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extrémités, de maniere que cette couture n’empêche point qu’on éloigne ou qu’on rapproche l’une de l’autre, les anses du lacs de tire-botte revêtu de chamois, afin qu’il puisse convenir aux différentes grosseurs des membres aux quels on l’attache. Ce lacs qui a dix huit pouces de longueur & un de large, fait une anse de neuf pouces ; la piece de chamois fait le tour du membre, & forme une compresse circulaire, afin que les lacs ne puissent blesser. Le cordon de soie fait deux tours sur le chamois, & on le lie d’un simple nœud ou d’une rose.

Pour se servir de cette machine, on la place toute montée au-dessous du membre. Quand on a posé l’arc-boutant & le lacs, on engage les bouts des branches dans les deux poches ou gaînes de l’arc-boutant. On passe le lacs de la moufle mobile dans l’anse du lacs qui est attaché au membre, & on arrête ce lacs en passant le nœud de son extrémité dans l’une de ses boutonnieres : on met alors à l’essieu du treuil la manivelle, & on tourne autant qu’il est nécessaire pour allonger & réduire le membre démis.

Cette machine peut être appliquée pour faire les extensions dans certaines fractures, en pressant différemment les lacs.

Pour se servir de cette machine aux luxations de la cuisse, M. Petit a ajouté deux especes de croissans aux branches (voyez fig. 5.), dont l’un appuie sur l’os des îles, & l’autre sur la partie moyenne de la cuisse. On prend une serviette dont on noue ensemble deux angles, pour en former une anse dans laquelle on passe la cuisse jusque dans l’aîne, on en attache l’anse au cordon de la moufle mobile, & on tourne la manivelle : par-là on fait trois efforts différens. Le croissant supérieur arcboute contre l’os de la hanche ; l’inférieur pousse le bas de la cuisse en-dedans, la serviette tire le haut du fémur en-dehors, & par le concours de ces trois mouvemens, la réduction se fait presque toujours sans peine, & sans qu’il soit nécessaire de faire d’autres extensions : on ne parle ici que de la luxation de la cuisse en-bas & en-dedans.

Il faut voir tous les détails dans l’auteur pour se mettre au fait des particularités dans lesquelles nous ne pouvons entrer. On trouve une machine destinée aux mêmes usages dans la chirurgie de Platner, mais si l’on fait bien attention aux regles posées par les meilleurs auteurs, & fondées en raison & en expérience, pour la réduction des luxations, on sentira combien peu l’on doit attendre de secours de toutes ces machines. La réduction des luxations dépend de plusieurs mouvemens combinés. Chaque espece de déplacement exige que le membre soit situé différemment, pour que les muscles qui sont accidentellement dans une tension contre nature, ne soient pas exposés à de nouvelles violences par l’effet des extensions nécessaires ; on risque de déchirer les muscles, & de les arracher dans une opération mal dirigée. Il faut sûrement plus de lumieres & d’adresse que de forces, pour faire à propos tout ce qu’il convient, suivant la situation de la tête de l’os qui peut être portée en-haut, en-bas, en-devant, en-arriere, en-dedans, en-dehors ; ce qui fait que les membres sont tantôt plus longs, tantôt plus courts, suivant l’espece de luxation. Comment donc pourroit-on réussir avec un instrument qui n’agit, & ne peut agir que suivant une seule & unique direction ? dès qu’il est constant qu’il faut combiner les mouvemens pour relâcher à propos certains muscles, en étendre d’autres avec des efforts variés en différens sens, à mesure que la tête de l’os se rapproche de sa cavité, pour y être replacée. C’est ce qui est exposé dans un plus grand détail, dans le discours préliminaire de la derniere édition du traité des maladies des os de feu M. Petit, en 1758. Voyez Ambi.

Machines pour arrêter les hémorrhagies, voyez Tourniquet.

Machine pour redresser les enfans bossus, Pl. VI. fig. 2. voyez Rachitis.

Machines pour les hernies de l’ombilic, Pl. VI. fig. 3. & Pl. XXIX. voyez Exomphale.

Machine pour les fractures compliquées de la jambe ; voyez Boîte. (Y)

Luxe, c’est l’usage qu’on fait des richesses & de l’industrie pour se procurer une existence agréable.

Le luxe a pour cause premiere ce mécontentement de notre état ; ce desir d’être mieux, qui est & doit être dans tous les hommes. Il est en eux la cause de leurs passions, de leurs vertus & de leurs vices. Ce desir doit nécessairement leur faire aimer & rechercher les richesses ; le desir de s’enrichir entre donc & doit entrer dans le nombre des ressorts de tout gouvernement qui n’est pas fondé sur l’égalité & la communauté des biens ; or l’objet principal de ce desir doit être le luxe ; il y a donc du luxe dans tous les états, dans toutes les sociétés : le sauvage a son hamac qu’il achete pour des peaux de bêtes ; l’européen a son canapé, son lit ; nos femmes mettent du rouge & des diamans, les femmes de la Floride mettent du bleu & des boules de verre.

Le luxe a été de tout tems le sujet des déclamations des Moralistes, qui l’ont censuré avec plus de morosité que de lumiere, & il est depuis quelque tems l’objet des éloges de quelques politiques qui en ont parlé plus en marchands ou en commis qu’en philosophes & en hommes d’état.

Ils ont dit que le luxe contribuoit à la population.

L’Italie, selon Tite-Live, dans le tems du plus haut degré de la grandeur & du luxe de la république romaine, étoit de plus de moitié moins peuplée que lorsqu’elle étoit divisée en petites républiques presque sans luxe & sans industrie.

Ils ont dit que le luxe enrichissoit les états.

Il y a peu d’états où il y ait un plus grand luxe qu’en Portugal ; & le Portugal, avec les ressources de son sol, de sa situation, & de ses colonies, est moins riche que la Hollande qui n’a pas les mêmes avantages, & dans les mœurs de laquelle regnent encore la frugalité & la simplicité.

Ils ont dit que le luxe facilitoit la circulation des monnoies.

La France est aujourd’hui une des nations où regne le plus grand luxe, & on s’y plaint avec raison du défaut de circulation dans les monnoies qui passent des provinces dans la capitale, sans refluer également de la capitale dans les provinces.

Ils ont dit que le luxe adoucissoit les mœurs, & qu’il répandoit les vertus privées.

Il y a beaucoup de luxe au Japon, & les mœurs y sont toujours atroces. Il y avoit plus de vertus privées dans Rome & dans Athènes, plus de bienfaisance & d’humanité dans le tems de leur pauvreté que dans le tems de leur luxe.

Ils ont dit que le luxe étoit favorable aux progrès des connoissances & des beaux arts.

Quels progrès les beaux arts & les connoissances ont-ils fait chez les Sibarites, chez les Lydiens, & chez les Tonquinois.

Ils ont dit que le luxe augmentoit également la puissance des nations & le bonheur des citoyens.

Les Perses sous Cyrus avoient peu de luxe, & ils subjuguerent les riches & industrieux Assyriens. Devenus riches, & celui des peuples où le luxe regnoit le plus, les Perses furent subjugués par les Macédoniens, peuple pauvre. Ce sont des sauvages qui ont renversé ou usurpé les empires des Romains, des califes de l’Inde & de la Chine. Quant au bonheur du citoyen, si le luxe donne un plus grand nombre de commodités & de plaisirs, vous verrez, en par-