Page:Discours de Garcin de Tassy, 1857.djvu/15

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Lawrence de bon lignage est décédé : son nom distingue reste en mémoire. » En additionnant les lettres qui forment le premier hémistiche de ce vers on a le nombre 1857, et en faisant la même opération pour le second, 1274.

Mais ce n’est pas dans les rangs seuls des braves militaires anglais qu’on a de cruelles pertes à déplorer. Le massacre de Delhi, celui de Cawnpour, et tant d’autres incidents terribles de la lutte actuelle, ont fait périr nombre de civiliens de tout rang. Parmi ceux qui méritent d’être distingués de la foule, je dois citer mon ami M. Francis Taylor, que j’ai mentionné dans mon allocution de l’an passé, comme celui à qui je devais la liste des ouvrages hindoustanis récemment publiés à Delhi. M. F. Taylor était le principal du collège des natifs de la malheureuse capitale de l’Inde, de ce collège qui comptait trois cents élèves, auxquels on enseignait les mathématiques et l’astronomie d’après les principes européens, mais les langues et les sciences de l’Orient d’après les principes asiatiques. C’est sur M. Taylor que je comptais principalement pour me tenir au courant du mouvement littéraire des provinces nord-ouest. En effet, il était mon correspondant le plus assidu et le plus obligeant, et comme il avait une connaissance parfaite de l’hindoustani, qu’il fréquentait les Indiens lettrés, avec lesquels il pouvait s’entretenir facilement, on sent combien il devait m’être utile pour les renseignements littéraires dont j’avais besoin. Son amitié pour les natifs ne l’a pas sauvé du massacre général de Delhi, et il a été tué le 10 mai, laissant une jeune veuve et des enfants en bas âge. C’est une perte réelle pour la littérature hindoustanie qu’il affectionnait et à laquelle il rendait de grands services ; car, continuant l’œuvre des hommes de mérite qui l’avaient précédé dans l’administration du collège de Delhi, MM. Boutros et Sprenger, il a encouragé la composition et la publication d’ouvrages hindoustanis (urdu et hindi) tant originaux que traduits du persan et de l’arabe, du sanscrit et de l’anglais.

Et ce n’est pas l’insurrection seule qui a fait éprouver des pertes cruelles à la littérature orientale. À Téhéran, il est mort récemment Mirza Muhammad Ibrahim, qui fut longtemps professeur à l’East-India college d’Haileybury, où je l’ai connu en 1837, et qu’il quitta pour aller remplir les fonctions de gouverneur du roi actuel de Perse. Il parlait et écrivait parfaitement l’anglais, et il était connu par ses à-propos et ses reparties spirituelles. On lui doit une grammaire persane très-estimée, une suite d’intéressants ar-