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d’Agron[1], premier roi Héraclide de Lydie. Cependant il le fait fils de Bélus, tant il y avait dès lors de confusion dans les souvenirs. S’il parle de Sémiramis comme de l’une des reines qui ont laissé de grands monumens à Babylone, il ne la place que sept générations avant Cyrus.

Hellanicus, contemporain d’Hérodote, loin de laisser rien construire à Babylone par Sémiramis, attribue la fondation de cette ville à Chaldæus, quatorzième successeur de Ninus[2].

Bérose, Babylonien et prêtre, qui écrivait à peine cent vingt ans après Hérodote, donne à Babylone une antiquité effrayante ; mais c’est à Nabuchodonosor, prince relativement très-moderne, qu’il en attribue les monumens principaux[3].

Touchant Cyrus lui-même, ce prince si remarquable, et dont l’histoire aurait dû être si connue, si populaire, Hérodote, qui ne vivait que cent ans après lui, avoue qu’il existait déjà trois sentimens différens ; et en effet, soixante ans plus tard Xénophon nous donne de ce prince une biographie toute opposée à celle d’Hérodote.

Ctésias, à peu près contemporain de Xénophon, prétend avoir tiré des archives royales des Mèdes une chronologie qui recule de plus de huit cents ans l’origine de la monarchie assyrienne, tout en laissant à la tête de ses rois ce même Ninus, fils de Bélus, dont Hérodote avait fait un Héraclide; et en même temps il attribue à Ninus et à Sémiramis des conquêtes vers l’occident d’une étendue absolument incompatible avec l’histoire juive et égyptienne de ce temps-là[4].

Selon Mégasthènes, c’est Nabuchodonosor qui a fait ces conquêtes incroyables. Il les a poussées par la Lybie jusqu’en Espagne[5]. On voit que, du temps d’Alexandre, Nabuchodonosor avait tout-à-fait usurpé la réputation que Sémiramis avait eue du temps d’Artaxerxès. Mais on pensera sans doute que Sémiramis, que Nabuchodonosor

  1. Clio, cap. VII.
  2. Étienne de Byzance au mot Chaldæi.
  3. Josèphe (contre Appion), lib. I, cap. XIX.
  4. Diod. Sic., lib. II.
  5. Josèphe (contre Appion), lib. I, cap. VI ; et Strabon, lib. XV, page 687.