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Page:Discours de Garcin de Tassy, 1857.djvu/10

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qui changea à cette occasion son nom en celui de Sirâj uddin Haïdar Schâh Gâzî (« Combattant les infidèles » ou « Défenseur de la foi »), ainsi qu’on le voit dans les monnaies qu’il a fait frapper pendant son gouvernement éphémère et qui portent cette légende rimée d’après l’usage oriental :

Ba-zar zad sikkha nusrat tarrâzî
Sirâj uddin Haïdar Schâh Gâzî


c’est-à-dire « Sirâj uddin Haïdar Schâh Gâzî a fait frapper cette monnaie d’or, gage de la victoire. »

On sait comment se sont terminés les quatre mois du règne de Sirâj, et comment après le sac de Delhi il a été pris avec la bégam sa femme, nommée Zînat ulmahal (l’Ornement du palais), ainsi que cinq princes de sa famille, dont trois ont été passés par les armes à l’instant même et deux condamnés juridiquement à mort ; mais on a épargné jusqu’ici les jours du vieux roi et ceux de la reine.

L’occision générale des sipahis de Delhi et la déroute complète d’une grande partie de ceux d’entre eux qui avaient pris la fuite et qui ont été atteints à Mathura, la ville sacrée de Krischna, ainsi que les autres victoires des Anglais, arrêteront probablement la marche de l’insurrection, et tout rentrera peu à peu dans l’ordre. Tels sont les vœux les plus chers des amis de l’humanité, qui s’intéressent d’abord aux Anglais représentants du christianisme et de la civilisation européenne, puis aux natifs de l’Inde, qui, malgré l’horreur qu’inspirent les atrocités dont ils se sont rendus coupables dans cette déplorable rébellion, intéressent encore, soit les Hindous à cause de leur vieille civilisation, soit les Musulmans à cause qu’ils appartiennent en quelque sorte à la grande famille chrétienne, puisqu’ils reconnaissent en Christ « la parole de Dieu », Kalimat ullah, et qu’ils admettent la révélation de l’Ancien et du Nouveau Testament.

Le roi de Delhi est âgé non pas de quatre-vingt-douze ans comme les journaux l’ont dit, mais de quatre-vingt-quatre ans, puisqu’il en avait soixante-quatre en 1837[1]. On le disait, quelques années plus tard[2], doué d’une belle physionomie, de mœurs douces, de

    connu sous le titre honorifique de Schah alam (le Roi du monde), régna de 1707 à 1712.

  1. Bengal and Agra Guide and Gazetteer, 1841. T. Il, p. 288.
  2. Asiatic Journal, n. 5, t. XVIII, 1842. As. intell., p. 14.