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nats varie ainsi que leurs degrés de transparence : ce qui fait qu’on en compte ordinairement de trois especes, la premiere, est d’un rouge clair & vif, comme celui des grains d’une grenade ; la seconde, est d’un rouge tirant sur le jaune, qui approche de celui de la pierre nommée hyacinthe ; la troisieme est d’un rouge qui tire sur le violet ou sur le gros bleu. Les grenats de cette derniere espece sont regardés comme les plus parfaits. Les Italiens les nomment rubini di rocca, rubis de roche ; on les nomme aussi quelquefois grenats syriens.

Les grenats varient aussi pour la grandeur. En effet il s’en trouve depuis la grosseur de la tête d’une épingle, jusqu’à un pouce de diametre. Boetius de Boot dit en avoir vû de la grosseur d’un œuf de poule ; ceux qui ont cette taille sont très-rares, & d’un prix très-considérable ; il y a lieu de croire que c’est à des grenats d’une grandeur extraordinaire que l’on a donné le nom d’escarboucles.

Quant à la dureté, M. Wallerius ne donne aux grenats que la huitieme place parmi les pierres précieuses. Le même auteur en fait sept especes, eu égard à leurs figures. Il y en a qui sont en rhomboïdes, quadrangulaires ; d’autres sont octahedres, ou à huit facettes ou côtés ; d’autres font dodécahedres, ou à douze côtés ; d’autres de quatorze, d’autres de vingt côtés ; d’autres enfin n’affectent aucune figure déterminée. Les grenats se trouvent dans des matrices de différentes natures, telles que l’ardoise, la pierre à-chaux, le grès, dans des pierres talqueuses, &c. Voyez la Minéralogie de Wallerius, tome I. page 223.

La couleur du grenat paroît venir d’une portion de fer ; quelques auteurs ont crû qu’elle venoit de l’or & de l’étain ; ils se sont apparemment fondés sur ce que la dissolution de l’or précipitée par l’étain, donne une couleur rouge ou pourpre très-vive ; il seroit assez difficile de vérifier ce fait à cause de la petitesse du produit que pourroit donner l’analyse qu’on en feroit ; ce qu’il y a de certain, c’est qu’on peut contrefaire les grenats ainsi que les rubis, au moyen de ce précipité, qu’on appelle pourpre minéral, en le mêlant avec de la fritte, ou matiere dont on fait le verre.

Le grenat lorsqu’il est parfait, ne differe du rubis que par sa dureté, qui est beaucoup moindre.

Quelques auteurs prétendont que les grenats entrent en fusion dans le feu, sans cependant rien perdre de leur couleur ; mais M. Port dit avoir fait entrer en fusion sans addition, des grenats, tant orientaux que de Boheme, en employant un feu très-violent. Cette opération lui a produit une masse brune foncée, & quelquefois tirant sur le noir. Ce célebre chimiste remarque que ces pierres en fondant, conservent & augmentent même leur dureté ; mais par malheur qu’elles ne conservent pas leur transparence ni leur couleur rouge : sans cela il seroit facile de fondre ensemble de petits grenats, comme de petites hyacinthes, pour en faire une grosse pierre. La couleur noire prouve que les grenats contiennent une portion de fer ; c’est aussi ce qui contribue à leur fusibilité. Voyez la Litogéognosie, t. I. pp. 157 & 158.

Les Joüailliers distinguent les grenats en orientaux & en occidentaux ; les premiers viennent des Indes, & sur-tout des royaumes de Calicut, de Cananor, de Cambaye, d’Ethiopie, &c. Il s’en trouve aussi en Europe, en Espagne, en Boheme, en Silésie, en Hongrie. On dit que les grenats d’orient se trouvent ordinairement détachés & répandus dans la terre de certaines montagnes, & dans le sable de quelques rivieres, mais que ceux d’Europe sont ordinairement placés en grand nombre dans une espece de roche talqueuse assez tendre. Voyez le supplément du dictionnaire de Chambers.

Boetius de Boot, dans son traité de gemmarum & lapidum historiâ, page 152 & suiv. donne aux grenats de Boheme la préférence sur tous les autres, même sur ceux d’orient, à cause de leur pureté & de la vivacité de leur couleur, qui, selon lui, résiste au feu, & qu’ils conservent même après y avoir été exposés pendant plusieurs mois. Mais l’expérience de M. Pott prouve qu’il se trompe ; & il faut que le feu auquel ces grenats avoient été exposés, n’eût pas été assez vif. Le même Boetius de Boot dit qu’en Boheme les gens de la campagne trouvent les grenats en morceaux gros comme des pois répandus dans la terre, sans être attachés à aucune matrice ; ils sont noirs à la surface, & l’on ne peut reconnoître leur couleur qu’en les plaçant entre l’œil & la lumiere. Il paroît que ceux qu’on trouve ainsi isolés, ont été détachés de leurs matrices par la violence des eaux qui les ont portés dans les endroits où on les trouve. Les grenats de Silésie sont ordinairement d’une qualité très-médiocre. (—)

Grenat, (Pharmacie, & Mat. med.) Le grenat est un des cinq fragmens précieux ; voyez Fragmens précieux.

GRENELER, v. act. (Art méch.) c’est pratiquer à la surface d’un corps des grains ; on dit aussi grainer & grener.

GRENER, v. n. (Economie rustiq.) c’est monter en graine. Voyez l’article Graine.

GRENETER, v. act. (Gainier.) fer à greneter, outil de gainier ; c’est un fer emmanché comme une lime, dont l’extrémité est terminée par une tête arrondie sphériquement, & qui est remplie de petits trous propres à former des grains semblables à ceux de la peau de requien. On fait chauffer ce fer, & on l’applique fortement sur les endroits où le grain a manqué, ou sur les points des pieces de requien, afin de rétablir la continuité des grains, & cacher la jonction des deux morceaux. Voyez la figure dans la Planche du Gainier.

GRENETI, s. m. (Monnoie.) petit cordon qui regne autour des monnoies & des médailles. Il est en forme de grains ou de points ; en l’appelle aussi le chapelet. Il termine & enferme la légende. On donne aussi le nom de greneti au poinçon qui sert à frapper ces points. Ce poinçon est bien acéré & bien trempe. Il est encore à l’usage des Ciseleurs & des Graveurs, tant en relief qu’en creux. Voyez nos planches de Gravure.

GRENETIER, s. m. (Jurisprud.) c’est un officier royal préposé à un grenier à sel, sur lequel il a inspection pour recevoir le sel que l’on envoye dans ce grenier, juger de la bonté de ce sel, de la quantité qu’il en faut pour les paroisses qui sont dans l’arrondissement de ce grenier, & d’en faire la distribution à ceux auxquels il est destiné. C’est aussi un des officiers qui exercent la jurisdiction établie pour ce grenier à sel, où ils jugent en premiere instance, & même dans certains cas en dernier ressort, les différends qui surviennent par rapport au transport, distribution, & débit du sel.

Philippe de Valois ayant établi le 20 Mars 1342 des greniers ou gabelles de sel, nomma trois maîtres des requêtes clercs, & quatre autres personnes pour être maîtres, souverains commissaires-conducteurs & exécuteurs des greniers & gabelles ; leur donnant pouvoir d’établir dans tous les endroits du royaume où ils jugeroient à propos, des commissaires, grenetiers, gabelliers, clercs, & autres officiers ; de leur faire donner des gages convenables, & de les destituer à leur volonté. Ainsi les grenetiers sont aussi anciens que les greniers à sel.

Ce même prince, par une ordonnance du 29 Mars 1346 touchant le fait des eaux & forêts, dit, article 39 : « si nos grenetiers ont besoin de bois pour la ré-