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Page:Discours de Garcin de Tassy, 1857.djvu/14

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assisté d’un nombre considérable d’hommes de sa rayat, entoura les troupes rebelles de son contingent et leur ordonna de déposer les armes de bonne grâce s’ils ne voulaient y être contraints par force ; les sipahis ne voyant pas d’autre alternative, obéirent, et se retirèrent dans leurs habitations respectives. Je dois rappeler aussi les nobles paroles que le chef mahratte d’Indore, Holkar, resté fidèle aux Anglais, adressa aux insurgés de son contingent, que « le meurtre des femmes et des enfants n’est autorisé par aucune religion », et enfin faire observer avec l’Examiner que beaucoup d’Anglais qu’on croit morts sont cachés chez des Indiens fidèles et sortiront de leur retraite après que la tranquillité sera rétablie.

Des Indiens qui n’ont pu faire des actes réels de dévouement ont hautement témoigné de leur vive sympathie pour les victimes. De ce nombre est Syed Ahdoollah, de la suite de la reine douairière et des princes d’Aoude, qui à la nouvelle de la mort de sir Henry Lawrence, un des généraux qui ont péri dans les combats qu’a entraînés la révolte et qu’il avait particulièrement connu lorsqu’il remplissait dans le Penjab les fonctions de traducteur dans les bureaux de l’administration anglaise, a publié un poëme (masnawi) en hindoustani dont il a donné lui-même une imitation abrégée en vers anglais qui attestent sa facilité à écrire cette langue. Voici la traduction littérale de quelques vers du saïyid faite d’après le texte original :

« Lawrence était le grand ami de l’Inde, il cherchait toujours à en relever l’éclat… Il enlevait la poussière de l’affliction de toutes les têtes, il essuyait les larmes de toutes les joues… Au jour de la bataille et du combat son visage était comme du fer rougi, quoique son cœur fût pour la pitié plus mou que la cire… Toujours attaché aux commandements divins, il n’était pas préoccupé des intérêts du monde, tout son désir était de plaire à Dieu et de rendre heureux tous les cœurs… Hélas ! par la tyrannie des astres néfastes, un fusil de malheur l’a couvert de sang. Mais quoique cet homme si justement considéré ait quitté le monde, il y vit par sa renommée. Non, cet homme excellent n’est pas mort, car son beau nom demeurera jusqu’au jour de la résurrection. Le souvenir des admirables qualités qu’il possédait est ineffaçable dans les cœurs comme la sculpture sur la pierre. »

La pièce se termine par un vers ingénieux qui donne le double chronogramme de l’année de la mort du héros, tant d’après l’ère chrétienne que d’après celle de l’hégire, et qui signifie : « Sir Henry