Page:Dion Cassius - Histoire romaine, tome 1, 1889.djvu/50

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Alors quel subit changement ! Ces mêmes sénateurs qui, avant la lecture du message impérial, faisaient entendre des acclamations en l'honneur de Séjan prêt à recevoir la puissance tribunitienne, quittent leurs sièges Ils ne veulent plus se trouver à côté de celui qu'ils se glorifiaient naguère d'avoir pour ami. Les tribuns du peuple et les préteurs l'entourent pour l'empêcher de sortir, dans la crainte qu'une émeute n'éclate, s'il se montre hors du sénat.

La lecture de la lettre est à peine terminée, et déjà mille clameurs retentissent contre Séjan : les uns le maudissent, parce qu'il leur a fait du mal ; les autres, parce qu'ils le redoutent ; ceux-ci désavouent leur ancienne amitié, ceux-là expriment la joie que leur cause sa chute. Enfin il est entraîné hors du sénat et conduit en prison par Régulus, escorté des autres magistrats[1].

Ce récit est suivi de quelques réflexions. Ici je laisse parler l'historien : « Jamais plus mémorable exemple de la fragilité humaine ne prouva qu'il n'est permis à personne de s'enorgueillir. Ils mènent en prison, comme le plus faible des mortels, celui que, dès l'aurore, ils avaient tous accompagné au sénat, comme un homme beaucoup plus puissant qu'eux ! Naguère il leur parais-

  1. Dion, liv. LVIII. 10.