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L’acte doit être écrit de la main d’un des notaires ou autre officier qui fait l’inventaire, ou de la main de leur clerc, & non de la main d’une des parties, quand même cette partie seroit notaire.

On doit y faire mention du jour, & si c’est devant ou après-midi, & le marquer à chaque vacation.

Ceux qui y sont présens doivent signer sur la minute à la fin de chaque vacation.

On commence l’inventaire par une espece de préface qu’on appelle l’intitulé, qui contient les qualités des parties, & leurs dires & réquisitions ; ensuite on énonce les meubles, la vaisselle d’argent, les titres & papiers.

Il est d’usage de faire priser les meubles par un huissier ou par des experts à mesure qu’on les inventorie, cependant il y a des endroits où l’on ne fait pas de prisée.

On range les titres & papiers par liasse & par cotte, & on les désigne de même dans l’inventaire.

Les dettes actives & passives doivent aussi être déclarées.

Le survivant des pere & mere qui est tuteur de ses enfans mineurs, ayant des intérêts à régler avec eux, doit faire l’inventaire avec un légitime contradicteur, c’est-à-dire avec le subrogé tuteur ou curateur des mineurs, dont la fonction ne consiste qu’à assister à l’inventaire.

On fait ordinairement clore l’inventaire en justice trois mois après qu’il est parachevé. Cette formalité est nécessaire dans quelques coutumes pour empêcher la continuation de communauté ; dans celles qui n’en parlent point, il suffit de faire un inventaire fidele.

L’inventaire se fait aux frais communs de ceux qui acceptent la succession & communauté de biens.

Après l’inventaire on procede ordinairement à la vente des meubles, à moins qu’on ne soit d’accord de les partager.

Quand il n’y a ni meubles, ni titres & papiers à inventorier, & néanmoins que l’on a intérêt de constater l’état de la succession, on fait un procès-verbal de carence. Voyez la loi scimus au code de jure deliberandi ; le titre des scellés & inventaires, livre IV. le parfait Notaire, livre XII. chap. j. (A)

Inventaire de Production, (Jurisprud.) est une piece d’écriture contenant l’énumération & description des pieces que chaque partie produit, en exécution de quelque reglement, dans un procès ou instance appointée.

On arrange ces pieces par liasses, suivant l’ordre qui leur convient, & chaque liasse est cottée par une lettre de l’alphabet.

L’inventaire de production se fait dans le même ordre ; on commence par tirer les inductions de chaque piece d’une même cotte, & ensuite on déclare que, pour justifier de ce qui a été dit, on produit tant de pieces ; savoir, &c. ensuite on désigne la cotte ou lettre, sous laquelle ces pieces sont produites.

Cet inventaire se fait tant par le demandeur que par le défendeur, par l’appellant & par l’intimé. Voyez l’ordonnance de 1667, tit. XI art. 33. (A)

INVENTION, s. f. (Arts & Sciences.) terme général qui s’applique à tout ce qu’on trouve, qu’on invente, qu’on découvre d’utile ou de curieux dans les Arts, les Sciences, & les Métiers. Ce terme est assez synonyme à celui de découverte, quoique moins brillant ; mais on me permettra de les confondre ici, sans répéter les choses curieuses que le lecteur doit lire préalablement au mot Découverte.

Nous sommes redevables des inventions au tems, au pur hasard, à des conjonctures heureuses & imprévues, à un instinct méchanique, à la patience du travail, & à ses ressources.

Ce n’est point aux recherches des gens qu’on appelle dans le monde gens d’esprit ; ce n’est point à des

philosophes spéculatifs, que nous devons les inventions utiles qu’on trouva dans le xiij. & xiv. siecles. Elles furent le fruit de cet instinct de méchanique que la nature donne à certains hommes, indépendamment de la Philosophie. L’invention de secourir la vûe affoiblie des vieillards, par des lunettes qu’on nomme besicles, est de la fin du xiij. siecle. On la doit, dit-on, à Alexandre Spina : les Vénétiens posséderent dans le même siecle, le secret des miroirs de crystal. La fayence qui tenoit lieu de porcelaine à l’Europe, fut trouvée à Faenza : les meules qui agissent par le secours du vent, sont à-peu-près du même tems. L’invention du papier fait avec du linge pillé & bouilli, est du commencement du xiv. siecle. Cortusius parle d’un certain Pax qui en établit à Padoue la premiere manufacture, plus d’un siecle avant l’invention de l’Imprimerie. C’est ainsi que les prémices des Arts ont été heureusement découverts, & souvent par des hommes ignorés.

Je dis les prémices, car il faut remarquer que tout ce que nous avons de plus curieux & de plus utile dans les Arts, n’a pas été trouvé dans l’état où nous le voyons à présent. Toutes ces choses ont été découvertes grossierement, ou par parties, & ont été amenées insensiblement à une plus grande perfection. C’est ce qui paroît du-moins des inventions dont nous venons de parler ; & c’est ce qu’on peut prouver de celles du verre, de la boussole, de l’Imprimerie, des horloges, des moulins, des télescopes, & de tant d’autres.

Je passe sous silence les découvertes dans les Sciences, qui ont pû être préparées par les travaux des siecles précédens ; ce sujet seroit d’une trop longue recherche. Je ne parlerai pas davantage des découvertes prétendues modernes, qui ne sont que des opinions anciennes, présentées de nouveau sous des faces plus lumineuses. De telles discussions se seroient d’ailleurs peu susceptibles de démonstrations ; je me contenterai d’observer, pour ne point sortir des Arts, qu’il a fallu une suite plus ou moins longue de tems pour perfectionner les inventions, qui dans des siecles grossiers, étoient originairement le produit du hasard, ou du génie méchanique.

Guttemberg n’imagina que les lettres mobiles sculptées en relief sur le bois & sur le métal. Ce fut Schoëffer, qui rectifiant cette invention, trouva le secret de jetter en fonte les caracteres ; & l’on sait combien cet art a été perfectionné depuis Schoëffer.

Que ce soit Goya marinier, natif de Melfi, ou les Anglois, ou les François, ou les Portugais, qui ayent trouvé l’usage de la boussole dans le xij. siecle ; cette découverte est dans le même cas que celle de l’Imprimerie. On ne sut d’abord qu’étendre l’aiguille aimantée sur du liége à la surface de l’eau ; ensuite on vint à la suspendre sur un pivot dans une boëte qui étoit suspendue elle-même ; & finalement on l’a fixée à une rose de carton ou de talc, sur laquelle on a tracé un cercle divisé en 32 parties égales, pour marquer les 32 airs, avec un autre cercle concentrique, divisé en 360 degrés, & qui sert à mesurer les angles & les écarts de la boussole.

L’invention des moulins-à-vent (peut-être originaire d’Asie) n’a fait une fortune brillante, que quand la Géométrie a perfectionné cette machine, qui dépend entierement de la théorie des mouvemens composés.

Combien de siecles se sont écoulés pour perfectionner les horloges & les montres depuis Ctesibius, qui fit vraissemblablement la premiere horloge à rouage, & qui fleurissoit vers l’an 613 de Rome, jusqu’à la derniere pendule faite en Angleterre par Graham, ou en France par Julien le Roi ? Les Hughens, les Leibnitz, & tant d’autres, ne s’y sont-ils pas exercés ?