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Page:Diodore de Sicile - Bibliothèque historique, Delahays, 1851.djvu/72

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DIODORE DE SICILE.

fleuves. Les habitants de l’île Méroë (qui méritent peut-être le plus de foi), ennemis de vaines conjectures, et se trouvant le plus rapprochés des lieux en question, sont si éloignés d’affirmer à cet égard rien de positif qu’ils appellent le Nil Astapus, nom qui signifie en grec eau dérivant des ténèbres. C’est ainsi qu’ils manifestent, par cette dénomination, leur aversion pour toute conjecture et l’ignorance dans laquelle ils sont à l’égard des sources du Nil. Cette opinion nous paraît aussi la plus vraie et éloignée de toute fiction. Je n’ignore pas cependant qu’Hérodote, lorsqu’il décrit les limites de la Libye à l’orient de ce fleuve et à l’occident, attribue aux Libyens Nasamons une connaissance exacte de ce sujet, et ajoute que le Nil prend son origine dans un certain lac, d’où il se répandrait dans une contrée inconnue de l’Éthiopie ; mais il est impossible d’ajouter foi ni au récit des Libyens (bien qu’ils l’aient donné comme une vérité), ni à l’historien qui s’efforce de le démontrer.

XXXVIII. Après avoir parlé des sources et du cours du Nil, nous allons essayer d’exposer les causes de sa crue. Thalès, l’un des sept sages, prétend que les vents étésiens, soufflant contre les embouchures de ce fleuve, l’empêchent de verser ses eaux dans la mer ; et, qu’ainsi enflé, le Nil inonde toute la Basse-Égypte. Cette opinion, quelque probable qu’elle paraisse, est aisément réfutée. En effet, si elle était vraie, tous les fleuves dont les embouchures sont à l’opposite de la direction des vents étésiens devraient offrir un semblable débordement. Or, cela n’étant pas, il faut chercher une autre cause à ce phénomène. Anaxagore, le physicien, a cru trouver cette cause dans la fonte de la neige en Éthiopie ; cette opinion a été adoptée par le poëte Euripide, qui était le disciple d’Anaxagore. Car il dit : « Quittant les rives du Nil, dont le lit se remplit des belles eaux qui s’écoulent de la terre éthiopienne aux noirs habitants, lorsque les neiges fondent… » Cette opinion n’a pas non plus besoin d’une longue réfutation ; car il est évident pour tout le monde qu’à cause d’une excessive chaleur il ne peut pas tomber de neige en Éthiopie. Du