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avaient conquis l’Ethiopie et la Lybie, à peu près comme les Egyptiens faisaient conquérir, par Sésostris ou par Osymandias, l’Inde et la Bactriane.

Que serait-ce si nous examinions maintenant les différens rapports sur Sardanapale, dans lesquels un savant célèbre a cru trouver des preuves de l’existence de trois princes de ce nom, tous trois victimes de malheurs semblables[1] ; à peu près comme un autre savant trouve aux Indes au moins trois Vicramaditjia, également tous les trois héros d’aventures pareilles ?

C’est apparemment d’après le peu de concordance de toutes ces relations que Strabon a cru pouvoir dire que l’autorité d’Hérodote et de Ctésias n’égale pas celle d’Hésiode ou d’Homère[2]. Aussi Ctésias n’a-t-il guère été plus heureux en copistes que Manéthon ; et il est bien difficile aujourd’hui d’accorder les extraits que nous en ont donnés Diodore, Eusèbe et le Syncelle.

Lorsqu’on se trouvait en de pareilles incertitudes dans le cinquième siècle avant Jésus-Christ, comment veut-on que Bérose ait pu les éclaircir dans le troisième et peut-on ajouter plus de foi aux quatre cent trente mille ans qu’il met avant le déluge, aux trente-cinq mille ans qu’il place entre le déluge et Sémiramis, qu’aux registres de cent cinquante mille ans qu’il se vante d’avoir consultés[3] ?

On parle d’ouvrages élevés en des provinces éloignées, et qui portaient le nom de Sémiramis ; on prétend aussi avoir vu en Asie mineure, en Thrace, des colonnes érigées par Sésostris[4] ; mais

  1. Voyez dans les Mémoires de l’Académie des Belles-Lettres, tome V, le Mémoire de Fréret sur l’histoire des Assyriens.
  2. Strabon, lib. XI, page 507.
  3. Syncelle pages 38 et 39.
  4. N. B. Il est très-remarquable qu’Hérodote ne dit avoir vu de monumens de Sésostris qu’en Palestine, et ne parle de ceux d’Ionie que sur le rapport d’autrui, et en ajoutant que Sésostris n’est pas nommé dans les inscriptions, et que ceux qui ont vu ces monumens les attribuent à Memnon. Voyez Euterpe, chapitre CVI.