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aussi en trois ; l’ancien Testament qu’ils attribuoient au Pere, le nouveau qu’ils attribuoient au Fils, & l’évangile éternel qu’ils attribuoient au Saint-Esprit. Dans le ternaire des tems, ils donnoient au Pere tout celui qui s’étoit écoulé depuis le commencement du monde jusqu’à Jesus-Christ, tems auquel, disoient-ils, regnoit l’esprit de la loi mosaïque. Ils donnoient au Fils les 1260 ans depuis Jesus-Christ jusqu’à eux, pendant lesquels avoit regné l’esprit de de grace. Enfin le troisieme qui devoit suivre, & qu’ils nommoient le tems de la plus grande grace & de la vérité découverte, étoit pour le Saint-Esprit. Un autre ternaire consistoit dans la maniere de vivre. Dans le premier tems, sous le Pere, les hommes ont vécu selon la chair ; dans le second, sous le regne du Fils, ils ont vécu entre la chair & l’esprit ; dans la troisieme qui devoit durer jusqu’à la fin du monde, ils vivront selon l’esprit. Les Joachimites prétendoient que dans le troisieme tems, les sacremens, toutes les figures & tous les signes devoient cesser, & que la vérité paroîtroit à découvert. Dictionn. de Trévoux.

Malgré l’autorité des conciles qui ont condamné les visions de l’abbé Joachim, & sur-tout son évangile éternel, il s’est trouvé un abbé de son ordre, nommé Grégoire Laude, docteur en Théologie, qui ayant entrepris d’écrire sa vie, & d’éclaircir ses prophéties, a tenté de le justifier du crime d’hérésie dans un ouvrage imprimé à Paris en 1660 en un vol. in-folio. Dom Gervaise, ancien abbé de la Trappe, a aussi donné depuis peu au public une histoire de l’abbé Joachim, dans laquelle il entreprend de justifier cet abbé.

JOACHIMS-THAL, (Géogr.) c’est-à-dire la vallée de saint Joachim, ville & vallée de Bohème dans le cercle d’Elnbogen, joignant les frontieres du Voigtland ; on y découvrit au commencement du xvj. siecle de riches mines d’argent, & l’an 1519 on y frappa déjà des écus d’argent du poids d’une once, avec l’image de saint Joachim : comme cette monnoie se répandit dans toute l’Allemagne, on l’appella Joachim-thaler, en latin Joachimici nummi, & par abréviation thaler ; tous les écus frappés ensuite selon les lois monétaires de l’Empire, ont été nommés reichs-thaler, écus de l’Empire, que les François appellent par corruption risdale.

Je vois en parcourant le P. Niceron, qu’il met au rang des hommes illustres dans la république des lettres, Michel Néander, médecin, né à Joachims-thal en 1529, & mort en 1581 : cependant tous ses ouvrages sont depuis long-temps dans la poussiere de l’oubli, d’où je ne crois pas qu’on s’avise de les tirer. (D. J.)

JOAILLERIE. Voyez Jouaillerie.

JOAILLIER. Voyez Jouaillier.

* JOANNITES, s. m. pl. (Hist. eccles.) nom dont on appella dans le v. siecle ceux qui demeurerent attachés à saint Jean Chrysostome, & qui continuerent de communier avec lui, quoiqu’il eût été exilé par les artifices de l’impératrice Eudoxie, & déposé dans un conciliabule par Théophile d’Alexandrie, ensuite dans un second tenu à Constantinople. Ce titre de Joannites fut inventé pour désigner ceux à qui on le donnoit & qu’on se proposoit de desservir à la cour. La méchanceté des hommes a toujours été la même, & elle n’a pas même varié dans ses moyens.

JOB, (Théolog.) nom d’un des livres canoniques de l’ancien Testament, ainsi appellé de Job, prince célebre par sa patience & par son attachement à la piété & à la vertu, qui demeuroit dans la terre d’Hus ou dans l’Amite, dans l’Idumée orientale aux environs de Bozra, qu’on croit communément être l’auteur de ce livre qui contient son histoire.

On a formé une infinité de conjectures diverses sur le livre de Job ; les uns ont cru que Job l’avoit écrit lui-même en syriaque ou en arabe, & qu’ensuite Moïse ou quelqu’autre israëlite l’avoit mis en hebreu ; d’autres l’ont attribué à Eliu, l’un des amis de Job, ou à ses autres amis, ou à Moïse, ou à Salomon, ou à Isaïe, ou à quelqu’écrivain encore plus récent. Il est certain que le livre en lui-même ne fournit aucune preuve décisive pour en reconnoître l’auteur. Ce qui paroît incontestable, c’est que celui qui l’a composé étoit Juif de religion & postérieur au tems de Job, qu’on croit avoir été contemporain de Moïse. Il y fait de trop fréquentes allusions aux expressions de l’écriture pour penser qu’elle ne lui ait pas été familiere.

La langue originale du livre de Job est l’hébraïque, mais mêlée de plusieurs expressions arabes & chaldéennes, & de plusieurs tours qui ne sont pas connus dans l’hébreu, ce qui rend cet ouvrage obscur & difficile à entendre. Il est écrit en vers libres quant à la mesure & à la cadence, vers dont la principale beauté consiste dans la grandeur de l’expression, dans la hardiesse & la sublimité des pensées, dans la vivacité des mouvemens, dans l’énergie des peintures, & dans la variété des caracteres, parties qui s’y trouvent toutes réunies dans le plus haut degré.

Quant à la canonicité du livre de Job, elle est reconnue généralement dans les églises grecques & latines, elle y a toujours passé comme un article de foi, & ce sentiment est venu de la synagogue à l’église chrétienne. Les Apôtres l’ont cité. Théodore de Mopsueste le critiquoit, mais sur une version grecque, qui faisant quelques allusions à la fable ou à l’histoire poétique, n’étoit pas exactement conforme au texte hébreu. Quelques-uns accusent Luther & les Anabatistes de rejetter le livre de Job, mais Scultet & Spanheim tâchent d’en justifier Luther. On peut consulter sur ce livre le commentaire de Pineda, celui de Dom Calmet, & l’histoire de Job par M. Spanheim. Calmet, Dictionn. de la Bible, tom. II. lettre J. au mot Job, pag. 386.

JOBET, s. m. (Fond. en caract. d’Impr.) est un petit morceau de fil de fer plié en équerre qui se met au moule à fondre les caracteres d’Imprimerie, entre le bois de la piece de dessus & la platine. Ce jobet fait entre lui & le bois du moule un petit vuide quarré dans lequel passe la matrice. Cela est pour empêcher cette matrice de s’éloigner trop de sa place lorsque l’ouvrier ouvre son moule. Voyez Moule, Matrice. Voyez aussi nos Pl. de Fond. & leur expl.

JOCELIN, (Géogr.) petite ville de France en Bretagne, dans l’évêche de saint Malo ; elle députe aux états, & est à 8 lieues N. E. de Vannes, 18 S. O. de Rennes, 29. N. O. de S. Malo. Long. 14. 56. lat. 48. 2. (D. J.)

JOD, s. m. (Gramm.) c’est la dixieme lettre de l’alphabet hébraïque. Voyez l’article Hébreu. Le jod prend la place du dans les verbes qui ont un pour derniere radicale ; trois jods posés en triangle, ou deux jods avec un kamits dessous, désignent en chaldéen le nom de Dieu. Communément on prononce jod, comme si l’i étoit consonne ; mais cette prononciation n’est pas la véritable. Le jod des Hébreux a la valeur de l’iota grec.

Jod, s. m. (Commerce.) c’est en Angleterre le quart du quintal, autrement 27 livres d’avoir du poids. Voyez Hundred ou Livre.

Jod est aussi une des mesures de distances & longueurs, dont on se sert dans le royaume de Siam. Vingt-cinq jods font le roé-neug ou lieue siamoise, d’environ deux mille toises françoises. Chaque Jod contient quatre sen, le sen vingt voua, le voua deux ken, qui est l’aune siamoise de trois piés de