sur

le dos depuis les épaules étoient blanches ; il y avoit vingt-quatre grandes plumes dans les aîles ; les barbes extérieures des premieres étoient brunes & blanches, & les barbes intérieures entierement brunes ; les petites plumes avoient des couleurs rousses, noires, & blanchâtres ; la queue étoit composée de seize plumes longues de cinq pouces ; les sept premieres de chaque côté étoient d’un blanc sale à la pointe ; il y avoit du noir au-dessus de ce blanc, & le reste de la plume étoit mêlé de blanc & de noir ; les deux plumes du milieu avoient la même couleur que le corps, avec des bandes transversales blanches & parsemées de petites taches brunes. La chair de la gelinotte devient blanche par la cuisson, & elle est fort tendre & très-délicate. Willughby, Ornith. Il y a beaucoup de gelinottes dans les Ardennes, dans la Lorraine, dans le Forès, dans le Dauphiné, dans les Alpes, &c. Voyez Oiseau. (I)

Gelinotte, ou Gelinotte de bois, (Diete.) La viande de cet oiseau est aussi salutaire qu’elle est délicieuse au goût ; elle doit être rangée, comme objet diététique, avec celle du faisan, du coq de bruyere, de la perdrix, &c. Voyez Faisan & Viande. (b)

GELIVURE, s. f. (Agricult) défaut, maladie, dommage qui arrive aux arbres par de fortes gelées.

La physique des végétaux, & sur-tout des principaux végétaux, qui sont les arbres, se porte même à la connoissance des accidens qui arrivent extraordinairement ; tels sont ceux que produisent les fortes gelées d’hyver. Elles font quelquefois fendre les arbres, suivant la direction de leurs fibres, & même avec bruit ; c’est ce que les Forestiers appellent gelivures, terme expressif qu’on ne trouve point dans nos meilleurs dictionnaires, & dont il faut pourtant enrichir notre langue.

Nos forêts ont été attaquées de maladies considérables par le froid de 1709 ; & quoique cette énorme gelée paroisse être très-ancienne, elle a produit dans les arbres du royaume des défauts ineffaçables.

Telles sont les gelivures, c’est-à-dire les fentes, les gerçures considérables des arbres dans toute la direction de leurs fibres. Ces arbres ainsi fendus ou gercés, sont marqués d’une arête ou éminence formée par la cicatrice qui a recouvert les gerçures qui restent dans l’extérieur de ces arbres sans se réunir, parce qu’il ne se fait jamais de réunion dans les fibres ligneuses, sitôt qu’elles ont été séparées. On conçoit fort bien que la seve, qui augmente de volume, comme toutes les liqueurs aqueuses, lorsqu’elle vient à geler, produit nécessairement des gelivures ; mais ne pourroit-il pas y en avoir qui fussent quelquefois occasionnées par d’autres causes, comme par une trop grande abondance de seve, ou autres vices de l’arbre ?

Quoi qu’il en soit, on a trouvé de ces défectuosités d’arbres dans tous les terroirs, & à toutes les expositions ; & même on a trouvé quantité d’arbres qui non-seulement étoient gelivés, mais qui avoient même une portion de bois mort renfermée dans de bon bois ; ce que les gens des forêts appellent gelivure entre-lardée. Alors les arbres ainsi malades étant sciés horisontalement, découvrent une portion de l’aubier mort & de l’écorce, entierement recouvert par le bois vif. Quand ce défaut n’occupe pas toute la longueur du tronc, il y a telles pieces carriées qui paroissent très-saines, & dont on n’a reconnu la gelivure que par hasard ; savoir, quand on a refendu ces pieces équarries, pour en faire des planches & des membrures. Voyez le mémoire de MM. Duhamel & de Buffon sur cette matiere, ann. 1737, de l’acad. des Sciences.

On peut tirer une utilité de ces faits ; c’est qu’il faut rebuter pour les ouvrages de conséquence, tous