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est sur une colline, au pié de laquelle coule le Rhindacus des anciens. Voyez Rhindacus.

Quoique Loubat n’ait aujourd’hui qu’environ 200 maisons d’assez mauvaise apparence, habitées par des Turcs & par des Chrétiens, cependant ce lieu a été considérable sous les empereurs grecs. Ses murailles qui sont presque ruinées, étoient défendues par des tours, les unes rondes, les autres pentagones, quelques-unes triangulaires. On y voyoit encore dans le dernier siecle des morceaux de marbre antique, des colonnes, des chapiteaux, des bas-reliefs & des architraves, le tout brisé & très-mal traité.

L’empereur Jean Comnène, qui parvint à l’empire en 1118, y fit bâtir un château, qui est présentement tout démoli. La ville étoit plus ancienne que cet empereur ; car elle fut pillée par les Mahométans sous Andronic Comnène, qui régnoit en 1081. Cet Andronic Comnène envoya une armée à Lopadion, pour ramener à leur devoir les habitans, qui, à l’exemple de ceux de Nicée & de Pruse, avoient abandonné son parti.

Après la prise de Constantinople par le comte de Flandres, Pierre de Bracheux mit en fuite les troupes de Théodore Lascaris, à qui Lopadium resta par la paix qu’il fit avec Henri, successeur de Baudouin, comte de Flandres & premier empereur latin d’Orient.

Quand le grand Ottoman eut défait le gouverneur de Pruse, & les princes voisins qui s’étoient ligués pour arrêter le cours de ses conquêtes, il poursuivit le prince de Feck dans Lopadium, & le fit hacher en morceaux à la vûe de la citadelle.

Enfin Lopadium est aussi fameux dans les annales turques par la victoire qu’Amurat remporta sur son oncle Mustapha, que le Rhindacus l’est dans l’histoire romaine par la défaite de Mithridate. On peut lire Leunclavius & Calchondyle sur cet évenement.

M. Spon a fait bien des fautes en parlant de Lopadi, ou comme il l’appelle Loupadi. Il a eu tort de prendre le lac de Lopadi pour le lac Ascanius des anciens, qui est celui que les Turcs nomment Isnich. Il s’est encore trompé, en assûrant que la riviere de Lopadi se jette dans le Granique.

Il paroît aussi que le même Spon, le sieur Lucas & M. Vaillant sont tous trois dans l’erreur, quand ils ont pris Lopadion ou Loubat pour être l’ancienne Apollonia. Cette fameuse ville, où Apollon étoit sans doute révéré, est aujourd’hui le village d’Abouillona, qui en conserve le nom. Son lac est appellé par Strabon le lac Apolloniate. Voyez les voyages de Tournefort, & le Dict. de la Martiniere aux mots Loubat, Lopadium, Apollonie & Abouillona. (D. J.)

LOUCHET, s. m. (Econ. rustiq.) espece de hoyau ou de bêche propre à fouir la terre. Il est plat, tranchant, droit, & avec son manche il ressemble à une pelle.

LOUDUN, (Géog.) ville de France en Poitou. On la nomme en latin, castrum Lausdunense, Losdunum, Lavesdunum, Laucidunum, & Laudunum.

Macrin & les freres Sainte-Marthe sont les premiers qui, par une licence poétique, ont donné à cette ville le nom de Juliodunum, que Chevreau & quelques autres ont tâché de lui conserver.

Il est certain qu’on doit la mettre au rang des anciennes villes, puisqu’avant l’an 1000, elle figuroit déja comme un lieu considérable, & la principale place du Loudunois soumis à l’obéissance des comtes d’Anjou. Voyez à ce sujet ce qu’en dit Longuerue, dans sa description de la France, I. partie, pag. 151.

Cette ville se fit considérer dans les guerres civiles du seizieme siecle, & par sa situation, & par son château, que Louis XIII. démolit en 1633. Le

couvent des Ursulines de Loudun se rendit célebre dans la même année, par l’histoire de la possession imaginaire de plusieurs de ses religieuses, & par la condamnation d’Urbain Grandier, qui fut une des malheureuses victimes de la haine du cardinal de Richelieu. On pourroit opposer ce seul trait de la vie du grand ministre de Louis XIII. à tous les éloges si fades & si bas que lui prodiguent nos académiciens lors de leur réception à l’académie françoise.

Loudun est située sur une montagne à douze lieues N. O. de Poitiers, quinze S. O. de Tours, soixante-deux S. O. de Paris. Long. 17. 42. lat. 47. 2.

Il me reste à dire que cette ville est la patrie de plusieurs gens de lettres, parmi lesquels je ne dois pas oublier de nommer Mrs. Bouilland, Chevreau, Macrin, Renaudot, & les freres de Sainte-Marthe.

Bouilland (Ismael) possédoit la Théologie, l’Histoire, les belles-Lettres, & les Mathématiques ; j’en ai pour preuve les divers ouvrages qu’il a publiés, & le journal des savans, tom. XXIII. pag. 126. Ses voyages en Italie, en Allemagne, en Pologne, & au Levant, lui procurerent des connoissances qu’on n’acquiert que par ce moyen. Il mourut à Paris en 1694, âgé de quatre-vingt-neuf ans. Son éloge se trouve parmi les hommes illustres de Perrault.

Chevreau (Urbain) savant & bel esprit, qui a eu beaucoup de réputation, mais elle ne s’est pas soutenue ; l’histoire du monde, son meilleur ouvrage, souvent réimprimé, fourmille de trop de fautes pour qu’on puisse le louer. M. Chevreau est mort en 1701, à quatre-vingt huit ans.

Macrin (Jean) un des meilleurs poëtes latins du seizieme siecle, au jugement de M. de Thou, qui a fait son éloge ; son vrai nom étoit Maigret : il s’appella Macrinus dans ses poésies latines, d’où lui vint le nom de Macrin en françois, qui lui est demeuré. Il mourut de vieillesse dans sa patrie en 1555.

Renaudot (Théophraste) medecin, mort en 1653 à soixante dix ans, commença le premier en 1631, à publier les nouvelles publiques si connues sous le nom de gazettes. Il a eu pour petit-fils, l’abbé Renaudot, savant dans l’histoire & les langues orientales, mort à Paris en 1720 âgé de soixante-quatorze ans.

Mais les freres jumeaux, Scévole & Louis de Sainte-Marthe, fils du premier Scévole, enterrés tous les deux à Paris a S. Severin dans le même tombeau, furent très-illustres par leur savoir. On a d’eux l’histoire généalogique de la maison de France, la Gallia Christiana pleine d’érudition, & plusieurs autres ouvrages. Scévole mourut à Paris en 1650 à soixante-dix-sept ans, & Louis en 1656.

Leur pere Scévole leur avoit servi d’exemple dans la culture des sciences. C’est lui qui réduisit Poitiers sous l’obéissance d’Henri IV. & qui sauva la ruine de Loudun, où il finit ses jours en 1623, âgé de soixante-dix-huit ans. On doit le mettre au rang des meilleurs poëtes latins de son siecle. C’est une famille bien noble que celle de Sainte-Marthe, car elle n’a produit que des gens de mérite, qui tous ont prolongé leur carriere dans le sein des Muses, jusqu’à la derniere vieillesse. Aucun d’eux n’est mort avant l’âge de soixante dix ans. Nous ne voyons plus de familles aussi heureusement organisées que l’étoit celle des Sainte-Marthe. (D. J.)

LOUDUNOIS, ou LODUNOIS, (Géog.) contrée de France, dont la capitale est Loudun. La petite riviere de Dive sépare cette contrée de l’Anjou & du Poitou. Le Loudunois a sa coûtume particuliere, à laquelle le parlement a tantôt égard & tantôt point. De Lauriere a fait un commentaire sur cette coûtume, avec une histoire abregée du pays, qui est ce qui nous intéresse le plus ici. (D. J.)

LOUER, v. act. (Gramm. & Morale.) c’est té-