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DIODORE DE SICILE.

piens l’agriculture et fondé des villes célèbres, il laissa dans ce pays des gouverneurs chargés de l’administrer et de percevoir le tribut.

XIX. Il arriva alors que le Nil, au lever du Sirius (époque de la crue), rompit ses digues et inonda toute l’Égypte et particulièrement la partie dont Prométhée était gouverneur. Peu d’habitants échappèrent à ce déluge. Prométhée faillit se tuer de désespoir. L’impétuosité et la force du fleuve lui fit donner le nom d’aigle. Mais Hercule, entreprenant et hardi, répara les digues rompues et fit rentrer le fleuve dans son lit. C’est ce qui explique le mythe grec d’après lequel Hercule tua l’aigle qui rongeait le foie de Prométhée. Le nom le plus ancien de ce fleuve est Okéanès qui signifie en grec Océan. Depuis cette inondation, on l’avait appelé Aëtos (Aigle) ; ensuite Ægyptus[1] du nom d’un roi du pays. C’est ce que confirme le poëte qui dit : « Je mis à l’ancre les légers navires dans le fleuve Ægyptus.[2] » Car ce fleuve se jette dans la mer près du lieu appelé Thonis, ancien entrepôt de l’Égypte. Enfin il a reçu du roi Niléus le nom de Nil qu’il garde encore aujourd’hui.

Arrivé aux confins de l’Éthiopie, Osiris fit border le Nil de digues, afin que ses eaux n’inondassent plus le pays au delà de ce qui est utile, et qu’au moyen d’écluses on pût en faire écouler la quantité nécessaire au sol. Il traversa ensuite l’Arabie le long de la mer Rouge[3], et continua sa route jusqu’aux Indes et aux limites de la terre. Il fonda dans l’Inde un grand nombre de villes, et entre autres Nysa, ainsi appelée en mémoire de la ville d’Égypte où il avait été élevé. Il y planta le lierre, qui ne croit encore aujourd’hui dans les Indes que dans ce seul endroit. Enfin il laissa encore d’autres marques de son

  1. Ægyptus, nom primitif du Nil. Γύψ, αἴγυψ (Gups, aigups) (œgyps), nom grec du vautour, de là le nom d’Αἰγύπτιοι, Ægyptii, de la couleur fauve du vautour. Voy. Perizonius, Orig. Ægypt., cap. I.
  2. Odyssée, chant XIV, v. 258.
  3. La mer Rouge des Grecs était le plus souvent l’océan Indien, ou plutôt le golfe Persique, dans lequel se jettent l’Euphrate et le Tigre.